La sanction contre Anthony Smith est annulée par le Tribunal administratif de Nancy. L’inspecteur du travail d'abord suspendu puis muté d’office, obtient gain de cause en première instance, ce jeudi 20 octobre.
- Le 15 avril 2020, Anthony Smith inspecteur du travail dans la Marne est mis à pied
- Le 1er octobre 2020, il retrouve sa fonction d'inspecteur du travail, il est muté d'office dans la Meuse.
- Le 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Nancy annule la sanction
C’est une première victoire, dans une histoire qui a fait grand bruit. Un inspecteur du travail de la Marne, Anthony Smith, sanctionné par sa hiérarchie en pleine épidémie de covid-19. La décision du Tribunal administratif de Nancy ce jeudi 20 octobre a annulé en première instance la sanction décidée contre lui. "Après 918 jours de lutte la justice annule la sanction disciplinaire prise par Elisabeth Borne à mon encontre, a réagi Anthony Smith sur Twitter. Des larmes, de la joie, merci à vous."
Anthony Smith était l'invité de France 3 Champagne-Ardenne ce jeudi 20 octobre à midi. Nous vous proposons de revoir son interview ci-dessous.
Rappel des faits
Mars 2020, Anthony Smith est inspecteur du travail à Reims (Marne). Les délégués du Comité Social d'Entreprise (CSE) d’une association de service d'aide à la personne, l'Aradopa, le saisissent. La situation des travailleurs est préoccupante : manque d'équipements pour faire face à l'épidémie, des clients sont décédés, des salariés contaminés.
L’inspecteur du travail entre en contact avec la direction, mais les relations sont compliquées. Aucune réponse n'est apportée à ses demandes de réorganisation des services et de mise à disposition d'équipements de protection. L’inspecteur subit des pressions y compris de sa hiérarchie. Son action est perçue comme un "acharnement" à l'encontre de l'organisme. Il décide malgré tout de déposer un référé contre l'Aradopa devant le Tribunal judiciaire de Reims.
Le jour du dépôt de ce référé, Anthony Smith est mis à pied. Muriel Pénicaud est alors ministre du Travail. Sa hiérarchie lui reproche alors notamment d'avoir "méconnu de manière délibérée, grave et répétée les instructions de l’autorité centrale du système d’inspection du travail concernant l’action de l’inspection durant l’épidémie de Covid-19."
Sa sanction est finalement transformée en mutation d'office. D’abord en Seine-et-Marne, puis à Bar-le-Duc, dans la Meuse. Anthony Smith réussit à réintégrer le 1er octobre 2020 son poste à la direction du travail, après 5 mois de suspension. Sa réintégration, il l’a doit à un recours gracieux de son avocat auprès de la nouvelle ministre du Travail de l’époque, Elisabeth Borne. Recours auquel elle répondra par "un geste d'apaisement", sans revenir sur le fond, l’existence d'une telle sanction disciplinaire.
Ce qu'on lui reprochait
C’est cette sanction que le tribunal administratif de Nancy remet en cause ce jeudi 20 octobre. Le tribunal "a estimé que seule l’une des fautes qui lui était reprochée pouvait être retenue contre lui et que cette faute ne justifiait pas la sanction infligée".
Dans le détail, il lui était d'abord reproché d'avoir "demandé à des employeurs de justifier de mesures de prévention en vue d'éviter la propagation du covid-19, formulé des prescriptions à leur égard et saisi le juge des référés le juge des référés afin que celui-ci enjoigne à un employeur de prendre des mesures de protection des salariés". Des procédures alors contraires aux instructions de sa hiérarchie. Sur ce point, "le tribunal a estimé qu'Anthony Smith ne s’était livré à aucun abus de droit, n’avait pas porté gravement atteinte aux règles de déontologie professionnelle ou au bon fonctionnement du service public."
"Anthony Smith ne s’est livré à aucun abus de droit. Il n'a pas porté gravement atteinte aux règles de déontologie professionnelle ou au bon fonctionnement du service public".
Tribunal administratif de Nancy
Le tribunal a en revanche estimé que l'inspecteur du travail avait commis une faute en transmettant à ses collègues un document destiné aux salariés "laissant à penser aux salariés que l’inspection du travail était en droit d’attester de la régularité de l’exercice d’un droit de retrait, alors que cette appréciation relève de la compétence du seul juge judiciaire."
Dans son jugement, le tribunal a considéré que "la sanction de déplacement d’office infligée à M. Smith était disproportionnée à la gravité de la faute ainsi retenue et a annulé la sanction infligée à l’intéressé."
Son retour à Reims doit être acté. Le ministère du Travail dispose de deux mois pour déposer un recours devant la Cour administrative d’appel. Mais cet appel n'est pas suspensif, Anthony Smith devrait donc réintégrer son poste.