Mag Hantson, chanteuse, et Jérôme Finel, compositeur, tous deux professeurs de musique à Épernay (Marne), se mobilisent contre le harcèlement scolaire et sortent un titre, "Tears in the sea", dans l'espoir faire bouger les choses.
Une petite fille allongée, inconsciente, sur un lit d'hôpital. A côté d'elle, tenant sa petite main dont le poignet est orné d'un élastique pour cheveux, celle qui semble être sa mère. Dans le clip vidéo du titre Tears in the sea, composé et interprété par deux habitants d'Epernay, Mag Hantson et Jérôme Finel, le décor est tout de suite posé, l'ambiance, très lourde. Sur une mélodie douce et mélancolique, l'histoire se raconte en vidéo et en chanson. Par un système de flashbacks, on revoit la jeune fille, en larmes, dans sa chambre. Sur son téléphone portable, les messages haineux ne cessent de s'accumuler : "Tu ne sers à rien". "Tu n'es qu'une chienne". "Je vais ruiner ta vie". Et, un peu plus loin, un terrible "Va te pendre".
"Le noyau de la chanson, c'est vraiment ce que vivent les gens dont un proche est victime de harcèlement. C'est le ressenti d'une maman, d'un papa, d'une grand-mère ou d'un ami, qui est en train de perdre un enfant à cause de cela", explique Mag Hantson, 43 ans. Et de fait, la chanteuse, qui incarne la mère dans le clip vidéo, se demande dans les paroles : " Tell me why you never let me try to reach your heart ?", autrement dit : "Pourquoi ne m'as tu jamais laissé atteindre ton cœur ?".
La difficulté à entrer en communication avec un enfant harcelé est, pour le couple de rockeurs, au cœur du problème. C'est aussi ce qui explique pourquoi et comment un harcèlement peut durer des mois, voire des années, sans que les adultes ne s'en aperçoivent.
Faire évoluer les consciences
Avec cette chanson, Mag Hantson et Jérôme Finel espèrent pouvoir aider à faire bouger les lignes. Pour eux, le harcèlement scolaire est quelque chose de courant, et il semble prendre des proportions de plus en plus importantes à cause des réseaux sociaux. Tous les deux professeurs de musique au sein de l'école qu'ils ont ouverte à Epernay (Sparnamusic), ils ont souvent constaté des situations de harcèlement chez leurs élèves, qui se sont parfois confiés à eux. "Il y a souvent un manque de soutien dans les structures, poursuit Mag Hantson.
Quand certains osent parler du harcèlement, on se rend compte que c'est à chaque fois le même scénario qui revient. Aucune réponse par rapport à ses jeunes qui envoient un SOS.
La chanteuse originaire de Belgique se souvient aussi de cette famille qu'elle a connue il y a une quinzaine d'années, dont la petite fille s'est donnée la mort. Une histoire qui l'a marquée et dans laquelle elle a puisé les racines de la chanson. "Finalement, on en est toujours au même stade. Avec cette chanson, on espère faire passer un message fort pour éveiller les consciences, autant chez les parents que chez le corps enseignant". Jérôme Finel renchérit, dans une vidéo de présentation de leur clip : "Notre désir profond est que les victimes sortent du silence avec l'assurance d'être entendues, aidées et protégées".
Le couple espère par exemple que des médiateurs formés au harcèlement scolaire puissent être intégrés au sein des écoles. Car souvent les adultes sont démunis face à des situations souvent tendues, et il est difficile de faire naître un dialogue, et encore moins des solutions. "Il faudrait que l'on se sente un peu tous responsables, qu'on se dise que l'on peut tous apporter notre pierre à l'édifice, y compris en tant que parents", espère Mag Hantson.
On peut avoir un enfant harcelé, mais on peut aussi avoir un enfant harceleur. Et parfois, l'enfant n'a pas conscience de la gravité de ses gestes. Il faut donc pouvoir trouver les mots pour lui expliquer l'impact que peut avoir ses paroles ou ses actes.
Des dispositifs pour appeler à l'aide
En France, en 2015, une enquête menée par l'Education nationale estimait que 700 000 enfants étaient victimes de harcèlement. Pour endiguer le phénomène, 335 référents formés sont mobilisables dans les académies. Les élèves eux-mêmes peuvent devenir ambassadeurs de la lutte anti-harcèlement et tenter de repérer les situations à risques afin d'alerter et d'éviter l'isolement des victimes.
A la fin du clip vidéo de Mag Hantson et Jérôme Finel, la jeune fille hospitalisée sort de son inconscience, heureuse de retrouver sa mère, et éteint son téléphone portable. Une note d'espoir pour souligner qu'il est toujours possible d'agir.
Si vous subissez ou avez connaissance d'une situation de harcèlement envers un enfant, vous pouvez appeler le 3020 ou le 3018, dans le cas où le harcèlement a lieu sur internet.