Punaises de lit : l’enfer d’une famille rémoise, qui a tout perdu, « je dois jeter tous mes meubles et tout mon linge »

Depuis le mois d’août, une Rémoise vit une situation infernale : son logement est infesté de punaises de lit. Isolement, antidépresseurs, inquiétude… elle n’est pas la seule à subir ce fléau. Chaque année, 70.000 Français assurent consulter un médecin des suites d'une infestation.

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« C’est un fléau, on est traumatisés. » Peggy Annequin ne sait plus quoi faire. Ce mardi 27 octobre, quand elle se rend à l’agence de son bailleur social, elle est à bout. Voilà un mois qu’elle les a prévenus que des punaises de lit ont envahi sa maison et qu’elle et ses quatre enfants ne peuvent plus y retourner. « Je m’endormais la peur au ventre, serrant ma fille de deux ans et demi dans les bras », dit-elle, les larmes aux yeux.

En juillet dernier, la Marnaise et ses quatre enfants ont emménagé dans une maison du quartier des Verreries à Reims. Vide depuis septembre 2019, la maison a été entièrement rénovée par le bailleur social, le Foyer Rémois, durant sept mois. A l’arrivée de la famille Annequin, aucune trace des nuisibles. Ce n’est qu’à la fin du mois d’août que les premières démangeaisons se font sentir. « On a d’abord pensé à des moustiques, puis je me suis renseignée », se souvient Peggy Annequin. Elle retourne les matelas de toutes les pièces. Le diagnostic est implacable : tous sont infestés de punaises de lit.
 

Impossible de se débarrasser des nuisibles

Fin septembre, une fois prévenu, le bailleur envoie une entreprise spécialisée. Avant son passage, la société demande à la mère de famille d’appliquer un protocole strict : linges et tissus doivent être enfermés dans des sacs poubelles et être tenus à distance des matelas. Elle sort également dans la cour de sa maison les lits, draps et matelas, ainsi que son canapé. Malgré les mesures qu’elle s’empresse d’appliquer à la lettre et un premier passage des professionnels, les insectes sont toujours là. Incompréhension. Finalement, l'entreprise et la famille découvrent l’horreur : les punaises ne sont pas seulement présentes dans les tissus. Elles se logent derrière les plinthes, sous le lino tout juste posé et dans les canalisations. L'infestation est donc antérieure à l’arrivée de la famille. Le Foyer Rémois les reloge provisoirement dans un hôtel du centre-ville.

Un mois plus tard, en ce mardi pluvieux, Lindsey, Nandsy, Rayyan et Alliyah patientent sur l'un des lits de l’appartement-hôtel. Même s’ils ont peu d’intimité, ils se sentent enfin en sécurité. « En arrivant, on a eu qu’une envie : sauter sur nos lits ! », s’enthousiasme la mère. « Enfin, on a d’abord vérifié les matelas, corrige l’aînée. Une psychose s’est installée. » Tous les matins, les membres de la famille inspectent les matelas,  le sol, leurs vêtements, pour s’assurer qu’ils n’ont ramené aucune bestiole. « C’est dur, lâche Rayyan, 14 ans, en se grattant la tête. On a perdu toutes nos affaires, nos lits, nos meubles… j’étais bien, moi dans ma chambre. »


Un problème de santé publique

« C’est un véritable problème de santé publique. La punaise de lit est un désastre pour la santé mentale, avec des troubles du sommeil, de l’anxiété, des syndromes post-traumatiques liés à la désinfection, un isolement social », indiquait la députée LREM de Marseille Cathy-Racon-Buzon au quotidien gratuit 20 minutes. L’auteure d’un rapport sur les punaises de lit, qu’elle a remis au gouvernement en septembre dernier, revendique que le problème soit mieux en pris en charge par la collectivité. Comme Peggy et ses enfants, environ 70.000 personnes consultent un médecin des suites d’une invasion de ces ectoparasites, très résistants aux traitements et à la vitesse de reproduction record. Il faut généralement plusieurs mois pour venir à bout de ces insectes minuscules, friands de présence humaine et de chaleur.

Dans le rapport, la députée fait état de « la triple galère de l’infestation : matérielle, économique et psychique ». Des mots qui collent parfaitement au quotidien de Peggy Annequin et ses enfants : « Je suis sous anxiolytiques depuis un mois. A 42 ans, je n’en avais jamais pris de ma vie ! Mon médecin m’a mise en arrêt, je suis auxiliaire de vie et en pleine pandémie, je ne peux même pas aider mon équipe », se désole Peggy. Ça, c’est pour la galère psychologique. Côté matériel, la quadragénaire a dû investir dans un appareil nettoyant à vapeur, sans compter tous les meubles et les habits qu’elle doit jeter. Financièrement, à cause de son arrêt maladie de longue durée, elle estime perdre environ 1.000 euros mensuels.
 
Derrière elle, Nandsy, 19 ans, craint pour ses études. Impossible dans ces conditions de travailler convenablement. « Je me gratte tout le temps. Je dois faire un exposé pour mon BTS, mais je ne peux pas travailler. Je dirais que j’ai eu un ‘empêchement’ familial », réfléchit tout haut l’étudiante. Encore une conséquence de cette invasion : l’isolement et la honte. La jeune femme a peur que ses professeurs la jugent, pensent qu’elle vit dans la saleté. « On n’ose pas aller chez nos amis, de peur de leur ramener des punaises chez eux », ajoute Lindsey, 22 ans. « J’ai même bloqué certains contacts sur les réseaux sociaux, pour qu’ils ne soient pas au courant », abonde Peggy. Les larmes remontent. « Quand on l’a annoncé à certains amis, qui ne comprenaient pas pourquoi on esquivait toutes leurs invitations, ils nous ont beaucoup soutenus, confie-t-elle, la voix chevrotante. Ça fait du bien, vraiment du bien. »

La famille Annequin craint un nouveau reconfinement. « Au moins, pendant la journée, on laisse Nandsy travailler en allant faire des tours à droite à gauche. » Le Foyer Rémois a proposé des solutions d’hébergement à Peggy et de l’aider financièrement pour les meubles qu’elle a perdus à cause des punaises.
 
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