Reims : un bailleur social expérimente un projet de construction de cinq maisons en béton réalisées en impression 3D

Implanté au cœur de l’écoquartier Rema'vert à Reims, sur une parcelle de 1000 m2, cinq maisons de plain-pied, réalisées en impression 3D et éléments préfabriqués verront le jour en 2022. Un projet précurseur porté par le bailleur social Plurial Novilia.

Le bailleur social Plurial Novilia réalise le premier éco-quartier de Reims. Un projet expérimental, baptisé "Viliaprint", mixant impression 3D en béton et éléments préfabriqués. C'est la première fois que des maisons imprimées vont sortir de terre ou plutôt se poser sur terre. Comme des legos géants, les éléments muraux de la maison seront assemblés les uns aux autres. Une révolution dans la construction et une première en France.

"On est libéré de la notion de coffrage et avec l'impression 3 D, on peut imaginer toutes les formes de murs des parties courbes et elliptiques", affirme Jérome Florentin, directeur de la maîtrise d'ouvrage. C'est dans l'entrepôt de la start-up XtreeE, à Rungis, dans le Val-de-Marne, qu'est abrité un robot capable "d'imprimer" des façades et des cloisons avec une précision millimétrique, en superposant des couches de béton. La machine est impressionnante avec son bras robotique de sept mètres qui excerce un ballet aérien des plus précis.

 
 


Arrivés des premiers blocs en 3 D

Le chantier en est à ses débuts. Une journée test a eu lieu, en août 2020, pour poser deux murs réalisés en impression 3D et livrés sur place à Reims. Parti de Rungis, où est imprimé le béton 3D par la start up  XtreeE spécialisée dans la construction 3D, le convoi exceptionnel a pu décharger deux murs totalement fabriqués. Une expérience inédite pour la construction d'une habitation. Pour le bailleur, ces technologies permettent de faire des économies de temps, mais aussi d'offrir aux ouvriers des chantiers plus sécurisés. Arrivés sur le site des travaux , les deux murs prototypes de Viliaprint ont fait l’objet de manutention, levage, pose et liaisonnage des modules en conditions quasi-réelles. 


La journée "test" s'est très bien déroulée et a satisfait l'ensemble des partenaires du projet. Depuis, la réponse du CSBT  (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) est attendue pour pouvoir poursuivre le chantier dans son intégralité. Un an pour réaliser ces cinq maisons, dites "hors- sols", au lieu de 18 mois, pour un chantier réalisé sur place avec des matériaux moins innovants. Le chantier prévisionnel irait de début 2021 à fin 2021. Le projet Viliaprint fait passer du stade expérimental, à un stade pleinement opérationnel et reproductible, la construction complète d'un logement en intégrant la technologie de l'impression en 3D. Ce projet est révolutionnaire, précise Jérome Florentin, directeur de la maîtrise d'ouvrage, chez Plurial Novilia.

Plusieurs partenaires participent à la réalisation de ce projet ambitieux. " Nous travaillons avec l’Agence Coste Architectures , la star up  XtreeE qui maîtrise la technologie 3D, le fournisseur de béton haute performance du groupe cimentier Vicat, une entreprise locale de travaux de construction Demathieu Bard Construction et enfin le maître d'ouvrage que nous sommes", cite Jérôme Florentin.


Un cadre respectueux de l'environnement 

Situé au cœur de l’écoquartier Rema’Vert à Reims, sur une parcelle de 1000 m2, Viliaprint accueillera à l’horizon 2022, cinq maisons de plain-pied, allant du T3 au T5, et leurs cinq places de parking attenantes. Plurial Noveli, entreprise Sociale pour l’Habitat (ESH) filiale du groupe Action Logement, a à coeur de transformer et d'innover le logement social.

En juin 2019, le bailleur social a inauguré Réma’Vert, 1er éco-quartier labellisé en Champagne-Ardenne. Démarré en 2012, ce grand projet d’aménagement se veut précurseur et inventif. Parmi les projets, la construction d’un immeuble à ossature bois, la mise en service d’une chaufferie biomasse ou encore Viliaprint, un projet de logements par impression 3D. C'est pour ce projet Viliaprint que Plurial Novelli remporte plusieurs concours dont celui de l’appel à projets "Architecture de la Transformation 2018 ". Lauréat, Plurial Novilia bénéficie du soutien pendant 9 mois au sein du Lab CDC, l’incubateur de projets innovants, du groupe Caisse des Dépôts et lauréat du trophée de l’innovation du Grand-Est pour ce projet.
 

