Charles Grenier, 16 ans et demi, est un grand supporter du Stade de Reims mais aussi des joueuses féminines. Non-voyant, il a suivi le premier match de la coupe du monde féminine au stade Auguste Delaune ce samedi 8 juin. Le service d'audiodescription mis en place pour l'occasion l'a conquis.
C'est une soirée pleine de surprises et de belles promesses qu'a vécu Charles Grenier ce samedi 8 juin 2019 au stade Auguste Delaune.
D'abord parce qu'avec son grand-père Jean-Pierre, avec qui il forme un sacré duo de supporters, il a pu tester le service d'audiodescription au stade de Reims. Une formidable première.
D'habitude ses yeux, ce sont ceux de son grand-père qui commente pour lui chacune des actions et lui retransmet l'ambiance générale des matches. Mais hier soir, tous les deux ont pu profiter du service d'audiodescritpion mis en place pour la coupe du monde féminine de football féminin de la FIFA.
Le match rien que le match
"Je suis content. Ca s'est très bien passé. D'autant que je connaissais l'un des commentateurs, Julien Lampin, journaliste de RJR, et cela m'a rassuré. Il a été super. Il m'a fait vivre le match avec plaisir, en restant bien concentré sur les actions sans faire de bla bla", explique Charles.Ce détail n'est pas anodin pour lui. Car une personne non-voyante doit énormément se concentrer pour suivre le match via les commentaires.
"Si le commentateur donne trop de détails annexes, il peut rapidement perdre le fil", complète Séverine, sa maman.
L'audiodescription, en terme de matériel, se résume à un petit boîtier et des écouteurs individuels que l'on rapporte chez soi ensuite, hygiène oblige.
Son grand-père a lui aussi apprécié l'audiodescription: "J'en ai profité pour le tester aussi. Même si je ne suis pas non-voyant, j'ai pu juger de la qualité des commentaires. Cela m'a bien aidé pour repérer les équipes étrangères que je ne connaissais pas. Les buts étaient bien détaillés. C'est très important, car ça passe tellement vite!"
Ce service n'était pas nouveau pour eux. Ils ont déjà pu le tester dans de nombreux autres stades lorsqu'ils se sont déplacés, notamment au stade Vélodrome à Marseille et au Stade de France, à Paris, un système bien rôdé.
Charles et Jean-Pierre sont unanimes: "il faudrait que le Stade de Reims conserve ce service pour ses propres matches par la suite. Ce serait tellement utile."
Petits couacs
Dans cette soirée, il y a tout de même eu "quelques petits couacs mineurs", précise Jean-Pierre.A commencer par le parking des personnes à mobilité réduite (PMR), qui n'a pu leur être accessible et ce, bien qu'ils ont un véhicule siglé.
"Nous n'avons jamais reçu par mail le ticket de réservation pour le parking, personne n'a donc voulu nous laisser nous garer sur les places PMR du stade. Heureusement que nous sommes rémois, nous connaissons les places réservées aux personnes à mobilité réduite aux alentours. Nous sommes allés nous garer sur les emplacements devant la clinique Courlancy. Mais cela peut vite être galère".
Ils ont aussi eu un peu de mal à récupérer leurs écouteurs. "Nous ne savions pas qu'il fallait les récupérer au guichet où l'on achète les billets. Les personnes censées nous placer n'étaient pas au courant. Celle qui était avec nous est restée avec Charles pendant que je suis retourné au guichet, explique Jean-Pierre, sans aigreur, "il faut leur laisser le temps de se rôder, c'est nouveau".
Charles, supporter du Stade de Reims depuis sa plus tendre enfance, et son grand-père, président de l'association des supporters du football féminin du Stade de Reims, connaissent les lieux par coeur. Par chance, ils avaient prévu d'être en avance. Ils sont arrivés vers 18h30 et se sont installés Tribune Germain Nord peu avant 19h.
Un beau match
"3-0 pour la Norvège, c'était un beau match. On a clairement vu la domination des Norvégiennes, mais on peut souligner quelques belles actions des Nigérianes", commente Charles en expert.Pour le match qui opposera la France à la Norvège il faudra se méfier, même si la France est un ton au dessus.
- Charles, supporter Rémois non-voyant
"Nous étions neutres. Pas d'a priori ni de favoris. Mais l'ambiance était bonne. Lorsqu'une Nigériane est sortie sur un brancard, tout le monde l'a applaudie. C'est ça le football", complète Jean-Pierre.
Allez les Bleues!
Clou du spectacle, Marinette Pichon dans les gradins, venue les saluer. L'une des joueuses que Charles admire le plus. Jean-Pierre a cru l'apercevoir. Quelques minutes plus tard, quelqu'un lui tapait sur l'épaule: c'était Marinette Pichon. La star du football féminin ne rate jamais une occasion de venir faire un coucou aux deux compères. Marinette et Charles se connaissent depuis 2016. "Charles l'a rencontrée dans l'avion au retour d'un match du PSG féminin à Cardiff. Il est fan de cette équipe. Ils ont discuté tout le long du trajet jusque Paris", raconte Jean-Pierre. "On s'entend bien, cela m' a fait plaisir de la voir; elle est toujours partante pour faire des dédicaces", poursuit Charles, le sourire dans la voix.
Charles est handicapé visuel et moteur suite à une accident de circulation. Mais même en fauteuil, il se déplace accompagné de son grand-père pour aller voir de nombreux matches en France et à l'étranger. Il a déjà foulé la pelouse du stade de la Licorne à Amiens, et rencontré les joueurs de l'équipe de football de Nice, et de Bordeaux. Dans tous les stades ils sont accueillis en "VIP". "A Reims, c'est un peu plus compliqué, c'est un peu particulier", explique avec une légère amertume le grand père de Charles.
Mais avec leurs écouteurs et la même ferveur qui les anime, Charles et son grand-père iront voir les six matches de la coupe du monde féminine de la FIFA qui se joueront au stade rémois Auguste Delaune. Ils ajoutent en choeur : "Allez les Bleues!"