Dispositif unique dans la France entière, le Vacci'bus a commencé une tournée de 48 villages du Grand Reims (Marne), ce mardi 19 janvier. Il permet aux personnes âgées de plus de 75 ans de pouvoir bénéficier du vaccin contre le coronavirus (Covid-19) sans avoir à trop se déplacer.
Pour l'instant, on ne le trouve que dans le Grand Reims (Marne), mais le Vacci'Bus devrait inspirer bien des collectivités. La première tournée a démarré ce mardi 19 janvier 2021, à 9 heures, et constitue un moyen original et pratique pour lutter contre le coronavirus (Covid-19).
Le concept est simple : transformer un bus du réseau Citura (les transports de l'agglomération rémoise) en laboratoire de vaccination mobile. Le véhicule fait alors le tour de 48 villages (voir carte ci-dessous) pour y vacciner la population âgée de plus de 75 ans, sans qu'elle n'ait à se déplacer.
On commence à Aubérive
Rendez-vous est donné dans la commune d'Aubérive (Marne), la première d'une tournée qui doit durer jusqu'à la fin du mois de janvier. Avant de recommencer le 16 février, pour l'administration de la seconde dose. La communauté urbaine du Grand Reims est à la manoeuvre : sa présidente, Catherine Vautrin, a fait le déplacement pour l'occasion.
Premier constat à l'arrivée : il pleut. Mais ça n'empêchera pas le vaccin des sept personnes âgées ayant pris rendez-vous. Une salle commune, adjacente à la mairie (rue de l'Espérance), a été ouverte pour abriter tout le monde. C'est à dire les personnes âgées, leur famille, l'équipe municipale, mais aussi les politiques du Grand Reims et une ribambelle de journalistes (TF1, France 2, France 3 Champagne-Ardenne, L'Union, Champagne FM...).
En effet, le bus ne s'arrête pas sur le pas de la porte des personnes à vacciner, mais dans le centre du village. Celui-ci étant petit, elles peuvent facilement et rapidement s'y rendre, quitte à être véhiculées par un élu ou une élue de la commune si nécessaire. Ici, c'est David Carry, le premier adjoint au maire, qui s'en charge. À l'intérieur, des chaises, du café et les petits gâteaux confectionnés par une certaine Nadine permettent de passer le temps.
Et il n'y a pas tant de temps que ça à attendre : toute la procédure ne prend qu'une demi-heure, temps de repos inclus. Il y a assez de place et de temps pour faire passer les patientes et patients à la chaîne. Nous suivons Josiane Noizet et ses 88 printemps...
Josiane a refusé le café et les gâteaux : elle n'est pas là pour traîner. Elle est invitée à sortir, et descend les marches de l'édifice au bras de l'adjoint David Carry, qui l'a accueillie personnellement avant de la saluer (il connaît tout le monde, village de 245 âmes oblige). Elle est promptement conduite à l'entrée du bus, et disparaît derrière un rideau bleu foncé pour un peu plus d'intimité (du moins, il y en aurait sans les journalistes).
Josiane s'installe alors devant le capitaine Jacques Lorentz, médecin réserviste chez le service départemental d'incendie et de secours (Sdis) de la Marne. Elle lui présente sa carte vitale, et répond à quelques questions.
- Vous n'avez pas de fièvre ?
- Vous n'avez pas eu le covid ?
- Vous n'avez pas été déclarée cas-contact ?
- Vous n'avez été vaccinée contre la grippe ? On ne doit pas vacciner trop près...
- Vous n'avez pas d'allergies ?
- Vous n'avez pas de traitement pour fluidifier le sang ?
Tout le monde se lève alors, le médecin soulève la manche de Josiane, et l'infirmière s'approche avec la seringue... Un instant plus tard, le pire est passé. Josiane est officiellement l'une des premières habitantes de son village à avoir reçu la dose du vaccin contre le coronavirus.
Josiane n'a alors plus qu'à... se détendre. Sur l'un des sièges au fond du bus, derrière un autre rideau. Elle peut y discuter avec la dame l'ayant précédée... et donner son avis sur l'acte qu'elle vient d'accomplir.
"On espère que ça va changer beaucoup de choses, le vaccin. Tout le monde va être un petit peu plus sécurisé. J'avais des inquiétudes, car j'ai des enfants, des petits-enfants... J'ai pensé à eux avant tout en me faisant vacciner : pour les protéger. J'apprécie ce bus qui se déplace pour la vaccination : c'est très bien organisé et on est très bien reçu."
