Le tribunal judiciaire de Reims a ordonné le 25 janvier 2021, la mise en accusation d'un policier devant la cour d'assises de la Marne. Ce policier est suspecté d'être responsable de la blessure d'un supporter corse le 13 février 2016. Ce dernier assure avoir été éborgné par un coup de matraque.
Retournement de situation dans une affaire qui avait fait grand bruit en 2016, en marge d'un match de football opposant Reims à Bastia. Ce soir d'après-match, le 13 février 2016, avait été marqué par des violences, durant lesquelles Maxime Beux, un supporter corse, a perdu son œil dans des échauffourées avec les forces de l'ordre. Pour le jeune homme, des violences policières seraient la cause de sa blessure. Un combat qu'il porte devant la justice depuis de longues années, et pour lequel se dessine désormais une "nouvelle étape décisive", selon son avocat, Me Benjamin Genuini, interrogé par France 3 Corse.
Un renvoi "très positif" pour la partie civile
Le 25 janvier dernier, le tribunal administratif de Reims a ainsi ordonné la mise en accusation de Christophe M., gardien de la paix mis en cause dans cette affaire, devant la cour d'assises de la Marne pour "violences volontaires avec usage ou menace d'une arme ayant entraîné une mutilation permanente". L'ordonnance a été transmise aux parties civiles et à la défense le jour-même. Christophe M., disposait de dix jours après réception de cette dernière pour faire appel. Une option que le mis en cause n'aurait a priori pas choisie.
Du côté des conseils de Maxime Beux, on reste pour l'heure "prudents". "Nous n'avons pas encore la certitude qu'il n'y ait pas d'appel, et s'il y a appel, que celui-ci ne soit pas suivi", estime Me Genuini. Plus encore, même sans appel, il faudra faire preuve de patience avant un prochain procès, qui n'aurait pas lieu avant "six mois, au minimum".
"Rien n'est définitif"
Mais effectivement, un appel est loin d'être exclu. "L'affaire n'est pas terminée. Ce n'est pas du tout fini. Je ne ferai aucune communication", nous confirme Pascal Amoura, l'avocat du policier. "Rien n'est définitif" ajoute-til.
Même posture dans les rangs du syndicat Alliance police nationale. "Nous n'interférons pas dans cette affaire. Nous avons confiance en la justice. Pas de position pour le moment jusqu'au moment du procès. Eu égard à l'instruction, au respect que nous devons à notre collègue, je ne prendrai pas position", précise François Swiderski, son représentant dans la Marne.
Il y a le principe de présomption d'innocence, il est valable pour tout le monde même pour un policier ! Il est innocent tant qu'il n'est pas jugé. C'est une affaire compliquée et sensible.
"Il s'est passé beaucoup de choses au cours des deux dernières années", rappelle Me Benjamin Genuini.
En commencant par le placement sous contrôle judiciaire du policier [en novembre 2018, avec interdiction d'exercer sur la voie publique et de porter une arme; ndlr], ainsi que sa mise en examen [en avril 2019; ndlr], l'organisation d'une reconstitution, une confrontation [en avril 2019, entre Maxime Beux et Christophe M. devant un juge d'instruction du tribunal de grande instance de Reims; ndlr], "et désormais ce renvoi. Ce sont toutes des choses qui vont dans le bon sens et on ne peut que s'en satisfaire."
Pour le conseil du supporter bastiais, il y a encore aujourd'hui "une vraie attente de la population corse, des années après, de connaître les suites de cette affaire, qui avait à l'époque beaucoup choqué. Maxime Beux dispose en plus du soutien de ses proches d'un vrai soutien populaire."
Deux versions d'une même soirée
Pour rappel, cette nuit du 13 février 2016 Maxime Beux, en compagnie d'autres supporters, fait le déplacement à Reims pour soutenir le SC Bastia, dans le cadre de la 26e journée de Ligue 1. La rencontre se clôture sur une victoire 1-0 pour le SCB. Mais très vite, la soirée de célébrations dégénère. Des incidents entre forces de l'ordre et "Ultras" se déclarent dans le centre-ville rémois.
Deux récits des événements s'opposent : le premier présente des Ultras "provoquants", violents, et chantonnant des "slogans fascistes", forçant les forces de l'ordre à charger pour ramener le calme, puis à escorter les bus des supporters hors de la ville. Le second dresse une toute autre réalité : selon le club de supporters Bastia 1905, ce serait des forces de police "surexcitées et armées", qui auraient "décidé de charger sans discernement ni maîtrise".
La soirée se clôture avec l'interpellation et le placement en garde à vue de neuf supporters bastiais. Plusieurs sont blessés, dont un gravement : Maxime Beux, alors âgé de 22 ans, qui perd son œil. Mais là encore, les raisons de cette blessure ne sont pas les mêmes entre la partie civile et la défense. Maxime Beux assure avoir reçu un coup de matraque à la suite d'une course poursuite. Le policier incriminé a quant à lui toujours affirmé que le supporteur corse, déséquilibré par un coup à l'épaule, était tombé tête la première sur un poteau alors qu'il tentait de s'enfuir.