Le procès des quatre décrocheurs du portrait d'Emmanuel Macron à la mairie de Taissy, en mars 2020, s'est tenu au tribunal correctionnel de Reims ce mardi 16 février. Le jugement sera rendu le 16 mars prochain.
"Je suis épuisé, rincé." A l'issue d'une audience qui a duré plus de deux heures au tribunal correctionnel de Reims, Pierre B., accusé avec d'autres militants écologistes de "vol en réunion", est lessivé. Au tribunal ce mardi 16 février, lui et trois autres membres du collectif écologiste ANV Cop 21 comparaissaient pour avoir subtilisé le portrait du président de la République, Emmanuel Macron -et ceux de ses deux prédécesseurs- le 6 mars 2020 à la mairie de Taissy, une commune du Grand Reims. Des faits qu'ils reconnaissent et qu'ils revendiquent comme un acte politique : un symbole pour "dénoncer l'inaction du président Emmanuel Macron en matère climatique et sociale".
Plus d'une cinquantaine de militants @AnvCop21 @AnvReims réunis devant le palais de justice de #Reims en soutien aux décrocheurs de portrait d'Emmanuel Macron avant l'audience @France3CA pic.twitter.com/U8AHaickZP
— Florence Morel (@Flo_Morl) February 16, 2021
Comme pour Pierre B., c'est la première fois que les quatre militants mettent les pieds dans un tribunal. S'ils sont peu habitués des tribunaux, c'est parce qu'ils n'ont pas de casier judiciaire. C'est d'ailleurs le cas de la plupart des "décrocheurs", un peu plus de 150 à travers le territoire. En Alsace, deux militants ont été relaxés. A Lyon, relaxés en première instance, deux militants ont été condamnés en appel à 250 euros d'amende ferme.
Le plus difficile pour cet éducateur spécialisé, c'est "l'attente, la concentration pour écouter tout le monde, rester attentif", souffle-t-il. "Malgré l'exposition que cela provoque, je suis content, je me dis qu'on a bien fait." A ses côtés, Julie B., enseignante de tout juste 41 ans, concède également que l'exercice n'est pas simple : "C'était assez difficile pour moi, car je ne connais pas les codes du tribunal. A un moment, quand j'ai répondu au procureur que sa question n'était pas intéressante, je voulais dire qu'elle ne m'intéressait pas, mais je crois que je l'ai blessé."
"Il y a d'autres moyens"
D'ailleurs, les prévenus ne sont pas les seuls à découvrir les tribunaux. Plus familier des conférences scientifiques et d'un auditoire d'experts, Xavier Capet est venu spécialement de Paris en tant que témoin. L'océanologue, directeur de recherches au CNRS, admet que l'exercice n'est pas simple et qu'il est "intimidé".
Le maire de Taissy aussi, n'a jamais eu affaire à l'institution, ignorant même jusqu'à la définition de "partie civile". "Je ne voyais pas vraiment en quoi cela consistait. C'est un peu compliqué sur les aspects juridiques de tout connaître", justifie-t-il. Préférant ne pas prendre d'avocat pour épargner des frais à sa collectivité, il pensait "que pendant les débats, on pourrait parler du remboursement du portrait de Macron, parce que, mine de rien, c'est un vol, il ne faut pas l'oublier". Et d'ajouter : "Mon assistante était malgré tout un peu choquée de la situation, quand elle a vu sept ou huit personnes arriver comme ça, puis elle m'a appelé en panique. C'est important de défendre son personnel."
Il est important de rappeler qu'on ne peut pas faire n'importe quoi. Je comprends le mouvement, mais je pense qu'il y a d'autres moyens d'action. Ils auraient pu venir me voir tranquillement pendant ma permanence, on aurait pu faire d'autres opérations de sensibilisation mais pas en arriver à voler quelque chose.
Un point de vu qu'a souligné le procureur de la république, Pedro Texeira, lors de ses réquisitions. Pour ce vol, le procureur de la république a requis 500 euros d'amende pour trois des prévenus, ainsi que 300 euros d'amende pour Julie B., qui n'est pas poursuivie pour le vol du portrait mais pour avoir refusé "de se soumettre au prélèvement biologique de son empreinte génétique". Le jugement sera rendu le 16 mars prochain.