Ce lundi 17 juin, plus de 80 professeurs de lycées ont participé à une action symbolique à Reims. En protestation contre la réforme Blanquer du baccalauréat, alors que les terminales se penchaient sur l'épreuve de philosophie du bac 2019, ils se sont couchés devant les grilles du lycée Marc Chagall.
L'image est pour le moins inhabituelle. D'ailleurs, dans les rangs des participants, des rires nerveux et quelques bons mots se font entendre. Ce lundi 17 juin au matin, alors que dans le lycée Marc Chagall, des terminales planchent sur la première épreuve du baccalauréat 2019, devant les grilles de l'établissement, un peu plus de 80 professeurs sont allongés sur le sol.
Pour la plupart habillés en noir, ils veulent dénoncer ce qu'ils appellent désormais "l'enterrement de l'Education nationale". Sur le côté, deux manifestants brandissent une banderole "avis de décès : bac, lycée".Il ne s'agit pas de gêner les élèves, on veut montrer notre inquiètude et notre mécontement
François Belleil, professeur d'histoire-géographie et secrétaire académique du Snes
Cette action, volontairement peu bruyante, ne vise pas à déranger le dérouement de l'épreuve de philosophie du bac. Si certains des professeurs présents comptent parmis les grévistes, qui ne se sont donc pas présenté à l'épreuve qu'ils devaient surveiller, ce n'est pas le cas de tous les manifestants présents.
Inquiètude pour la réforme des lycées
Dans leur viseur : la réforme Blanquer et son volet sur le baccalauréat. Alors qu'elle doit être appliquée dès la rentrée prochaine aux nouveaux élèves de première, les manifestants dénoncent les conditions dans lesquelles les nouvelles mesures ont été décidées. "On a une impression de bâclage" raconte Thierry Koessler, professeur d'histoire-géographie et président du Snalc Reims "la réforme n'est pas faite pour les élèves". Ce sont notamment les questions soulevées par le passage à un système de tronc commun et d'options qui suscitent l'inquiètude.Alors que la réforme prévoit que dès l'année prochaine, les cours seront réorganisés autour de trois matières de tronc commun, dont les mathématiques ne font pas partie, et de "spécialités", les professeurs dénoncent des inégalités d'accès aux différentes matières optionnelles. Tous les lycées ne proposeront pas les douze options définies par la réforme. Officiellement, les élèves qui voudront suivre un cours qui ne sera pas proposé dans leur établissement pourront bénéficier d'une dérogation pour aller étudier ailleurs. Mais les enseignants sont sceptiques : "ça leur complique la tâche, et ils veulent imiter les passages d'un établissement à l'autre" déplore Thierry Koessler, professeur d'histoire-géographie. Dans son établissement, une élève qui souhaitait suivre un cours d'espagnol en option a été ré-orientée vers de l'anglais, seule langue disponible en spécialité dans son lycée.
J'ai deux élèves dans mon établissement qui ont demandé comme options littérature et espagnol. Mais comme je suis dans un établissement technique, on les a poussé à abandonner ces voeux, pour qu'ils n'aient pas à changer d'établissement
Thierry Koessler, professeur d'histoire-géographie et président du Snalc Reims
Outre le manque de visibilité des orientations possibles pour les lycéens en fonction des choix qu'ils feront, les enseignants s'inquiètent également des choix que les élèves devront faire entre la première et la terminale. En effet, si les futures lycéens de première de l'année 2019-2020 suivront trois options, en terminale, ils n'en auront plus que deux.
Parmi leurs griefs : l'absence des mathématiques du tronc commun, mais aussi les revirements de l'administration sur la marche à suivre pour les premiers lycéens qui vivront la réforme. "Jusqu'en mars, on nous disait, ils sont libres, ils peuvent se faire plaisir pour leurs choix" raconte François Belleil, professeur d'histoire-géographie, "à partir de mars, on nous a dit qu'ils ont quand même des contraintes. Et nous, on a le sentiment de leur avoir menti".
Dernier point d'inquiètude, les nouveaux programmes qui accompagneront la réforme. Des programmes "infaisables, réalisés sans concertations" dénonce François Belleil. Secrétaire académique du Snes, il cite notamment une nouvelle matière, "numérique et sciences informatiques", pour lesquels il n'existe pas de professeurs. Ce sont donc des professeurs volontaires, qui seront formés avant la rentrée 2019 pour l'enseigner. Selon lui, seuls trois jours de formations sont prévus, insuffisant juge-t-il.
Manifestation devant tous les lycées de Reims
Après le lycée Marc Chagall, où ils se sont donnés rendez-vous à 8h30 (après le début des épreuves et alors que tous les candidats étaient déjà rentrés), les enseignants avaient prévu de faire le tour des établissements rémois : Georges Clémenceau, Jean Jaurès, Hugues Libergier et Franklin Roosevelt. Ils voudraient renouveler leur action devant chaque lycée.
- L'action des professeurs de lycée rémois, live-twittée le lundi 17 juin -Prochaines étapes : les lycées Clémenceau, Jaurès, Libergier et Roosevelt.
— France 3 Champagne-Ardenne (@France3CA) 17 juin 2019
Cette manifestation ne vise pas à troubler le déroulement du bac ont tenu à préciser certains des professeurs. #grevedubac #greve17juin pic.twitter.com/dBCFJVi4Xe
Dans l'académie de Reims, l'ancien territoire de Champagne-Ardenne, 13.923 élèves sont précisément candidats à ce baccalauréat 2019.