Promouvoir la place des femmes chez les sapeurs-pompiers volontaires, alors que près de 80% des soldats du feu du département sont des hommes. Tel est le message de la vidéo diffusée sur les réseaux sociaux par le SDIS de la Haute-Marne, visionnée plus de 80 000 fois depuis le 18 décembre.
Un clip pour s'attaquer à un chiffre : 19%. En Haute-Marne, sur 1151 sapeurs-pompiers volontaires, seulement 217 sont des femmes. Soit 19%, donc. Une statistique identique à la moyenne nationale. Mais avec sa nouvelle opération de communication, couronnée d'un franc succès sur les réseaux sociaux, le SDIS 52 entend bien contribuer à faire bouger les choses.
C'est au château du domaine de Mont-Remy, à Nomécourt, que s'ouvre ce clip de promotion. Un décor et une première scène volontairement inspirée de l'histoire de La Belle au bois dormant. On y voit une femme allongée sur son lit, en robe, comme la princesse endormie dans l'attente de son prince charmant.
Mais l'adaptation de la légende Disney s'arrête là. Car ce n'est pas le baiser de son homme qui viendra réveiller la princesse, mais bel et bien bip d'astreinte posé sur la table de chevet, qui sonne et l'appelle à partir en intervention. La jeune femme quitte alors sa tunique rose pour enfiler la tenue de pompier et se porter au chevet d'une victime d'un accident de voiture.
"On peut être mère de famille et porter la tenue de pompier"
"Avec ce clip, l'idée était de montrer qu'on peut être une femme, féminine, mère de famille et porter la tenue de sapeur-pompier", explique l'adjudante-cheffe volontaire, Delphine Glowiak, à la tête de la commission féminisation l'Union départementale des sapeurs-pompiers (UDSP) de la Haute-Marne, créée en 2019 pour encourager le recrutement des femmes au sein des casernes.
"Certaines femmes se demandent comment garder ses enfants, comment gérer sa famille, tout en étant sapeur-pompier. Mais dans ce clip, l'officier en chef qui est elle-même maman est la preuve que c'est faisable, que rien n'est impossible."
Cette vidéo de recrutement, appuyée par le slogan "Le volontariat se décline aussi au féminin", a pour objectif de contribuer à "lever les freins à l'engagement des femmes" au sein de la profession. "Un des principaux freins, c'est le fait d'être mère de famille, assure Delphine Glowiak. Certaines se demandent comment garder ses enfants, comment gérer sa famille, tout en étant sapeur-pompier. Mais dans ce clip, l'officier en chef qui est elle-même maman est la preuve que c'est faisable, que rien n'est impossible."
Dans cette vidéo, le rôle de la princesse muée en pompier héroïne, et mère de famille, est porté à l'image par la cheffe de groupe Ophélie Sénéchal. D'autres personnnels de secours des casernes de Haute-Marne interviennent également.
Plus de 80 000 vues sur les réseaux sociaux
La vidéo publiée le 18 décembre 2021, et imaginée par cette commission féminisation et le groupe de travaillent sur la féminisation du SDIS 52, a été largement partagée sur les réseaux sociaux. Delphine Glowiak, également cheffe de centre à la caserne d'Eclaron, revendique plus de "80 000 vues" sur Facebook.
Un buzz qui a dépassé les frontières de la Haute-Marne, alors que la vidéo a été relayée sur le compte de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France et sur le compte Facebook du député du Var, Fabien Matras, auteur de la loi Matras, visant à consolider le modèle de sécurité civile et valoriser les pompiers professionnels et volontaires.
La réréfence à la Belle au bois dormant raillée par des internautes
L'image de la princesse de la Belle au bois dormant, pourtant détournée et moquée dans ce clip, a toutefois laissé un goût amer à certains internautes. On peut lire - au-delà des nombreux messages de félicitations - quelques commentaires plus critiques.
Voici quelques extraits de réactions publiées en dessous de la publication Facebook de la vidéo : "L'entrée en matière reste un conte de fées avec une princesse en robe, au 21e siècle on aurait pu trouver autre chose", regrette Ludivine. De son côté, Aurélie loue "un très beau clip", mais juge qu'"en faisant ce genre de campagne publicitaire vous ne rendez pas service aux femmes… au contraire vous cultivez la différence et ne faites qu’augmenter l’inégalité H/F."
Réponse de Stéphane Pernelle, président de l'Union départementale des sapeurs-pompiers de la Haute-Marne : "Oui, ça fait couler un peu d'encre, mais ça fait partie du jeu. Puis tant que l'on parle de nous..." Delphine Glowiak, elle, insiste : "On peut porter une belle robe, être sapeur-pompier et accéder à des postes à responsabilité. Nous sommes complémentaires et c'est justement la mixité qui fait notre force dans nos casernes".
Des initiatives locales avant une vaste campagne nationale
Le SDIS 52 n'est pas le premier à relancer le débat sur la faible présence de femmes dans leur métier. Le Territoire de Belfort y était allé de son propre clip en octobre 2019, comme l'avait relayé l'Est républicain.
Des initiatives locales donc, précurseures d'une "véritable campagne de communication, pour ouvrir et diversifier le recrutement de sapeurs-pompiers volontaires", à l'échelle nationale, promise par le président de La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, Grégory Allione, lors d'un discours en compagnie du président de la République, Emmanuel Macron, le 17 octobre 2021. Une campagne qui pourrait débuter à l'automne 2022.
Quel impact de la vidéo sur le recrutement ?
Une seconde vidéo - la suite de l'histoire - devrait être publiée l'année prochaine par le SDIS 52. Avec l'espoir de susciter le même engouement. "On ne pensait pas que cette première vidéo allait avoir autant de vues en si peu de temps", se réjouit l'adjudante-cheffe Delphine Glowiak.
Le clip se conclut sur l'image cette cheffe de groupe, Ophélie Sénéchal, qui, face caméra, devant des gyrophares en alertes, interpelle l'auditoire : "Réveillez le sapeur-pompier qui est en vous, alors engagez vous !"
Reste à savoir quel sera l'impact de ce clip de communication sur le recrutement des femmes dans les casernes. "Si on monte à 30 % (contre 19% actuellement NDLR) en Haute-Marne, ce serait génial", avance Delphine Glowiak.