Sid Ahmed Ghlam, l'étudiant algérien soupçonné d'avoir tué une femme et projeté un attentat contre au moins une église à Villejuif en avril, a affirmé vendredi au juge d'instruction qu'il avait au contraire empêché la commission de l'attaque, selon ses avocats.
Entendu dans la matinée, l'étudiant de 24 ans, suspect numéro 1, "s'est expliqué pour la première fois" devant le magistrat instructeur, ont dit ses défenseurs. "Il a reconnu avoir été à Villejuif le 19 avril 2015 en présence d'un autre individu. Il conteste en revanche toute responsabilité dans la mort d'Aurélie Châtelain et a également affirmé avoir fait ce qu'il fallait pour empêcher la commission d'un attentat ce jour-là", expliquent ses trois avocats, Matthieu de Vallois, Gilles-Jean Portejoie et Christian Benoît.
Lors de sa mise en examen, les avocats avaient déjà affirmé que leur client contestait tous les faits qui lui étaient reprochés, sans entrer dans les détails. Vendredi, ils n'ont fait aucun autre commentaire, notamment sur ce second individu évoqué par Sid Ahmed Ghlam. La question s'est déjà posée de savoir si Ghlam était seul ou non à Villejuif, dans le Val-de-Marne. Question renforcée par l'existence d'un message de ses commanditaires retrouvé par les enquêteurs et qui poussait l'étudiant à agir seul si son complice ne venait pas, avait relevé une source proche du dossier.
Le jeune homme, connu des services de renseignement parce qu'il avait basculé dans l'islam radical, avait été arrêté de manière fortuite le 19 avril à Paris, après avoir été blessé dans des circonstances inexpliquées et avoir lui-même alerté le Samu. Dans sa chambre d'étudiant et près de sa voiture, les policiers avaient retrouvé un véritable arsenal: quatre fusils d'assaut kalachnikov, un pistolet, un revolver, des gilets pare-balles et des gilets multipoches, des munitions et des documents manuscrits avec des cibles potentielles.
Commanditaire en Syrie ?
Selon les enquêteurs, le suspect avait fait des recherches sur les églises de Villejuif. L'exploitation de son GPS atteste de sa présence dans cette ville de banlieue parisienne, à l'heure où Aurélie Châtelain a été tuée, le 19 avril, par un coup de feu alors qu'elle se trouvait dans son véhicule. La balle a été tirée avec un revolver du suspect, dont l'ADN a aussi été trouvé dans le véhicule de la jeune femme. Du sang de la victime a été retrouvé sur la parka de Sid Ahmed Ghlam. Les enquêteurs ont la conviction que l'Algérien n'a pu agir seul et qu'il a été "téléguidé" depuis la zone irako-syrienne. Pour passer à l'acte, il a bénéficié "d'une aide qui s'est traduite par des véhicules et de la fourniture d'armement", avait affirmé le procureur de Paris, François Molins.Au tout début de l'enquête, le procureur avait aussi affirmé que Ghlam, qui avait chez lui des documents sur les "organisations terroristes Al-Qaïda et État islamique", avait été en contact avec "une autre personne pouvant se trouver en Syrie", qui lui avait demandé "explicitement de cibler particulièrement une église".
L'enquête se concentre depuis sur de possibles complicités. Trois hommes ont ainsi été mis en examen et écroués, soupçonnés de lui avoir apporté une aide logistique. Tous nient avoir été au courant d'un projet d'attaque. Cet attentat évité avait eu lieu moins de quatre mois après les attaques jihadistes menées à Paris par les frères Kouachi puis Amédy Coulibaly, qui ont fait dix-sept victimes, et dont les auteurs ont aussi trouvé la mort.