Alors que les rassemblements sont interdits pour contenir la propagation du covid-19, les autorités religieuses ont revu leurs pratiques cultuelles afin de célébrer autant que possible tout au long du mois d'avril à la fois Pâques, le Ramadan et Pessa'h.
Un vrai casse-tête... Conséquences de l'interdiction des rassemblements de plus de 1.000 personnes depuis le 8 mars, les églises, mosquées et synagogues elles aussi ont fermé leurs portes. Un confinement, comme partout ailleurs, afin d'éviter toute contamination parmi les fidèles comme ce fut le cas en Alsace lors d'un rassemblement évangéliste.
Des fermetures qui tombent au mauvais moment pour les trois grandes religions monothéistes, alors qu'avril marquera le début des fêtes de Pâques pour les chrétiens, ainsi que la Pâques juive et le coup d'envoi du Ramadan pour les musulmans.
A Reims, les 4.000 fidèles de la grande mosquée ne peuvent donc plus assister aux prêches du vendredi. Désormais, l'ordre est aux prières à la maison, en famille : un moment propice à l'introspection pour Mohamed Bouzaggou, le président de la grande mosquée, pour qui le maintient du lien avec les fidèles pendant le confinement est une priorité. "Grâce aux réseaux sociaux, on a mis en place non des prêches mais des rappels, des discours de notre imam diffusés en direct sur notre page facebook tous les vendredi à 13 heures, explique t-il. En cette période, les réseaux sociaux nous sont d'une aide précieuse : vendredi dernier, près de 800 personnes étaient connectés."
Bien avant les interdictions de rassemblements, le président de la mosquée, par ailleurs docteur en sciences, conscient du danger, avait mis en place plusieurs mesures préventives.
" En islam, les prosternations se font directement sur le tapis, ce qui est source de propagation du virus. On a donc recommandé aux fidèles d'apporter leurs propres tapis... On a aussi incité à ne plus se serrer la main, ce qui est difficile pour nous alors que notre communauté est très tactile... Ce qui est sûr, c'est que, pour le scientifique que je suis, le gouvernement a été trop observateur de la situation : j'aurais été plus restrictif et plus précoce dans les mesures de confinement..."
Cette année, le mois du Ramadan débutera le 23 avril, une date en théorie où le confinement sera levé. Mais Mohamed Bouzaggou en a conscience, une prolongation de celui-ci est possible, sinon probable. "Si le confinement n'est pas levé, on travaille sur une formule où les étudiants et les nécéssiteux, comme c'est la tradition, pourront venir se nourrir le soir pour la rupture du jeûne, mais via des plats à emporter..."
Quoiqu'il en soit, Mohamed Bouzaggou l'assure : le covid-19 ne peut nullement être interprété comme un châtiment divin. "C'est une épreuve pour tout le monde... Une crise sanitaire dénuée de tout sens religieux..."
"On attend des jours meilleurs"
La fête de la Pâque juive ou Pessa'h dure huit jours, et se déroule cette année du 8 avril au 16 avril. Le Seder, le repas rituel, retrace l'Exode des Hébreux, libérés de l'esclavage par Moïse, de l'Egypte à la Terre promise. Cette fête est essentielle pour les juifs. Elle célèbre la fin de l'asservissement, la liberté et donne traditionnellement lieu à des rituels et à des fêtes de famille. Cette année, les fêtes religieuses doivent se dérouler sans rassemblement et la soirée du repas rituel est limitée à la cellule familiale au sens le plus strict.Compte-tenu de la situation, toutes les familles célèbreront la fête chez elle, en comité restreint. Tous les rassemblements sont interdits, c'est comme ça. On attend des jours meilleurs.
- Juliane Unterberger, présidente de l'association culturelle et sociale israélite
Jacques Cohen, professeur de médecine, estime que ces interdictions doivent être respectées."J'ai annulé les repas de famille. Habituellement, je vais chez ma mère où tout le monde se réunit, ou chez des amis, que je vois assez rarement. Mais cette fois rien, je ne sortirai pas. Ma soeur voulait que l'on s'organise pour les courses, pour préparer le Seder et j'ai dit non."
La communautée juive est par ailleurs très divisée sur l'utilisation d'applications et notamment de systèmes de viso-conférences puisque la loi juive proscrit l'usage de l'électricité pendant les fêtes.
#Pessah - Le Président du Crif @FrancisKalifat a un message pour vous... #RestezChezVous https://t.co/2zTt9szMdd
— CRIF (@Le_CRIF) April 7, 2020
Les médias du réseau catholique mobilisés
Pour Eric de Moulins-Beaufort, archevêque du diocèse de Reims et président de la Conférence des évêques de France: "Pâques est une fête essentielle pour les chrétiens. Le Christ ressuscite, sort vainqueur de la mort, et nous appelle tous à la vie éternelle. Compte-tenu de l'épidémie, pour la première fois, Pâques ne donnera pas lieu à des rassemblements. Il n'y aura pas non plus de baptêmes d'adultes. Ils seront reportés."
Toutefois, les responsables se sont organisés pour accompagner les fidèles durant toute la Semaine Sainte. Les différents médias du réseau catholique, la chaîne de télévision KTO, la radio RCF et sa chaîne YouTube ainsi que celle de la maison diocésaine Saint-Sixte sont mobilisés et relaient des temps de méditation et de prière.
"Pour Pâques, le message de l'Archevêque est diffusé en direct samedi soir à 22h45, repris le jour de Pâques à 8h . De son côté, le réseau RCF diffuse l'Office de la Cène jeudi soir à 18h et la messe du Pape le jour de Pâques à 11h. En région, une méditation oecuménique de la croix sera célébrée avec le Pasteur Langlois de l'Eglise Protestante Unie et Mgr de Moulins-Beaufort vendredi à 19h15. La messe du dimanche de Pâques est célébrée à 9h par Mgr Feillet.
Sous forme de point d'orgue, la messe de Pâques, dimanche à Paris, sera présidée par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, en direct sur France 2, à 11h , dans le cadre de l'émission du Jour du Seigneur
- Jean-Pierre Benoit, directeur de la radio RCF Reims-Ardennes
Avec la crise sanitaire et les mesures de confinement, les fidèles, qu'ils soient juifs, musulmans ou chrétiens, devront renoncer en partie à leurs célébrations traditionnelles. Mais les technologies audiovisuelles et numériques devraient leur permettre de communier et de se rassembler de manière virtuelle.