Du T3 au T5

La parcelle étant toute en longueur, l’Agence Coste Architectures s'est adapté à  l’espace en réalisant des maisons mitoyennes, reliées par une toiture végétale. Chaque locataire profite de ses espaces extérieurs grâce à un jeu de quinconce permettant de préserver l'intimité de chacun. "Nous nous sommes inspirés de deux systèmes constructifs non conventionnels et innovants pour définir les grandes lignes architecturales du projet : l’impression 3D d’une part, pour la plupart des murs des maisons, innovation puissante permettant la réalisation de lignes courbes, complétée par des modules construits hors-site pour les blocs fonctionnels des maisons d’autre part" , explique Emmanuel Coste de l’Agence Coste Architectures.

Chaque maison sera en effet composée d’élements en 3D béton et d’un module implanté au nord, comprenant la cuisine, le cellier, l’entrée, les toilettes et la salle d’eau. Ces modules réalisés "hors-site" permettront des gains de délais, de performances et de qualité. 

Ces murs 3 D composent le séjour et les chambres et seront reliés aux modules grâce à des grandes menuiseries vitrées.
À l’intérieur, les maisons sont pensées pour être fonctionnelles et lumineuses. Les cuisines avec vues sur le jardin de devant, s’ouvriront sur les séjours et leurs grandes façades vitrées. Pour autant, ajoute Jérôme Florentin, "les loyers ne seront pas plus élévés que dans nos logements classiques, car nous restons bailleur social. Notre intérêt de faire évoluer nos modes d'habitats et de les faire partager à nos locataires".

Les T 3 auront une surperficie de T3 de 76 m2 pour un loyer de moins de 600€." Ces logements s'adressent à notre clientèle monoparentale ou séniors car nos demandes de location changent et nous nous adaptons aussi à cela, quand on consrtuit de nouveaux logements " rappelle le bailleur social. Les T 4 disposent d'une superficie de 92 m2 . Enfin les T5, qui correspondent davantage à une grande famille, disposeront d'une superficie de 107 m2 pour un loyer autour des 800€.


Univers "Minecraft" 

La technologie au service de la construction. Emmanuel Coste, de l’Agence Coste Architectures , s'est réjoui dès le départ pour ce projet. La 3D, il en a fait son projet d'étude, quand en 1990, il passait son diplôme d'architecte. Pour lui, la 3 D devait faire partie des innovations en matière de constructions. Aussi, lorsqu'il a été sollicité, il a tout de suite, dit oui. " J'ai tout de suite accepté car là on est sur du concret. Il s'agit de faire vivre des personnes dans ces maisons et donc de faire des vrais habitats et non une maison témoin".

Car ces maisons sont expérimentales. Peu de pays se sont lancés dans ce type de constructions. Seuls, la Russie, la Chine, les Etats-Unis et la Hollande se sont interréssés à ces habitations en 3 D. Personne n'a encore vécu, en France, dans des maisons imprimés en 3 D et dont les éléments ont été conçus "hors-sol" selon les besoins des habitants.

Du coup, on peut imaginer tout faire selon la demande. Pour Jérôme Florentin, Directeur de la Maîtrise d’Ouvrage de Plurial Novilia , "le projet dévoilé aujourd’hui correspond parfaitement à l’ambition que nous nous sommes fixés dès le début avec Viliaprint".
 

La flexibilité ainsi obtenue en matière d’aménagement de l’espace offre la possibilité de créer des modèles originaux, adaptés aux nouveaux usages.

Jérôme Florentin, Plurial Novila



L'univers du jeu Minecraft peut donc tout à fait se comparer à ce nouveau type de construction. Ce jeu vidéo, développé par la compagnie de jeux vidéo, Mojang, qui fait fureur chez les 8- 13 ans et même plus, se rapproche de cette nouvelle façon de construire. Le jeu plonge le joueur dans un monde créé dynamiquement, composé de blocs (des cubes) représentant différents matériaux. Le joueur peut modifier ce monde à volonté en y ajoutant ou supprimant des blocs lui permettant ainsi de bâtir des constructions avec une grande liberté, rappelant ainsi les jeux de création Lego.
 

Une comparaison qui convient tout à fait à Emmanuel Coste. L'architecte, sur son ordinateur et à partir de son logiciel d'architecte, conçoit les plans de ces maisons en intégrant les blocs selon les besoins de l'habitation. Ensuite les éléments sont commandés, fabriqués et livrés sur le terrain à construire. A la question, pourrions-nous un jour de chez nous, fabriquer et commander, sa maison comme nous le faisons déjà sur des logiviels pour faire sa cuisine par exemple ? Emmanuel Coste répond : "sans aucun doute, sûrement que cela pourrait se faire".

