La semaine dernière, avant le confinement, c’était le rush dans les supermarchés. Du sucre, de l’huile, des pâtes, du papier toilette et des conserves. Les rayons se sont vidés à vitesse grand V. Quelques jours après, des salariés sont toujours traumatisés.
Des parkings complets, des files d'attente impressionnantes et des chariots bourrés jusqu'à rabord de riz, de pâtes, de bouteilles d’eau ou encore de papier WC … Sans parler des rayons vidés. Les images ont tourné en boucle sur les réseaux sociaux et les télévisions. Et au bout de la chaîne : les caissiers et les caissières comme Adeline. Depuis la mise en place du confinement, les choses sont rentrées plus ou moins dans l'ordre. Mais cela reste un douloureux souvenir.
Adeline a 19 ans, elle est étudiante à Reims. Et pour payer ses études, elle fait quelques heures chez Carrefour. Adeline est caissière. Non pas que ça l'enchante, "mais cela me permet d'avoir un peu d'argent tout au long de l'année, en plus de celui que me donnent mes parents tous les mois," explique-t-elle.
Franchement, j'étais loin d'imaginer qu'un jour, je vivrai un tel enfer. Je l'avoue : j'ai eu peur.
Adeline, étudiante et caissière
Cela faisait quelques jours qu'il y avait plus de monde dans les rayons. "Mais au lendemain des annonces d'Emmanuel Macron, c'était la folie," se souvient-elle. Dès l'ouverture, les clients se sont précipités. Certains étaient là depuis tôt le matin. "J'arrive toujours bien avant l'ouverture, et déjà on se doutait qu'on allait vivre une journée particulière ..."
Une semaine après, toujours le traumatisme
Les chariots se remplissaient à vue d'oeil. Du sucre, de l’huile, des pâtes, du riz, du papier toilette et des conserves. "Les clients se bousculaient dans les allées. Certains poussaient leur charriot quasiment en courant. Mécaniquement. Comme s'ils ne contrôlaient plus ce qu'ils faisaient," ajoute Adeline. Des scènes irrationnelles. "Et moi, j'étais assise derrière ma caisse. J'observais et je savais que cette marée humaine allait bientôt arriver jusqu'à nos caisses." De l'angoisse et de l'appréhension. La file d'attente commence à se former. "Les clients posent sur le tapis roulant leurs aliments avec plus ou moins de délicatesse." Toujours les mêmes produits. Avec des montagnes de papier toilette. "Cela m'a marquée. Je trouvais cela tellement hallucinant."Et le rythme s'est accéléré. Les gens balançaient leurs achats, je scannais à une telle vitesse avec la pression des clients derrière !
Adeline, caissière
Plusieurs heures pendant lesquelles les caissiers se concentrent au maximum. "J'ai fini lessivée", raconte Adeline. Les clients n'avaient qu'un seul mot à la bouche : Coronavirus. "Ils ne parlaient que de ça. Je les écoutais, j'essayais d'avoir de l'empathie, de trouver un mot pour chacun. Tout en pensant à ma santé. Mais l'angoisse commençait à changer de camp. Tous ces gens face à moi, ces dizaines et ces dizaines de clients qui ont touché les paquets de pâtes et que moi, je scannais à la chaîne sans aucune protection ..." Adeline raconte sans relâche ce qu'elle a vécu, la vitesse de ses phrases s'accélère. Presque un sprint. Et elle termine : "Oui, c'était traumatisant."