Reims : rue de Chativesle, le torchon brûle entre les riverains et les fêtards

Rien ne va plus dans l’hyper centre-ville de Reims. Si les nuisances sonores sont fréquentes, rue de Chativesle, elles sont montées d’un cran depuis le mois de septembre. Les riverains n’en peuvent plus du chahut des fêtards.

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Du jeudi soir au samedi soir, c’est toujours la même histoire qui recommence dans l’hyper centre-ville de Reims, rue Chativesle, qui relie la place d’Erlon à la rue Jeanne d’Arc. Les bars sont pris d'assauts par les fêtards et la voie publique est le théâtre de toutes les nuisances. Insupportable pour les habitants de la rue qui ne dorment plus et ne peuvent que constater les dégradations.

La rue étroite est depuis longtemps animée et voie de passage les week-end dans le centre-ville de Reims pour les fêtards qui l'empruntent entre la place d’Erlon et le boulevard Leclerc où se concentrent les discothèques. La rue Chativesle ne dément pas sa réputation. (Ci-dessous une vidéo de l'attroupement dans la rue Chativesle).

 

 

Une rue très animée

Plusieurs bars la jalonnent et les festivités vont bon train en fin de semaine. Un état de fait toléré jusqu’ici par les habitants de la rue qui savent bien que dans un centre-ville le silence n’est pas de mise. Mais depuis début septembre, la limite a été franchie et les riverains n’en peuvent plus. “Jusque là on tolérait les nuisances, on savait qu’on habitait dans l’hyper centre . Eux y bossent et nous on y vit. Là, l'équilibre est rompu”, explique Guillaume Cadiot, qui habite depuis dix ans dans la rue Chativesle.

La réputation de la rue n’est plus à faire et les rémois fréquentent régulièrement les commerces et bars alentour. “Cela a toujours été un quartier animé mais il y avait un juste équilibre. Le bar le Cuba a fermé pendant le covid et remplacé par l’Après, un bar clubbing. L’esprit a changé” ajoute Guillaume Cadiot.

Il fait partie du collectif qui vient de se créer. Des habitants de la rue Chativesle qui ne supportent plus les nuisances nocturnes provoquées par les fêtards qui rejoignent les bars. “Au Cuba, la clientèle était plus âgée. Là, la clientèle est plus jeune et le lieu attire énormément de monde”. Un pas de trop semble avoir été franchi.

 

Le bar de trop

C’est depuis début septembre que la situation est devenue critique. Un établissement est plus particulièrement visé par le collectif. “Dans cette rue il y a plusieurs bars en enfilade et cela en fait un de plus.”

Et visiblement le dernier arrivé n’a pas tardé à faire parler de lui. Le bar a ouvert à la rentrée de septembre dernier. Le succès au rendez-vous n’est pas du goût de tout le monde. “L’Après a un succès fou et ils nous disent clairement qu’il n’y peuvent rien” s’insurge Guillaume Cadiot.

 

Des nuisances intolérables

Ouvert jusqu’à 2 h 30 du matin, l’Après ne désemplit pas. “C’est une rue étroite et sonore. Il se forme dès onze heures un attroupement pour attendre d’entrer (dans le bar l’Après).”

L’alcool faisant son œuvre, les fêtards deviennent ingérables dans la rue. “Ils sont bourrés, ils vomissent, urinent sur les portes ou dans les pots de fleurs, parlent sous les fenêtres, s’assoient sur les marches devant les immeubles” explique Guillaume Cadiot.

Citation - Ils urinent devant les portes et vomissent dans les pots de fleurs.

Guillaume Cadiot, habitant de la rue Chativesle.

Une voisine, chauffeur de bus, incommodée par le bruit, dort désormais dans sa cuisine, d'autres, habitants, en face du bar n’en peuvent plus. Le collectif espère que les choses vont rapidement s’apaiser.

 

Trouver un juste milieu

Vincent Mansencal, président des vitrines de Reims, association des commerçants du centre-ville, est lui-même patron d’un bar. A la tête du Lion, place d'Erlon, il trouve la situation regrettable et souhaite que cela s’arrange. “Il y a des nuisances, du matin au soir, à vivre dans un hyper centre à Reims comme dans toutes les villes de France mais une solution d'apaisement peut-être trouvée”. 


 

Les incivilités c’est au quotidien, ça crache et ça pisse partout.

Vincent Mansencal, président des vitrines de Reims

 

Il rappelle les règles inhérentes aux bars “un tenancier doit se soucier des nuisances sonores même une fois que ses clients ont quitté l’établissement”.

Des solutions existent selon lui. “On peut mettre en place un système de façon à ce que le client qui part, qu’il soit aviné ou pas, puisse quitter l’établissement en ayant de la bienveillance pour les riverains, c’est une obligation mais ce n’est pas à moi de leurs expliquer comment l’on peut faire”

On peut aujourd’hui obliger le client à partir tranquillement.

