Avec la crise sanitaire, les événements organisés dans le cadre d'octobre rose sont reportés ou annulés. Un coup dur supplémentaire pour les malades qui profitent de ce mois particulier pour informer et échanger des moments de convivialité.
Le ton est morose en ce début d'automne pluvieux. Valérie Bérard, la coordinatrice des Com'battantes, l'équipe de rugby formée par des malades atteintes de cancer du club d'Epernay, est triste de constater qu'octobre rose se fera à huis clos cette année. "Il n'y aura rien de fait, ce qui veut dire qu'on ne va pas développer l'équipe cette saison, regrette la Sparnacienne. Il y a sept joueuses inscrites, on espérait recruter pour doubler les capacités, voire un peu plus."
Alors qu'elles devaient fêter leur premier anniversaire ce mois-ci, les Com'battantes ont préféré reporter les événements prévus. Conférences, ateliers, courses et soirées… tout est remis au printemps 2021 voire à une date encore inconnue. Impossible pour les associations de malades de prendre des risques dans le contexte sanitaire actuel, à cause de leur fragilité immunitaire due aux traitements. Depuis le 19 septembre dernier, la Marne est classée en zone de circulation active du virus, soit le deuxième stade sur cinq de vigilance sanitaire.
Un manque de prévention et d'information
Les annulations de conférences et des ateliers représentent un problème majeur de communication, selon le docteur Bruno Cutuli, oncologue radiothérapeute à la clinique Courlancy de Reims et président de l'association Lise, l'institut du sein de Champagne. "Octobre rose, c'est un mois de prévention et d'information autour du cancer du sein. Le cancer du sein reste le premier cancer féminin en France et dans tous les pays occidentaux", explique le président de la société française de sénologie et de pathologie mammaire. Selon le spécialiste, cette pathologie reste encore méconnue des Français. "Ce sont 59.000 nouveaux cas par an, 12.000 morts par an soit 33% des cancers du sein féminins, insiste-t-il. C'est un problème de santé publique majeur. Le taux d'incidence a doublé en 30 ans. Dans les années 1990, on était à 30.000 cas, aujourd'hui on est presque à 60.000." Une augmentation due en partie au vieillissement de la population et à l'augmentation des diagnostics.Pour l'instant, le taux de personnes diagnostiquées par le dépistage mammographique est de 52 à 53% mais il faudrait que ce soit de l'ordre de 65% comme dans les pays scandinaves.
Octobre rose, pour les Com'battantes et autres associations dédiées aux patientes atteintes de cancer, est l'occasion de parler de leur combat contre la maladie. L'annulation des événements est un coup difficile à encaisser pour ces sportives. "Cette année, c'est vraiment particulier parce qu'elles ne peuvent pas promouvoir le rugby et leurs actions, se désole Valérie Bérard. Il n'y a pas de manifestations 'festives' autour de ces pathologies. Chacun va vivre son octobre rose à huis clos." Claire Fiaschi, de l'association Ensemble pour Elles, constate elle aussi un regain d'envie de se retrouver. "Mardi dernier, on était 25 personnes à l'accueil, pas simultanément, alors qu'avant le confinement on était plutôt 12 ou 13, alors que moi la première, je ne vais pas dans les magasins", note la Rémoise.
Un besoin de contacts malgré la maladie
Seulement, le confinement a encore plus isolé ces patientes à risque. "Cela leur a fait énormément de mal, constate la coordinatrice des Com'battantes. Tout s'est arrêté pour elles. Il y a pleins de choses qu'elles ne disent pas à leurs proches mais qu'elles partagent dans les vestiaires. Elles étaient enfermées dans leur cocon familial, à la maison en train de tourner en rond." Alors, les conversations privées pour organiser les entraînements se sont transformées en groupes de parole. "Elles étaient enfermées. Elles se muraient encore plus, la peine a été double pour elles. Je ne m'étais pas rendu compte que cela pouvait générer autant d'angoisse, être aussi anxiogène, reconnaît Valérie Bérard. Le fait d'aller dans des hôpitaux en période Covid... c'était encore plus anxiogène. Elles ont déjà l'épée de Damoclès au-dessus de la tête."Au sein de l'association Lise, les coordinateurs mettent tout en oeuvre pour maintenir la prise en charge des soins supports, c'est-à-dire l'ensemble des accompagnements des traitements classiques, comme la nutrition, le sport et l'activité physique adaptés, le soutien psychologique, et les soins socio-esthétiques. "Les petits ateliers sont limités à 12 personnes durant le mois d'octobre, explique Bruno Cutuli. On organise des aides psychologiques, de la sophrologie, des activités physiques pendant la période de soins et après la période de soins. On va surement les dédoubler car ils sont tous pleins."