Gérard Ehret a été condamné à 30 ans de réclusion criminelle assortis d'une peine de sûreté de 20 ans
Assises de Colmar : G. Ehret condamné à 30 ans
La cour d'assises de Colmar a condamné vendredi Gérard Ehret, le chef d'un clan familial accusé d'avoir séquestré des handicapés pour leur soutirer leurs allocations et d'avoir tué une femme en 2008, à 30 ans de réclusion criminelle assortis d'une peine de sûreté de 20 ans.
Assises de Colmar : procès-fleuve dès demain
La cour d'assises de Colmar juge à partir de demain dix personnes accusées de séquestrations, de violence et pour trois d'entre elles de l'assassinat de Sylvie Mutschler. Son corps avait été retrouvé le 29 juillet 2008 dans le grand canal d'Alsace à Rosenau.
La cour d'assises de Colmar a condamné vendredi Gérard Ehret, le chef d'un clan familial accusé d'avoir séquestré des handicapés pour leur soutirer leurs allocations et d'avoir tué une femme en 2008, à 30 ans de réclusion criminelle assortis d'une peine de sûreté de 20 ans.
Vendredi 10 février
Le parquet avait requis la perpétuité assortie d'une peine de sûreté de 22 ans contre Gérard Ehret, 53 ans, le principal accusé de ce procès fleuve qui a duré quatre semaines.
A l'issue de plus de 12 heures de délibéré, les jurés ont également condamné les deux autres principaux accusés à des peines très lourdes: Edmond Welcker (26 ans), le fils de Gérard Ehret et son "bras armé", a été condamné à 20 ans de réclusion, et Bernard Boulanger (59 ans), qui avait d'abord été séquestré par la famille dans les années 1990 avant de se mettre à son service, a été condamné à 15 ans de réclusion. Seule une des 10 personnes jugées dans cette affaire (trois pour assassinat, sept pour séquestration) a échappé à une peine de prison ferme. Cathleen Richard, la seconde épouse de Gérard Ehret, a écopé de 12 ans de réclusion et sa première femme, Odile Welcker, a quant à elle été condamnée à sept ans de prison. La fille et la belle-fille du "patriarche" ont été condamnées à huit ans de prison. La plupart des accusés seront également suivis à leur sortie de prison dans le cadre d'une mesure de suivi socio-judiciaire.
Gérard Ehret, qui exerçait visiblement une emprise inquiétante sur tous ses proches, était jugé depuis le 17 janvier en compagnie de neuf autres personnes pour avoir séquestré un couple durant quatre ans, entre 2004 et 2008. Si le chef du clan avait reconnu devant la cour d'assises tous les faits qui lui étaient reprochés, dans l'espoir de "sauver" ses proches, les explications embrouillées et les versions changeantes des différents protagonistes tout au long de l'instruction et des débats n'ont pas convaincu les jurés. "Est-ce que durant toutes ces années Gérard Ehret a agi seul? Pendant quatre ans Gérard a-t-il pu séquestrer Sylvie seul? Non! Ils sont tous pareils, cupides, égocentriques et avec une absence de conscience morale", avait déclaré mercredi la procureure Laetitia Manouvrier dans ses réquisitions.
Les avocats de la défense avaient de leur côté mis en avant "un grand point d'interrogation" sur le déroulement exact des faits concernant la mort de Sylvie Mutschler. L'avocat de Bernard Boulanger, Me Charles-Henri Wolber, avait également plaidé la folie de son client, dont certains experts avaient noté l'abolition totale du discernement. Sylvie Mutschler et son époux Daniel Eckert, handicapés mentaux légers, avaient été retenus, violentés et asservis par Gérard Ehret et plusieurs membres de sa famille qui dans le même temps leur subtilisaient leurs allocations. Daniel Eckert avait réussi à s'enfuir en avril 2008 mais sa compagne avait été retrouvée noyée en juillet de la même année dans le Grand Canal d'Alsace à Rosenau, son corps portant de nombreuses traces de coups.
Mercredi 8 février
L'avocat général a requis la réclusion criminelle à perpétuité contre le chef de clan pour l'assassinat de Sylvie Mutchler, retrouvée dans le canal d'Alsace, à Rosenau en 2008. Plus 118 années de prison cumulées pour les 9 autres accusés.
Jeudi 2 février
Le procès d'un clan familial, jugé par la cour d'assises du Haut-Rhin pour la séquestration et l'assassinat d'une femme, a connu jeudi un rebondissement, avec les aveux du "patriarche", qui a reconnu avoir tué cette personne vulnérable à qui il soutirait ses allocations.
Gérard Ehret, 53 ans, qui comparaît à Colmar avec neuf autres personnes, a reconnu les faits qui lui étaient reprochés: la séquestration de personnes vulnérables qui bénéficiaient d'aides sociales et l'assassinat de l'une d'elles, Sylvie Mutschler, retrouvée noyée dans le Grand Canal d'Alsace fin juillet 2008.
Les trois principaux accusés se renvoyaient la responsabilité du meurtre depuis le début de ce procès tenu sur fond de misère sociale, le 17 janvier. "Je n'avais pas l'intention de la tuer mais c'est arrivé, a-t-il raconté. J'ai débloqué, j'ai pris un bâton et je l'ai massacrée. Ensuite, je l'ai tirée au bord de l'eau et je l'ai poussée dans l'eau avec ma jambe." "Mon client veut sauver son entourage, notamment son fils. Il veut assumer ses responsabilités mais je crains qu'il n'assume plus que ses responsabilités", a regretté son avocat, Me Ange Bujoli, après ce nouveau revirement.
