L'hôtel des ventes de la Porte de Mars, situé rue du Temple à Reims (Marne), organisait une journée nationale de l'expertise ce mercredi 27 janvier. Trente personnes ont pris rendez-vous pour faire expertiser leur bien, et ce gratuitement.
Les brocantes ou ventes aux enchères, démodées ? Pas du tout si l'on en croit la résistance face à la crise du coronavirus (Covid-19) des activités de l'hôtel des ventes de la Porte de Mars, à Reims (Marne).
Ce mercredi 27 janvier 2021 avait lieu la journée nationale de l'expertise, proposée par le groupe Ivoire. La salle des enchères de maîtres Collet et Guizzetti, située au 25 rue du Temple (voir sur la carte ci-dessous), est l'une des douze à faire partie de ce réseau.
Pendant toute une journée, il était donc possible de venir avec son objet pour le faire expertiser gratuitement... et découvrir s'il s'agit d'un potentiel trésor (exemple : un casque de la Grande Guerre vendu à 3.000 euros alors qu'il partait pour la décharge). D'ordinaire, l'expertise coûte 20.5% du montant de la valeur.
Ces journées de l'expertise rencontrent un grand succès. En 2020, près de 300 personnes faisaient une queue de 20 mètres devant les portes ferronnées du bel immeuble de style Art déco où se situe l'hôtel des ventes. Il est surmonté d'une mosaïque.
Mais en 2021, il a fallu s'adapter au coronavirus. La prise de rendez-vous obligatoire a fait que seules 30 personnes se sont présentées à l'hôtel des ventes. C'est à dire 10% de l'effectif de l'an passé.
Ainsi, dans le hall d'entrée, qui préfigure une véritable caverne d'Ali Baba, on trouve du gel hydroalcoolique et une boîte de masques. Le tout est posé sur un meuble ancien, sous un vitrail, et à côté de chaises de salle d'attente très contemporaines.
C'est une petite scène qui résume parfaitement bien l'alliance du moderne et de l'ancien. Tout comme le medley des époques que l'on trouve dans ce type d'établissements.
C'est derrière les portes au fond du couloir d'entrée, dans une réserve/salle d'exposition pleine de raretés, que France 3 Champagne-Ardenne a pu rencontrer Thierry Collet.
Le commissaire-priseur a trouvé quelques minutes un peu de temps entre deux de ses trente rendez-vous. "Exigeant mais passionnant", c'est une description appropriée de son métier.
"Cet événement permet de nous faire connaître. Il donne envie aux gens de franchir la porte des salles des ventes. Car pour eux, ça peut être un peu confidentiel, une vente aux enchères. Pour beaucoup de personnes, c'est réservé à une élite, pour des choses très chères."
Mais rien n'est moins faux. "C'est pour toutes les bourses", assure maître Collet. Et on peut tout lui amener, même si l'objet paraît insignifiant ou vieillot. Sans prendre de gants, et à l'aide de la loupe qui le suit partout, le commissaire-priseur va s'enquérir de la manufacture de l'objet, de son époque, de la présence d'une marque de fabrication...
"Mon oeil se chargera de la première impression. Puis je prends l'objet, je le retourne pour bien l'observer [si ça ne pèse pas trois tonnes évidemment; ndlr], et évaluer son état, son allure. Il faut que ça puisse plaire aux acquéreurs. Ce sont beaucoup d'éléments objectifs et subjectifs."
Originalité de la démarche proposée par cette maison des ventes, l'expertise peut aussi avoir lieu en ligne, à l'aide d'une photographie. "Je réponds le plus vite possible, et c'est grâcieux. Mais si l'objet est précieux, ça ne suffit pas... Et photographier, prendre le risque de changer les couleurs : ça ne va pas non plus pour un tableau."
Ce n'est pas à cause du coronavirus : l'étude propose ce service depuis plusieurs années. Mais on en comprend bien plus l'intérêt en temps de crise sanitaire et autres confinements.
