La troupe « Question d’Époque » a joué, ce jeudi 28 novembre, trois saynètes sur le thème de la santé féminine au Cellier à Reims. Spectateurs et spectatrices étaient encouragés à intervenir sur scène. Un temps d’échanges libre, loin des stéréotypes.
La salle du Cellier est comble. Le public (majoritairement féminin) rit. Sur scène, deux comédiennes, l’une joue la mère et l’autre la fille. La mère parle, très gênée, de l’anatomie et des règles en employant les termes de "petit tuyau à l'intérieur" ou de "petite graine". « Stop ! » Cindy, spectatrice, interrompt la discussion. "Ça ne va pas du tout." Elle monte sur scène et improvise une tata bienveillante qui utilise les mots adéquats. C’est le principe du théâtre forum.
Le public est invité à participer ou à réagir depuis sa place sur ce qu’il voit et entend. "J’ai adoré, sourit Cindy également travailleuse sociale à l’association les Francas. Ça permet d’aborder la chose avec beaucoup de légèreté. Il est tant de changer les mentalités et de parler ouvertement de consentement, de règles." La troupe "Question d’Époque" traite de nombreux thèmes de société via cette forme théâtrale. "On écrit avec des nœuds dramatiques mais on est incapable d’imaginer ce qui va être repris, à quel moment et par qui, explique Florian Sevin, metteur en scène. On est souvent agréablement surpris."
Des gens qui ne se connaissaient pas il y a 20 minutes commencent à parler sexualité et consentement.
Florian Sevin, metteur en scène
Deuxième saynète : une femme n’ayant jamais vu de gynécologue se plaint de règles douloureuses. Deux autres personnages insistent lourdement pour qu’elle aille consulter, mais cette dernière, mal à l’aise, s’en va. Qu’aurait-il fallu faire pour l’aider ? Le débat dans la salle rémoise est lancé. Quelqu’un lance : "Chaque femme est différente, chaque cycle aussi". Puis une autre : "Ce n’est pas normal d’avoir mal pendant les règles" et "il n’y a pas que l’endométriose." Cindy intervient de nouveau sur scène et essaie de trouver les mots justes.
Préventions entre chaque saynète
En l’espace de deux heures, les spectateurs ont échangé sans tabou sur la sexualité, le consentement, la contraception, les maladies et le soutien moral. "Être moralisateur ou dans le jugement n’aide personne, " ajoute une infirmière du CeGIDD, le centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic du CHU de Reims. Des professionnels de santé sont également présents dans la salle. Ils apportent des détails, complètent les diverses interventions et font connaître leurs structures (le centre de santé sexuelle, le planning familial).
"Ça permet aux femmes de trouver des personnes-ressources quand elles ont des soucis de santé. Dans nos consultations, on entend encore plein d'idées reçues sur les règles et la sexualité ", assure le docteur Odile Maurice du service gynécologie du CHU. Cette sensibilisation s'inscrit dans une journée dédiée à la santé et au bien-être des femmes organisées depuis 2022 par la ville de Reims et la direction des solidarités. Dans le public, 100 femmes en situation de précarité ont été invitées. Apprendre à prendre soin de son corps et devenir actrice de sa propre santé est primordial selon les organisateurs. Une trentaine a poursuivi avec un repas et des ateliers yoga du rire, sophrologie et massages des mains.