Et derrière Josiane, une autre dame arrive déjà... Les vaccinations suivent leur cours, et après 20 minutes, l'octogénaire peut rentrer chez elle. En toute sérénité.
Dans la salle communale, qui se vide peu à peu, l'ambiance est enjouée. Et il n'y a presque plus de gâteaux. David Carry raconte la vaccination du dernier senior passé sous l'aiguille de l'infirmière. "Ça s'est bien passé, pour monsieur Lorin... Tellement bien qu'il n'a pas senti qu'on le vaccinait." On discute aussi du manque de doses, qui a fait râler plusieurs maires.
De son côté, Catherine Vautrin peine à faire asseoir un monsieur qui doit se reposer après la piqûre. "Je ne suis peut-être pas médecin, mais j'insiste, asseyez-vous. C'est important." À côté d'elle, David Carry est satisfait de cette matinée. "C'était très, très bien. Tous nos anciens sont très satisfaits. On a eu une super équipe soignante, c'était parfait." Et le voilà qui fait à nouveau taxi, cette fois pour ramener l'intrépide monsieur Lorin chez lui.
Prochaine étape : le village de Vaudesincourt, peuplé de 96 âmes, selon le recensement de 2018.
On poursuit à Vaudesincourt
Ici, c'est la première adjointe Christel Cotret qui fait l'accueil et sert des madeleines dans la petite mairie. Le couple Baudry, composé de Nadine (80 ans) et Bernard (88 ans) est déjà là. Il leur aurait été difficile d'arriver en retard : la maison se trouve juste derrière la mairie.
Le couple, venu se faire vacciner à deux, devra encore patienter un peu. Il reste quelques préparatifs à effectuer dans le Vacci'Bus.
Les doses sont maintenant prêtes : le couple Baudry est appelé. Il fait sa sortie de la mairie. Bernard marche d'un pas vif, faisant claquer sa canne sur le gravier. Catherine Vautrin l'encourage. Nadine paraît ravie. "On est bien contents d'être les premiers de la commune à se faire vacciner. Comme ça, on va pouvoir revoir nos petits-enfants. On en a besoin. Et on pourra sortir plus. Ce bus facilite les choses : je conduis encore, mais plus beaucoup."
Bernard est le premier à grimper. Il refuse de s'asseoir tant qu'il ne s'est pas désinfecté les mains au gel hydroalcoolique.
C'est son épouse qui donne les cartes vitales au docteur. Et qui vérifie que son masque est bien placé...
Après le questionnaire d'usage, l'aiguille est dégainée. Bernard se montre très volontaire, même si il confiera plus tard avoir peur du sang.
Pendant que sa compagne prend place à son tour, Bernard part au fond du bus, mais refuse de s'asseoir. "Sinon, je ne vais pas réussir à me relever." Et il se déclare ravi qu'une jeune infirmière soit à l'origine de la piqûre. "C'est pour ça que je n'ai rien senti, elle ne tremblait pas." L'intéressée rit de bon coeur. Et on entend un commentaire grivois d'un des journalistes : "je vous rappelle que votre épouse est juste derrière"...
Et voilà : Nadine est vaccinée à son tour. Elle s'en réjouit. "Je suis soulagée. Et contente." Elle remercie chaleureusement les pompiers.
Pendant ce temps, son mari... a filé. Sans attendre les vingt minutes règlementaires. La soupe était prête chez lui, et apparemment, il n'a pas pu patienter.
Finalement, quelques instants plus tard, les deux Baudry sont ensemble, dans leur salle à manger. Sur la table, un jeu de l'oie d'ancienne facture. Au mur, d'anciennes photographies de famille en noir et blanc. Derrière les vitres du buffet, plein de photographies de leurs petits-enfants, qui vont enfin pouvoir revenir chez papy et mamie.
Bernard se saisit de son agenda pour nous le montrer. Il a scrupuleusement noté la date où il recevra la deuxième dose de son vaccin. "Ce sera Mardi gras. Il ne faudra pas qu'on oublie de nous donner des petits gâteaux." C'est qu'il serait presque impatient d'être piqué à nouveau...
Une quarantaine de personnes aura été vaccinée au cours de cette journée.