Zéro portable au collège : ces établissements vont expérimenter la "pause numérique"

À partir de la rentrée, 15 collèges de l'académie de Reims vont tester ce dispositif. Le principe est clair : les élèves ne pourront plus pénétrer dans l'établissement avec leur téléphone.

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Depuis 2018, l'utilisation du téléphone portable est interdite par la loi à l'école et au collège. Mais pas le portable lui-même qui doit être "éteint et rangé" dès l'entrée au collège, rappelle le ministère de l'Education nationale sur son site. Désormais, c'est la possession même de l'équipement qui pourrait être proscrite dans l'enceinte des établissements. Près de 200 collèges doivent participer à ce test, dont 15 dans l'académie de Reims (voir liste ci-dessous).

Cette annonce de la ministre démissionnaire Nicole Belloubet lors d'une conférence de presse mardi 27 août a été relayée par le recteur de l'académie de Reims, lui-même à la rencontre des médias ce jeudi 29 août. Il rappelle l'enjeu de ce dispositif. "Nos élèves sont trop immergés dans les réseaux sociaux qui véhiculent la désinformation, parfois la haine, explique Vincent Stanek. Ils sont parfois coupés les uns des autres à force d'être dans le milieu virtuel. C'est donc un enjeu sociétal majeur, pour la vie sociale et la société de demain. Les réseaux peuvent aussi être vecteurs de harcèlement, tout cela se condense dans cet enjeu."

Le rectorat de l'académie de Reims détaille encore ses intentions dans un communiqué sur ce sujet. "L’utilisation abusive des écrans a des effets néfastes et démontrés sur la concentration, la socialisation, mais aussi sur l’exercice d’une réflexion autonome et de l’esprit critique. S’il ne s’agit pas de bannir le numérique de la pédagogie, les usages non pédagogiques n’ont pas leur place à l’École".

Mesure "bienvenue" pour certains, "inutile" ou "démagogique" pour d'autres

Certains chefs d'établissement estiment que cette mesure du "zéro portable" est la bienvenue même si cela ne va pas "révolutionner" les règles existantes. "C'est un renforcement de la loi Blanquer de 2018 qui devrait faciliter le travail de toute la communauté éducative, réagit Michel-Jean Labrousse, principal de collège et secrétaire départemental du SNPDEN-Unsa en Haute-Marne. Normalement, les élèves n'avaient déjà plus le droit de l'utiliser dès lors qu'ils entraient au collège mais cela peut aider à clarifier les choses. Si cela permet de ne plus avoir du tout à gérer les problèmes liés au téléphone, la vie scolaire s'en ressentira positivement."

D'autres jugent l'interdiction inutile et dénoncent l'absence de solution au "problème de fond". "On peut regretter cette addiction de certains au téléphone et aux réseaux sociaux mais ce n'est pas nouveau, c'est un problème de société, pas un problème scolaire, réagit Yohan Odivart, secrétaire du syndicat d'enseignants SNES-FSU dans la Marne. On va sevrer les élèves dans la journée mais une fois rentrés chez eux, ils vont retourner sur leurs écrans. Les interdictions, pour les adolescents, ne produisent pas toujours leurs fruits. Cela ne va pas arrêter le cyberharcèlement. Il faudrait que l'école s'approprie vraiment l'éducation aux médias, mais pour cela, il faut davantage d'adultes dans les classes, donc des moyens."

Autre sujet de colère pour les syndicats, le contexte politique lié à l'attente de la nomination d'un Premier ministre et du gouvernement. "La rentrée va-t-elle se faire avec une ministre démissionnaire ?", interroge ainsi Pascal Andrieux, secrétaire départemental de la FCPE (Fédération des conseils de parents d'élèves) dans l'Aube. Pour ce dernier, le téléphone n'est clairement pas le sujet prioritaire à traiter en cette rentrée. "C'est une mesure démagogique pour endormir les parents, et un nouveau casse-tête pour les CPE qui vont certainement être chargés d'appliquer le retrait des portables ! En tout cas on va subir des suppressions de postes, des classes surchargées et des jeunes démotivés, avec ou sans leur portable."

À chaque collège sa méthode pour bannir le portable

Reste à déterminer les conditions de mise en place du dispositif. Dans le cadre de cette expérimentation, chaque collège décide de quelle manière il met en œuvre cette interdiction. Le nombre d'élèves accueillis, leur profil social, ou encore la configuration des lieux peut entrer en compte. Dans plusieurs collèges, les élèves utiliseront le matériel déjà existant, en déposant leur téléphone dans leur casier. D'autres opteront pour des dispositifs plus innovants, en utilisant par exemple des pochettes comme c'est le cas lors de certains spectacles.

La question du financement de ce matériel se pose aussi, en sachant que l'Etat ne participe pas au financement de l'opération.

Parmi les collèges de l'académie concernés, certains vont mettre en place la mesure dans les jours qui suivent la rentrée scolaire, d'autres patienteront jusqu'à la rentrée suivant les vacances de la Toussaint. En cas de succès, une généralisation à l'ensemble des établissements pourrait intervenir en janvier.

La liste des collèges concernés :

  • Ardennes (08) : Collège multisites Signy-le-Petit - Liart à Signy-le-Petit, Jules Leroux à Villers-Semeuse, Vauban à Givet, Collège multisite Asfeld – Château-Porcien à Asfeld
  • Aube (10) : Eugène Belgrand à Ervy-le-Châtel, Amadis Jamyn à Chaource, Collège des Roises à Piney, Jean Jaurès à Nogent-sur-Seine
  • Marne (51) : Georges Braque à Reims, Joliot-Curie à Reims, Mont d’Hor, à Saint-Thierry, La Source à Rilly-la-Montagne
  • Haute-Marne (52) : Montmorency à Bourbonne-les-Bains, Paul Claudel à Wassy, Jean Renoir à La Porte-du-Der

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