Trois hommes sont les principaux suspects concernant l'assassinat de Sylvie Mutschler: Gérard Ehret, son fils Edmond Welcker (26 ans), présenté comme "son bras armé", et Bernard Boulanger (59 ans), un homme d'abord séquestré par la famille Ehret dans les années 1990 avant de se mettre à leur service. Malgré les aveux du principal accusé, qui a tout fait pour mettre hors de cause les deux autres, les jurés auront certainement du mal à démêler les fils de cette affaire sordide: plusieurs témoins ont peur de représailles et les versions évoluent au fil des interrogatoires.
Bernard Boulanger, qui s'exprime avec difficultés et par moments aidé d'un interprète en alsacien, a ainsi mis en avant la thèse de l'accident pour expliquer la noyade. Edmond Welcker, survêtement blanc sur maillot de l'équipe de France de football, a de son côté mis en cause son père et Bernard Boulanger. "On est à la ixième version, vous le savez", s'est agacée la présidente Anne Gailly. Son ancienne compagne a aussi brièvement raconté avoir vu quelques jours après les faits le jeune homme "fondre en larmes" et avouer qu'il avait tué Sylvie Mutschler. "La vérité je viens de la dire là, je ne me souviens plus de ce que j'ai dit en garde à vue, je n'étais pas bien, il y avait la pression psychologique", a conclu Edmond Welcker, la tête basse et sans jamais regarder les jurés.
Depuis l'ouverture des débats, la cour d'assises s'était intéressée à la séquestration de Sylvie Mutschler et de son mari Daniel Eckert entre 2004 et 2008. Les deux époux, handicapés mentaux légers, avaient été retenus, violentés et asservis par Gérard Ehret et plusieurs membres du clan, qui leur prenaient leurs allocations. Daniel Eckert avait réussi à s'enfuir en avril 2008. En juillet, sa compagne était retrouvée noyée à Rosenau , son corps portant de nombreuses traces de coups. Les débats doivent se poursuivre jusqu'au 10 février. Les trois principaux accusés encourent la réclusion criminelle à perpétuité. Les sept autres encourent 30 ans de réclusion pour séquestration.
Mercredi 25 janvier
La cour a commencé à examiner l'enlèvement et la séquestration de Sylvie Mutschler depuis 2003.
Mardi 17 janvier
Le corps de Sylvie Mutschler, âgée de 32 ans, avait été découvert le 29 juillet 2008 à Rosenau dans le Grand Canal d'Alsace. Outre la mort par noyade, l'autopsie mettait en évidence de nombreuses traces de coups, plus ou moins récents. Le 2 août, Bernard Boulanger, aujourd'hui âgé de 59 ans, se présentait à la gendarmerie pour signaler la disparition d'une amie. En raison de ses explications embrouillées, il était placé en garde à vue.
Au fil de leur enquête, les gendarmes allaient mettre au jour le fonctionnement criminel présumé d'un clan familial dominé par la figure de Gérard Ehret, 53 ans. Il apparaissait que Gérard Ehret et ses proches s'étaient fait une spécialité de prendre sous leur coupe des personnes vulnérables, handicapées mentales ou physiques, et de les violenter pour détourner à leur profit leurs allocations. Sylvie Mutschler et son mari Daniel Eckert auraient été enlevés à leur domicile de Ranspach-le-Haut en novembre 2004 par Gérard Ehret et son frère Jean-Claude, et séquestrés dans une caravane en Meuse.
Début 2005, ils auraient été ramenés en Alsace, et, pendant plus de trois ans, séquestrés à Mulhouse, Wittenheim et Roppentzwiller, ils auraient subi d'innombrables violences de la part de Gérard Ehret, de son ex-épouse, de son épouse, de son fils et de sa compagne.
En avril 2008, Daniel Eckert parvenait à s'échapper. Il dénonçait les faits à sa belle-mère et à la gendarmerie de Saint-Louis, qui malheureusement ne le prenait pas au sérieux.
Cette fuite aurait précipité la décision du clan Ehret de se débarrasser de Sylvie Mutschler, en tentant une première fois de la noyer, puis en y parvenant, courant juillet 2008. Un des enjeux du procès sera de déterminer le déroulement et les responsabilités
des trois protagonistes de l'assassinat -Gérard Ehret, son fils Edmond Welcker (25 ans) et Bernard Boulanger-, chacun se rejetant jusqu'à présent la faute. De manière générale, les jurés auront à évaluer la part de culpabilité de chacun, alors que les accusés semblent vouloir faire "front commun" contre Gérard Ehret pour "lui faire porter la plus lourde responsabilité de cette affaire", selon son avocat Me Ange Bujoli.
On peut s'attendre selon l'avocat "à une confrontation entre le père et le fils, comme cela a été le cas dans le cabinet du juge d'instruction", où les deux hommes se sont battus. Plusieurs accusés apparaissent dans le dossier à la fois comme victime du patriarche et bourreau: ainsi Bernard Boulanger, qui quittera le box des accusés pour le banc des parties civiles lorsqu'il s'agira d'évoquer les violences qu'il a lui-même subies de 1992 à 1999. Une enquête ouverte sur ces faits en 1995 a été classée sans suite par le parquet de Colmar en 1999.
Planeront aussi sur ce procès quelques fantômes, comme cet homme trouvé mort dans un bain de javel au domicile de Gérard Ehret en 1986. Des morceaux de ses pieds avaient été découverts dans son estomac mais l'enquête avait conclu au suicide. (Avec l'AFP.)