Reims : le tribunal a dédié une journée d'audience aux violences conjugales, "des affaires dont le traitement pénal est prioritaire"

Le tribunal de Reims, dans la Marne, a décidé de régulièrement dédier des journées d'audience correctionnelle aux affaires de violences conjugales. La première d'entre elles avait lieu ce lundi 14 mars. Compte-rendu.

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710 faits de violences conjugales ont été enregistrés par le parquet de Reims en 2021, un chiffre bien plus important qu'en 2020 (587) ou même qu'un an plus tôt (652). Environ un tiers de ces faits ont donné lieu à des poursuites, selon le décompte communiqué par le parquet.

Ce nombre important d'affaires et le "caractère prioritaire de leur traitement pénal" a conduit le tribunal à programmer tous les deux mois des audiences dédiées à l'examen de ces dossiers, comme il l'expliquait au début du mois de mars dans un communiqué. La première du genre a eu lieu ce lundi 14 mars. Les violences conjugales ont constitué l'essentiel de l'audience, mais pas son intégralité.

La violence conjugale parfois devant les enfants

Le premier dossier est celui d'une mère de famille. Les faits jugés remontent au mois de mars 2020, juste avant le confinement. Il est reproché à Monsieur d'avoir violenté sa femme alors qu'il était rentré alcoolisé au domicile, tenant "à peine debout", selon les éléments du dossier. Il l'a saisie au niveau du haut du torse avant de taper sa tête contre le mur.

Les enfants étaient présents et ont dû fuir chez les voisins. "Leurs affaires étaient toujours prête au cas où", raconte l'avocate. Les ecchymoses constatées par un médecin légiste sur le poignet et le tronc de Madame n'ont pas donné lieu à une incapacité de travail. Mais c'est ce qui l'a décidée à fuir le domicile pour de bon. Car les violences n'ont pas commencé ce jour-là, même si elles étaient surtout verbales jusqu'ici, explique la plaignante à la barre.

Le départ du domicile est toujours une décision difficile à prendre, surtout quand on est victime. Cette fois-ci, elle est encore plus compliquée car elle tombe en plein confinement, rendant difficile rien que le dépôt d'une plainte. Madame a dû passer toute cette période où la France était sous cloche dans un hôtel avec ses enfants. Elle n'a pu trouver un logement pérenne qu'un an après les faits.

Lors de son audition par la police, l'homme dit ne pas se souvenir précisément de la journée, mais est catégorique sur le fait qu'il n'a pas frappé sa femme. Une défense bancale qu'il ne pourra pas expliquer davantage, car il n'est pas présent à l'audience et n'est pas représenté par un avocat.

"La condamnation est nécessaire pour les enfants", souligne l'avocate de la victime. Eux qui ont grandi dans un climat de violence doivent comprendre qu'elle n'est pas tolérable. Dans le public, trois bancs sont occupés par les élèves d'une classe, qui assistent de manière studieuse à l'audience.

La procureure requiert à l'encontre du prévenu six mois de prison avec sursis ainsi que des dommages et intérêts pour la mère et les enfants, l'interdiction d'entrer en contact avec eux et l'interdiction de détenir une arme. La présidente du tribunal suivra précisément ces réquisitions dans sa décision communiquée en fin de journée

"On a l'impression d'une scène de film"

La seconde affaire concerne deux jeunes gens d'une vingtaine d'années, dont chacun est à la fois auteur de violences et victime. Le couple a eu un enfant ensemble, qui n'a été reconnu par le père qu'à l'anniversaire de ses un an. Aujourd'hui, il vit uniquement avec sa mère. 

Les faits sont étalés sur plusieurs mois en 2021. "On a l'impression d'une scène de film", ironise la présidente du tribunal en listant le contenu des plaintes. Coups de pied, cheveux tirés, griffures, morsures… "Vous vous comportez comme sur un ring", poursuit-elle.

"Oui, on ne devrait pas agir comme ça mais sur le moment on ne réfléchit pas", tente d'expliquer un peu plus tard la jeune femme. La majorité des coups est tout de même venue de l'homme, qui nie tout en bloc. La présidente lui montre les photos issues du dossier. "On ne se fait pas un cocard comme ça en tombant", pointe-t-elle. Mais il ne change pas pour autant sa version.

Pendant la plaidoirie de l'avocat de la partie adverse, la plaignante fond en larmes et s'agite à la barre. "Ne vous mettez pas dans un état pareil. C'est irrespectueux", assène la présidente. La jeune femme prend la parole ensuite, elle n'est pas assistée d'un avocat. "Je regrette de ne  pas avoir porté plainte depuis le début", bredouille-t-elle la voix encore étranglée par l'émotion.

La procureure requiert à l'encontre du conjoint 7 mois de prison avec sursis, l'interdiction d'entrer en contact avec Madame ou de se rendre à son domicile. Elle demande également qu'il verse des dommages et intérêts et qu'il suive un stage de responsabilisation pour conjoints violents. Pour l'ex compagne, elle se limite à demander qu'elle suive le même stage et qu'elle verse des dommages et intérêts. Des demandes parfaitement suivies par la présidente du tribunal dans sa décision.

Ces deux dossiers parmi tant d'autres illustrent la banalité des violences conjugales, qui s'installent parfois pendant des années, et détruisent à petit feu les personnes. Des dossiers que certains pourraient qualifier de mineurs face aux grandes affaires criminelles jugées aux assises. Mais des dossiers centraux pour les personnes impliquées, qui espèrent pouvoir enfin avancer et reprendre pied.

L'audience s'est poursuivie avec des dossiers à la teneur tout autre. Conduite alcoolisée, outrage à agent ou encore consommation de stupéfiant. La prochaine audience thématique dédiée aux violences conjugales est programmée le 9 mai à 14h.

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