Les visites et ventes, elles, ne se font plus du tout en présentiel : elles ont lieu sur Internet. Il faut aussi téléphoner pour prendre un rendez-vous afin de venir retirer un objet ou équipement acheté aux enchères. "C'est pour que les gens ne se croisent pas en venant."
Comme de juste, un couple est venu chercher un immense tapis de course ultramoderne, souvenir de la liquidation judiciaire d'un gymnase qui n'a pas survécu au covid. Cela change des fauteuils Louis XV.
Et le marché ne connaît pas trop la crise (sanitaire). "Internet nous sauve. Un restaurant, par exemple, ça ne peut pas entièrement marcher par Internet. Nous, on a pu tout dématérialiser."
Bien sûr, il n'y a pas que des avantages. "Cela manque de charme, de présence... Et on se coupe quand même d'une clientèle : les personnes âgées n'ont pas forcément d'ordinateur. Là, on sera plus tourné vers un jeune public."
Mais oui, il y a des jeunes qui s'intéressent. "Il n'y en a pas des masses, mais il y a des acheteurs. Ils ne collectionnent pas comme les personnes âgées, ils n'ont pas forcément leurs moyens... mais ça les intéresse. On observe un renouveau de la clientèle."
"Il ne faut pas hésiter à venir. C'est un monde merveilleux. Du passé, on comprend l'avenir et on en tire les leçons." Les attentes ont d'ailleurs évolué. Lors de ses études, le commissaire-priseur s'était arrêté à l'Art déco des années 20. Depuis, le vintage des années 50, 60, 70 est devenu très demandé.
On observe un renouveau de la clientèle.
Et certains jouets, même s'ils sont en plastique. "J'ai expertisé une collection avec un Goldorak, des camions... Tout était encore dans les boîtes d'origine : c'est rare." Un lot à 1.000 euros, et la preuve d'une perpétuelle évolution. "On a une nouvelle clientèle. Un collectionneur âgé de jouets anciens va dire que ces jouets en plastique sont une cochonnerie. Mais le jeune les voudra.
"Il n'y a pas de portrait-robot de l'acheteur. Vous voyez parfois arriver un acquéreur qui a acheté par Internet, et vous n'imaginiez pas du tout que cette personne aurait pu acheter ledit objet."
Anecdote ironique : certaines personnes se demandent après coup pourquoi elles ont acheté ça. "C'est le jeu de l'enchère, tout comme quand vous allez au casino. On s'y embarque, et c'est la même chose pour l'enchère. Des gens disent qu'ils n'avaient aucune raison de l'acheter... mais ils assument."
"C'est la passion. Ça ne rime pas toujours avec raison." La passion, Thierry Collet l'a en tout cas depuis tout petit. "J'adorais ça, je traînais mes parents chez les antiquaires. Alors j'ai eu envie d'en faire mon métier. C'était pas du tout mon milieu : mon père était concessionnaire de matériel agricole."
Prenez vos agendas : la première vente de l'année 2021 aura lieu le lundi 1er février (en ligne, on l'a dit). Plus de 500 lots seront proposés à la vente, dont de la vaisselle et de l'argenterie, des bateaux en bouteille, et une quantité considérable de meubles. Sans oublier un curieux éventail (vidéo ci-dessus).
Le "plus beau coup de marteau" de Thierry Collet, comme il l'appelle, c'était un diamant bleu de six carats. Il était vendu par une maison de champagne qui a préféré rester discrète. Estimé à 400.000 euros, il s'est envolé à 2.4 millions...
Les enchères, âprement discutées, ont fini avec un prix de vente multiplié par 5.
Vous pouvez toutefois vous rassurer : inutile de prévoir autant si vous désirez acheter lors de ses enchères. Comme dit précédemment, il y en a pour toutes les bourses. Dès 5 euros...