Coronavirus : un chevreuil en centre-ville, des colverts dans la rue, comment la nature reprend ses droits

Sur les réseaux sociaux, les vidéos d’animaux surpris en pleine rues surprennent les internautes. Un chevreuil aperçu courant sur la route en pleine ville de Reims, des canards qui osent s’aventurer sur les trottoirs. Le confinement des humains a-t-il du bon pour les animaux ? 

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Le silence. C’est bien ce qui nous a tous frappés dès les premières minutes du confinement mis en place par le gouvernement le 17 mars dernier. Au bruit des voitures, des enfants dans les cours de récréation, des bus, se sont substitués le chant des oiseaux, le bruit du vent et le calme des rues désormais vides de ses habitants. On entendrait presque les mouches voler...
 


A Reims, un chevreuil en pleine rue 

Cela fait maintenant 21 jours que notre espace se limite à notre intérieur. Vingt et un jour durant lesquels tous les animaux qui peuplent non seulement les campagnes, mais aussi les villes ne sont plus vraiment dérangés par la présence de l’Homme. Et à mesure que les jours passent, certains d’entre eux, contrairement à nous, sortent le bout de leur nez. Le 5 avril, un chevreuil a même été surpris par une habitante en pleine rue de Reims (à moins que ce ne soit le contraire ?)  avant de prendre la fuite en courant sur le bitume. De toute manière, il n’y avait aucune voiture…
 



Moins de pollution...sonore

La disparition des voitures dans nos rues entraîne moins de pollution dans l’atmosphère, mais aussi moins de pollution… sonore ! Et ce qu’il nous est désormais donné d’entendre, si l’on sait tendre l’oreille, c’est bien tout simplement le chant des oiseaux.
 
« En temps normal, les oiseaux tentent de couvrir les bruits de la ville avec leur chant. Désormais, il y a moins de bruit donc leur chant va mieux fonctionner et ils attireront plus facilement les femelles » nous explique Christophe Hervé, directeur la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) en Champagne-Ardenne. Un bon point pour la nature. Le silence facilite la reproduction des oiseaux.

« Ce qui est bénéfique, c’est qu’étant donné qu’il n’y a personne pour les déranger, ils n’ont pas peur. Alors, ils n’abandonneront pas leur construction » ajoute-t-il. Car le printemps, c’est la saison des amours et nombreux sont les petits oiseaux encore à naître dans des nids fraîchement construits.

Les oiseaux chantent, c’est immuable. Nous y faisons simplement plus attention. 
- Christophe Hervé, directeur la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) en Champagne-Ardenne.


Mais alors, la nature reprend-elle vraiment ses droits ? « C’est plus un changement de perception de notre part : il n’y a pas de raison pour que les oiseaux chantent plus » explique Aurélien Deschartres, chargé de mission depuis 15 ans pour la LPO. « On a l’impression que les oiseaux font plus de bruit, mais c’est un peu biaisé : vu que l’activité a diminué, il y a juste moins de bruits parasites et notamment en ville. Je dirais que les gens ont appris à écouter. Les oiseaux chantent, c’est immuable. Nous y faisons simplement plus attention», conclut-il.
 

L’habituation

Mais il n’y a pas que des avantages à cette diminution de l’activité humaine dans les villes. Cela peut même avoir un effet pervers : « si d’un seul coup, vous relâchez tout le monde dans les rues, tout le bien acquis peut être réduit à néant » explique Jérémy Miroir, naturaliste basé à Vitry-le-François. Il mène depuis plusieurs années des études sur les populations d’animaux et d’insectes dans la région

Attention, cela n’a rien d’extraordinaire à ce qu’un canard colvert traverse la rue en pleine journée.
- Jérémy Miroir, naturaliste à Vitry-le-François


Et il nous prévient : « Attention, cela n’a rien d’extraordinaire à ce qu’un canard colvert traverse la rue en pleine journée », avant d’expliquer : « les animaux s’habituent à la dangerosité de leur environnement et ils développent des stratégies pour éviter les dangers ».
 
C’est ce qu’on appelle l’habituation. « Le hasard fait que le confinement tombe au moment de la reproduction des animaux et c’est vrai que certaines espèces peuvent profiter des endroits qui sont devenus calmes pour nicher et en fonction de la date du déconfinement, certaines espèces se retrouveraient dans un endroit qui deviendrait dérangeant. Ça peut avoir un effet positif comme négatif», constate Aurélien Deschartres.

Voilà donc un paradoxe : le danger serait que les animaux n’aient plus à rien à craindre ! « S’il y a des couvées ou des portées qui sont présentes, les petits vont s’habituer à cet environnement et ils n’auront, par exemple, pas l’habitude d’éviter le trafic routier le jour où il reprendra » étaye Jérémy Miroir.

Il faudrait en fait que le confinement dure bien plus longtemps pour assister à une réelle réappropriation des villes par la nature. « Il va y avoir des effets directs : peut-être moins de hérissons ou de blaireaux écrasés le long des routes mais l’Homme a tellement façonné la nature qu’aujourd’hui les animaux vivent dans des habitats de substitution. Ils se sont adaptés à notre présence et parfois même, ils en dépendent désormais » nuance Jérémy Miroir. 
  

Des espèces en danger

Car les humains jouent aujourd’hui parfois un rôle dans la préservation des espèces. Et avec le confinement, les bénévoles de la LPO ne sont désormais plus en mesure d’assurer certaines missions de surveillance des populations d’oiseaux directement menacées par l’activité humaine.

Si on voulait bien faire, il faudrait sortir et repérer les nids maintenant, mais avec le confinement, on ne peut pas.
Aurélien Deschartres, chargé de mission depuis 15 ans pour la LPO


Les moissons approchent et certaines espèces de rapaces font leur nid sur le sol, en plein coeur des champs de blés. Chaque année, la Ligue de Protection des Oiseaux mène des campagnes de sensibilisation auprès des agriculteurs. « Si on voulait bien faire, il faudrait sortir et repérer les nids maintenant, s’attriste Aurélien Deschartres, mais avec le confinement on ne peut pas ».

« Il risque d’y avoir un surcroît de mortalité mais les agriculteurs sont au courant de cette problématique, donc certains nids vont quand même être épargnés », se rassure ce dernier. « C’est frustrant parce qu’on sait qu’il y a quand même des oiseaux qui vont passer dans les moissonneuses et nos bénévoles le vivent mal», déplore quand même le directeur de la LPO en Champagne-Ardenne.
 

« Confinés mais aux aguets »

Même depuis chez soi, confiné, il existe un moyen de se rendre utile pour la nature : « Confinés, mais aux aguets ». C’est le nom d’un défi lancé par la Ligue de Protection des Oiseaux. Elle invite ceux qui ont la chance d’avoir un jardin à compter chaque jour pendant 10 minutes tous les oiseaux. Attention : seuls ceux qui sont posés. Les données ainsi récoltées à la fin du confinement permettront d’inventorier les espèces en France.
  Les espèces qui fréquentent les jardins le plus abondement en cette période, selon la LPO, sont le moineau domestique, la mésange charbonnière, le pinson des arbres, la mésange bleue et le merle noir. Le confinement laisse aussi le temps de faire connaissance avec eux. 
 
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