 

Un projet à dimensions multiples 

Au-delà de l'aspect architectural, ce sont toutes les dimensions de la construction que ce projet réinterroge. L’intégration poussée de l’impression 3D permet en effet de dépasser les limites architecturales de la construction, en proposant notamment des formes arrondies ou elliptiques. Mais par encore de dôme, ni de mur en voute reconnait Emmanuel Coste, qui espère voir les performances de ce robot évoluer dans les années à venir, pour justement obtenir encore plus de formes surtout pour des édifices qui exigent une conception architecurale plus évoluée qu'une maison dite tradiionnelle.

En tout état de cause, Viliprint reste le projet qui va valoriser les atouts de l’impression 3D en phase de chantier sur plusieurs plans.
D'une part sur le  plan environnemental, ce chantier permet d'économiser des matières en privilégiant une filière sèche et des matériaux de qualité.

La construction sèche est une méthode de construction novatrice qui ne nécessite pas d’eau contrairement à la filière classique dite « humide ». Alors que la construction humide est synonyme de chantiers plus longs et plus dépensiers en termes d’énergies à cause des temps de séchage et des matériaux utilisés. Dans ce projet, les ressources mises en oeuvre dans la filière sèche sont des éco-matériaux pré-fabriqués et optimisés en usine avant de rejoindre le chantier. Cela permet d’éviter de dépendre des conditions météorologiques et ainsi de maîtriser son budget et ses délais.

Le béton n'est pas un matériau dit écologique, même la réflexion existe sur du béton "vert".  Un regret que partage également Emmanuel Coste qui se passionne pour les autres matériaux. L'idée, soumise pour d'autres projets par Jérôme Florentin, de remplacer le béton dans ce robot 3D  par des matériaux naturels comme mettre de l'argile ou de la terre, séduit l'architecte.

En attendant, avec cette technique, le chantier va utiliser deux fois moins de béton que pour un chantier classique.
Deux heures suffisent pour façonner une pièce de deux mètres de haut, avec des taux d'erreurs extrêmement faibles, le tout en réduisant jusqu'à 70% la consommation de ciment.  Qu'on se rassure, la grande majorité des matériaux utilisés dans la filière sèche sont respectueux de l’environnement et choisis pour leurs qualités.

Le bois, apprécié pour sa résistance et ses vertus isolantes, seront présents sur la charpente et la toiture de ces maisons.
Ce projet Viliaprint respecte l’exigence du cahier des charges de l’éco-quartier Rema’Vert.

Un chantier économique et moins bruyant

Tous les éléments étant pré-fabriqués et préparés au sein de l’usine de production, il ne reste ensuite plus qu’à les transporter jusqu’au chantier afin de les assembler. Cet assemblage est rapide et ne nécessite qu’une faible utilisation des machines, ce qui raccourcit la durée des chantiers et entraîne une diminution des coûts et des nuisances. La mise en œuvre modulaire de matériaux écologiques permet de diminuer le nombre de pertes et déchets et de les recycler.

Enfin, sur le plan humain, les équipes sur le chantier ressentent une réduction de la pénibilité de leur travail en extérieur et les riverains subissent une réduction des nuisances liées aux travaux très longs des chantiers de construction. Avec ce type de construction, le bailleur social entend répondre rapidement à la crise du logement dans des délais raccourcis et offrir aux futurs locataires des logements performants et innovants.
 

Les futurs locataires verront sous leurs yeux, le quartier de Cernay se transformer en habitant dans ce nouvel éco-quarier Réma'Vert.
Cette anienne friche industrielle Remafer renaît sous un nouveau jour et dans le respect de l'environnement. Pensé de façon à limiter les circulations automobiles et à faciliter les déplacements à pied, à vélo ou en bus vers le centre de la ville, ce nouveau quartier est une étape importante pour la ville. "Après des années d’études, de conception, de concertation et de travaux, Réma’Vert est en train de se dessiner sous les yeux des rémois" s'enthousiasme Jérôme Florentin.

Cet éco-quartier est l’occasion de redynamiser toute la zone de l’ancien site industriel du nord-est de Reims.
Le chantier, qui devrait s’étendre jusqu’en 2025, se veut novateur. Réma’Vert doit accueillir à terme plus de 730 logements ainsi que des commerces de proximité et des services dans un environnement urbain entièrement repensé.

 
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