Vincent Mansencal, président des vitrines de Reims.


“L’Après a ouvert depuis pas longtemps, je souhaite que cela s’arrange. Un tenancier doit se soucier des nuisances sonores même une fois que les clients sont sortis de son établissement” explique Vincent Mansencal.

 

Depuis l'allègement des mesures sanitaires et le retour à une vie normale tout a basculé pour les riverains. Les habitants de la rue Chativesle appellent la police toutes les nuits voire plusieurs fois par nuit. 

 

Un futur bar qui inquiète

Leur crainte, l’arrivée annoncée d’un nouveau bar-restaurant avec aussi des logements étudiants. Il verra le jour à la place de l’ancienne salle des ventes. Benjamin Carteret, actuel patron du Clos, dans le quartier de Boulingrin, a d'ores et déjà rencontré les riverains. Pas sûr que cela suffise à les rassurer. “C'est un grand bâtiment, nous savons déjà que le bruit sera présent” s’inquiète Guillaume Cadiot.

En attendant, et pour ne pas en rester là, le collectif a écrit un courrier au procureur de la République et déposé une main courante faute d’avoir été autorisé à porter plainte.

 

Le rappel des obligations

La municipalité quant à elle est au courant des nuisances dans la rue Chativesle. “C’est une situation qui est revenue à la réouverture des bars et le retour des clients. Il y a, dans cette rue en particulier, des problèmes liés aux incivilités dans le cadre des sorties de ces établissements à des heures avancées dans la nuit” explique Xavier Albertini, adjoint à la sécurité de la ville de Reims. “Il y a beaucoup de bruit avec des vomissements sur les marches, des gens qui urinent dans les bacs à fleurs”. 

Des problèmes connus et déjà traités par la ville.  “Nous mettons en place des suivis de la situation dans le cadre des équipages de l'UTN, (unité de tranquillité nocturne). Ils sont aidés par la vidéoprotection” précise l’adjoint. “Il y a eu des changements de propriétaires d’établissements et nous devons leur rappeler les règles pour gérer leur établissement y compris devant.” 

Elle entend le ras-le-bol des riverains même si dans un hyper centre le bruit zéro n’existe pas.  “Nous ferons le nécessaire pour qu’ils se rendent comptent que les choses évoluent en leur faveur car il y a un équilibre à trouver et une tranquillité nocturne en ce qui les concerne.”

Loin de vouloir opposer les uns et les autres elle souhaite l’apaisement mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. “La liberté de commerce est un principe en France et je ne peux pas fermer d’un claquement de doigts des établissements.” précise l'élu de la ville.

Si des mesures et des sanctions sont prises à l'encontre des contrevenants, il ne faut pas stigmatiser une profession ni un établissement, "même s'il peut-être en partie la source de la difficulté*, et sanctionner aussi les consommateurs, explique-t-on à la mairie. Rappelant enfin que si besoin il y a des outils administratifs et contraventionnels.

Le maire de Reims, Arnaud Robinet, ainsi que Catherine Vautrin, présidente de la communauté urbaine du Grand Reims, vont prochainement recevoir le collectif. 

 

Victime de son succès

De son côté, Benjamin Deffrennes, le propriétaire du bar l’Après, tente de maintenir le dialogue avec les riverains.”Je les comprends et je les contacte régulièrement.” 

Il explique mettre des choses en place comme l'installation à l'extérieur de caméras, de barrières et la demande de retrait des blocs de béton sur lesquels les badauds s'assieds. S'ajoutent les incitations au respect et le refus d'une clientèle paraissant déjà alcoolisée à l'entrée. Des mesures qui ont leur limite. Le passage incessant dans la rue et les attroupements même après la fermeture du bar sont problématiques selon le patron de l'Après.

Il reconnaît d'ailleurs être certains soirs totalement dépassé. "Jeudi j'avais une soirée étudiante dans mon bar, ils étaient intenables, c'était ingérable". Il espère que l'affluence créée par la réouverture des établissements de nuit et l'engouement traditionnel en début d'année des étudiants va s'estomper.

La situation, si elle ne change pas, ne fera pas baisser les bras des riverains ni du patron. “J’essaie de dialoguer mais ils appellent la police tous les soirs et ils nous tiennent responsables” regrette Benjamin Deffrennes.

Une prévention des addictions chez les plus jeunes, c'est ce que tente de faire la municipalité de Reims en allant à la rencontre des étudiants dans les facultés.

Tous espèrent encore une sortie de crise. Mais est-ce encore possible? La situation géographique de la rue, l'extension des bars, les débordements des fêtards souvent fortement alcoolisés, rendent la situation compliquée, d'autant qu'après plusieurs confinements et couvre-feux, les jeunes et les étudiants retrouvent enfin le gout de la liberté. 

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