Anciens gilets jaunes, trois citoyens de la Marne décident de lancer l’opération Soleil Vert. L’objectif : bloquer le dépôt de carburant de Vatry à partir du 16 septembre pour faire entendre leurs revendications : une accessibilité pour tous à la nourriture, au chauffage et à la voiture.
« On veut que les gens ne soient pas étouffés, pas affamés », assène Laurent Tinois, ancien gilet jaune et habitant de la petite commune de Liart dans les Ardennes. Avec deux de ses amis, Baptiste Touchon et Fabrice Marchand, ils sont les trois têtes pensantes de l’opération Soleil vert, qu’ils veulent mener à partir du 16 septembre 2019. Ils appellent les citoyens champardenais à bloquer le dépôt de carburant de Vatry pour faire entendre leurs revendications. Une opération déjà menée par des agriculteurs de la région il y a plus d’un an. Une lettre signée par 25 personnes a été envoyée à la préfecture pour la prévenir de l’opération. A ce jour, ils n’ont pas obtenu de réponse mais ils iront coûte que coûte.
« Ne pas reproduire les erreurs des gilets jaunes »
Anciens gilets jaunes, les trois hommes ne voulaient pas « reproduire les même erreurs » que celles du mouvement qui a marqué l’année scolaire 2018-2019. « Le gouvernement reprochait aux gilets jaunes de ne pas savoir ce qu’ils voulaient. Il faut qu’on ait des revendications précises. » Les doléances se regroupent donc en trois axes : que tous les citoyens puissent accéder à l’alimentation de base, se déplacer en voiture et se loger dans des conditions décentes.Les signataires proposent non pas de supprimer certaines taxes mais de les transférer. En premier lieu, ils demandent une taxe à 0 % sur l’alimentation de base en échange d’une augmentation de la taxe sur les produits de luxe. De même, ils voudraient transférer la taxe du carburant pour les voitures sur celle des avions et des bateaux, des transports plus polluants et moins accessibles aux basses classes sociales. Enfin, ils proposent de mettre en place un principe de « chèque consommation » pour que tous les foyers puissent avoir du chauffage et de l’électricité.
Pour Baptiste Touchon, conseiller municipal sans étiquette à Signy-l’Abbaye, « le mouvement des gilets jaunes est devenu stérile. Ça s’est transformé en un affrontement contre les forces de l’ordre ». Surtout, il considère que rien n’a changé. « Le gouvernement a accentué sa politique libérale », dit-il en faisant notamment référence à la privatisation de l’aéroport de Paris. Le militant fait aussi part de sa lassitude des combats menés en vain. Ce qu’il veut, c’est du résultat : « manifester pour manifester ça ne sert à rien. Ce n’est pas un plaisir ». Pour les même raisons, les trois hommes se sont hâtés de déclarer leur manifestation en préfecture.
800 euros par mois
Côté précarité, Baptiste Touchon et Laurent Tinois parlent en connaissance de cause. Laurent Tinois, quadragénaire, a dû arrêter son travail dans les travaux publics à cause de ses problèmes de santé. A présent, il gagne 800 euros. « Aujourd'hui je ne galère pas, j'étouffe », déclare-t-il. Difficile de joindre les deux bouts avec sa femme et ses quatre enfants.Baptiste est quant à lui intérimaire et les seuls emplois qui lui sont proposés sont à temps partiels. Récemment il travaillait deux jours par semaine dans une usine de donuts à 45 minutes de chez lui, les frais n’étant pas remboursés à prix coutant. C'est lui qui a donné son nom à l'opération du 16 septembre. « Soleil Vert » fait référence au film d’anticipation de Richard Fleisher dans lequel
« les ressources sont détenues par une oligarchie », selon les mots du conseiller municipal. Pour lui, la ressemblance avec notre société est criante. Quand l’idée de cette opération a germé dans son esprit au début de l’été il a « tout de suite pensé à ce film ».