Le bien connu Mirage installé devant l'hypermarché Leclerc de Saint-Brice-Courcelles (Marne), en banlieue rémoise, affiche de nouvelles couleurs. Il a été repeint fin octobre par l'artiste Céz Art, bien connu en ville.
C'est un avion de chasse, un vrai. Il aurait pu revêtir un camouflage militaire. Mais désormais, il est paré de mille couleurs, garni de plumes et de feuillages.
Le Mirage ornant le rond-point à droite de l'hypermarché Leclerc de Saint-Brice-Courcelles (Marne), en banlieue rémoise, a fait peau neuve. Depuis la fin du mois d'octobre 2023, il affiche des couleurs pour le moins chatoyantes, bien loin de sa livrée autrefois immaculée et de ses cocardes tricolores.
Les couleurs de l'artiste Céz Art, adepte des motifs naturels tels que les plumes ou les feuilles, que l'on retrouve des deux côtés de l'aéronef. L'artiste local et apprécié n'en est pas à son coup d'essai : la nouvelle fresque Abelé à l'entrée de la ville, mais aussi la fresque dite de la Louve, à l'entrée de la zone commerciale de la Croix-Maurencienne (visible sur la vue Google Street ci-dessous, lorsqu'elle était en cours de réalisation au mois d'avril 2023).
France 3 Champagne-Ardenne avait d'ailleurs fait son portrait en 2019. Cette nouvelle démarche artistique est l'occasion d'aller lui reposer quelques questions, auxquelles il répond bien volontiers. "Cet avion rappelle la base aérienne 112, qui a fermé [en 2011; ndlr]. En sa mémoire, ils ont installé un de ses avions-phares." C'était en 2012, une histoire racontée par L'Union.
D'un avion de chasse à une oeuvre d'art
"Monsieur Pageau, le père, l'avait installé lorsqu'il était directeur du Leclerc à l'époque. Maintenant, son fils, Paul Pageau, a réagi au fait que l'avion était assez vieillissant, en mauvais état en termes de peinture. Il a eu l'idée de me solliciter pour le transformer en oeuvre-d'art, plutôt que de refaire une peinture grise comme à l'époque." Il lui a fallu deux semaines, en nacelle et fin octobre, pour concevoir le résultat final ("c'était assez technique vu l'inclinaison"). Précédées de deux autres semaines où des professionnels du décapage et de la peinture industrielle ont préparé l'avion pour que sa nouvelle livrée, exposée aux éléments et aux rayons UV du soleil, dure le plus longtemps possible.
L'idée était "de complètement casser les codes" et "transformer cet objet en quelque chose de différent, de plus contemporain". Comme souvent, la nature foisonne : elle est souvent mise à l'honneur par l'artiste. C'est sa marque de fabrique, sa patte artistique. Son style est immédiatement identifiable, contribuant à faire de l'agglomération rémoise une terre de fresques colorées.
"Les deux côtés sont assez distincts. Le dessus est plus animal, évoquant le phénix. On a un côté d'avion qui renaît de ses cendres. Je ne voulais pas représenter un animal qu'on puisse vraiment identifier au premier regard. Je laisse les gens se faire leur propre interprétation. On a un hybride entre un insecte et un oiseau. Avec des couleurs chaudes, pour amener du dynamisme, montrer des éléments cosmiques avec un effet de mouvement. Comme si l'avion était en train de décoller." Prêt à fendre les airs.
Je laisse les gens se faire leur propre interprétation.
Céz Art, artiste aux fresques chatoyantes
"Le dessous est plus végétal. On a plutôt de la couleur froide. J'ai voulu faire comme si la nature reprenait ses droits sur l'appareil. Avec des plantes un peu grimpantes." Comme du lierre. Sans oublier le traditionnel raisin, associé au champagne qui a rendu Reims si renommée. Une "sorte de raison laser", évoquant du feu mais de couleur bleue, "pour suggérer que l'avion est prêt à s'envoler." À noter qu'on retrouve des nuages sur les deux faces.
"C'est comme si on n'avait plus besoin de faire la guerre, que recourir à un avion militaire était obsolète. Et que la nature reprenait ses droits sur cet engin. Malheureusement, ce n'est pas le cas..." Oui, la guerre est omniprésente dans l'actualité de fin 2023, "mais il y avait un peu moins de conflits quand on a conçu le projet. Il y avait la guerre en Ukraine, bien sûr."
"Ma vision, c'est qu'un avion militaire, c'est assez anxiogène, surtout en cette période. Et je voulais casser un peu ça. Plutôt que faire une peinture de camouflage, très classique, je voulais amener quelque chose de plus doux, plus flower power." Dîtes-le avec des fleurs, un slogan hippy. Elles semblent bien loin, les années hippies. La guerre (à l'époque au Vietnam), par contre...
Plutôt que le sempiternel bellicisme ambiant, il propose et fait réfléchir à un véritable "jardin d'Éden. Qu'on trouvait déjà dans la fresque avec la louve." L'art pour s'évader du monde réel : c'est l'une de ses nombreuses et vertueuses utilités. Et le grand public, dans sa très grande majorité, approuve. L'artiste évoque "90% de retours favorables : il y a toujours des puristes des avions qui mettent un peu de temps à s'habituer".
Deuxième oeuvre d'un véritable triptyque bricocorcellien
Les couleurs de Céz Art ne dépareillent pas à Saint-Brice-Courcelles. "J'ai fait une autre oeuvre dans la même zone." C'est à dire la zone commerciale de la Croix-Maurencienne. "C'est la fresque de la Louve, 45 mètres de long sur huit de haut, donc à peu près 300 m². L'avion est le deuxième projet, et il va y en avoir un troisième."
En quoi consistera-t-il ? Mystère et cacahuètes. On sait seulement que "ce sera un grand format" et que la thématique "des quatre éléments sera commune aux trois oeuvres. L'air et le feu pour cet avion, la terre pour la louve." Et donc "l'eau pour le dernier. Le thème sera aquatique."
On trouve du raisin sur l'avion et au côté de la louve. Mais le trait d'union des trois oeuvres, outre leur thématique commune des quatre éléments, c'est tout simplement... l'avion en lui-même. "Il n'y aura pas de raisin sur la fresque aquatique, mais on y retrouvera sûrement l'avion. En tout petit dans le ciel, au-dessus de la louve, on le retrouve déjà."
"Ce troisième projet devrait voir le jour début 2024." On ne sait pas exactement où il sera placé au sein de cette zone. Pour le moment, en tout cas.
