Chaque année, c’est le même rituel. De mi-février à fin mars, les crapauds communs et les grenouilles rousses quittent les forêts, traversent nos routes pour aller se reproduire dans les zones humides. Une migration massive qui demande aux départements et aux associations un peu d'organisation
Vous avez peut-être remarqué de drôles de filets le long de vos routes, ou croisé quelques crapauds le soir en rentrant chez vous… Pas de panique ! Il ne s’agit pas d’une invasion, mais de la grande migration des batraciens qui a lieu chaque année à partir de mi-février jusque fin mars. Pour les protéger et leur permettre de se reproduire, les départements mettent en place plusieurs systèmes.
Fermeture de route en Moselle
Si vous habitez du côté de St Quirin, vous avez peut-être été obligé de prendre la déviation qui passe par Niederhoff pour vous rendre à Lorquin. Depuis le 21 février 2021, le département de la Moselle a fermé la RD 96 G à la circulation, entre 19h00 et 6h. Car c’est principalement la nuit que ces batraciens se déplacent. "Ils sortent de leur hivernage, la plupart du temps dans les forêts ou les sous-bois et cherchent à se rapprocher d’une zone humide ou d’un lac. C’est là qu’ils s’accoupleront et pondront leurs œufs" nous explique Damien Aumaitre du Conservatoire des espaces Naturels de Lorraine. L’ennui, c’est qu’avec l’intensification de l'agriculture et la bétonisation des sols, les zones humides sont en nette régression,et les batraciens doivent parfois parcourir de nombreux kilomètres avant de trouver un point d’eau. Sur leur route, ils vont forcément croiser les départementales utilisée par les humains.
En Moselle, comme en Meurthe-et-Moselle, le département a donc décidé de leur réserver certaines routes, de nuit, quand la déviation est possible. Ce sera le cas sur la RD 96 G jusque fin mars 2021, afin d’éviter que des voitures (tout de même rares en ces temps de couvre-feu) ne viennent écraser les précieux batraciens. C’est une des trois solutions mises en place par les départements pour préserver ces espèces protégées.
Filets en Meuse
En Meuse, le sauvetage des batraciens, c’est l’affaire des bénévoles de l’association Meuse Nature Environnement. A plusieurs endroits, sur les routes départementales, des filets seront posés dès le début mars pour canaliser les crapauds et les grenouille. En suivant le filet, ils finissent par tomber dans un seau, et chaque matin, durant tout le mois de mars, les bénévoles viendront les libérer de l’autre côté de la route. Une dizaine de filets sont ainsi posés dans toute la Lorraine.
A certains endroits, quand les bestioles sont très nombreuses, des tunnels appelés aussi batrachoducs, sont creusés sous les routes. C’est le cas du côté d’Ars-sur-Moselle, au nord de Pont-à-Mousson. Des ouvrages qui sont pris en charge par les Conseils départementaux, car souvent onéreux et techniques.
Espèces protégées
Mais pourquoi diable les humains se donnent-ils tant de mal pour sauver ces batraciens ? C’est, madame, monsieur, qu’il ne s’agit pas de sauvegarder quelques spécimens, mais bien des milliers de crapauds et de grenouilles, qui font partie de la chaîne alimentaire de la nature, et contribuent à la biodiversité de nos campagnes. De plus, ces espèces protégées sont en danger, menacées par la disparition des zones humides dont elles ont besoin pour vivre et se reproduire, mais aussi par la bétonisation des sols.
Les batraciens sont menacés par la raréfaction des zones humides et les pollutions issue de l'agriculture intensive et du trafic
Par ailleurs, leur peau est perméable et les différentes pollutions issues de l’agriculture, du trafic et autres activités humaines, impactent directement ces espèces sensibles. "Leur nombre est en chute libre depuis les années 50", nous explique Damien Aumaître, du Conservatoire des espaces naturels de Lorraine. Enfin, ces mesures permettent aussi de sauver quelques autres espèces protégées comme la salamandre tachetée ou les tritons, également menacés.
Les crapauds et les grenouilles n’ont peut-être pas le panache ou la beauté d’autres espèces locales, mais ils sont indispensables car ils contribuent à la richesse du patrimoine naturelle de la Lorraine.