ChatGPT, c'est cette intelligence artificielle qui a presque réponse à tout. Elle peut aussi compiler plusieurs résultats issus de moteurs de recherche comme Google. Depuis quelques semaines, le site internet où elle est disponible accueille beaucoup de visiteurs. ChatGPT captive le public, mais elle commence aussi à inquiéter.
Avez-vous entendu parler de ChatGPT, ces dernières semaines ? Il s'agit d'une intelligence artificielle, accessible sur ce site internet. Elle est capable de résumer les résultats d'un moteur de recherche, ou encore de répondre à des questions d'internautes sur quasiment tous les sujets.
Nos facétieux collègues de France 3 Alsace, ont par exemple demandé à cette "intelligence conversationnelle" si l'Alsace devait sortir de la région Grand Est. Epineuse question sur laquelle ChatGPT a joué la prudence, en ne prenant pas position. À la place, un texte qui résume les arguments du pour et du contre.
Plaisanterie à part, la montée en puissance rapide de cette intelligence artificielle interroge forcément. Elle fascine autant qu'elle oblige à s'adapter, selon des spécialistes du monde de l'information.
Une avancée pour les recherches internet
"C’est une avancée technologique majeure, on est sur quelque chose similaire à l’arrivée de Google en 1998. ChatGPT a trouvé son public en très peu de temps : en quelques semaines, de l’ordre du million d’utilisateurs", relève Martial Martin. Pour l’enseignant-chercheur en sciences de la communication et de l’information à l'université de Reims (Marne), la place grandissante de cet outil est intéressante à observer.
"Il faut surveiller si ChatGPT, ou d’autres intelligences conversationnelles comme celles des enceintes connectées telles que Amazon Echo ou Google Nest, viennent à remplacer les moteurs de recherche traditionnels. ChatGPT fait appel à sa propre base de données : il améliore ses résultats et construit des réponses pertinentes au fur et à mesure des conversations qu'il peut avoir", note celui qui est aussi le directeur de l’Institut universitaire de Technologie à Troyes (Aube).
À en croire l’universitaire, cette "intelligence conversationnelle" offre un raisonnement plutôt élaboré. "Cela peut être une facilité pour un collégien ou un lycéen qui aurait des difficultés pour ses recherches. La réflexion est véritablement agencée sur un sujet. L’agent fournit une dizaine de lignes bien argumentées et charpentées", explique Martial Martin.
Attention à la confiance aveugle face à cet outil
Prudence tout de même, sur l’idée de faire entièrement confiance à ChatGPT. Le chercheur nuance son propos, en indiquant qu’il n’est pas à l’abri de manipulations. Ce que relate, par exemple, ce blog spécialisé dans le monde de l'information. "Des choix sont effectués en termes de codage. L’intelligence artificielle repose sur un principe de codage. Pour ce codage, il y a des choix qui sont faits. Cela peut amener au développement de réponses biaisées idéologiquement, de sorte que cet outil peut se transformer en outil d’endoctrinement, qui passe pour transparent", détaille le responsable universitaire.
Il appelle le public à la vigilance, et à toujours vérifier ses sources. "Le risque est de reconnaître cette intelligence comme supérieure à ce qu’elle est. Un certain nombre d’usagers ne vont se limiter qu’à cela. Il faut remettre en contexte ChatGPT : ce n’est qu’un élément dans une recherche plus vaste. La recherche doit s’articuler avec d’autres sources d’informations", pointe-t-il.
Ce que note aussi Yann Verchier, à l'université de Technologie de Troyes (Aube). Pour ce responsable du centre d'innovation pédagogique dans cette faculté, "même si ce programme fournit des réponses pertinentes, les sources peuvent ne pas toujours être vérifiées, causant ainsi des erreurs". Deux autres réserves sont relevées par ce titulaire de la chaire de recherche Smart Campus/Smart Cursus : "Les connaissances de l'intelligence s'arrêtent pour le moment à l'année 2021. Rien n'exclut aussi qu'elle n'apprenne pas d'elle-même des contenus faux et des ressources discutables".
Rien n'exclut aussi qu'elle n'apprenne pas d'elle-même des contenus faux et des ressources discutables
Yann Verchierenseignant à l'université de Technologie de Troyes
Le développement de cette "intelligence conversationnelle" interroge beaucoup, côté professionnels. "Cela va questionner sur les pratiques en tant qu’enseignant. Il va falloir repenser rapidement la façon de travailler avec les apprenants. Faire comprendre vite quels intérêts, quelles limites et quels compléments il peut y avoir à OpenGPT. Il faut déterminer aussi le cadre professionnel, on peut l’utiliser de manière éthique", dit Martial Martin. Même préoccupation côté université de Technologie de Troyes (Aube). Dans cet établissement, le personnel et les élèves doivent justement être sensibilisés prochainement aux bonnes pratiques pour ChatGPT.
"Les modes d'évaluation vont être questionnés, car les étudiants ont accès à une ressource qui rassemble des informations en temps réel. Côté enseignants, la question de la pertinence se pose pour l'ensemble des évaluations actuelles qu'elles soient sur papier, en numérique ou à distance. Nous leur avons fait la démonstration, en faisant un test avec des éléments tirés de leurs évaluations insérés dans ChatGPT, qu'un novice qui n'aurait pas suivi leurs cours pourrait s'en sortir grâce à cet outil. On est vraiment en face de ressources différentes, avec un mix et des réponses uniques", souligne Yann Verchier.
Le débat continue pour l'heure, notamment dans les milieux de l'éducation, pour déterminer la place future de ChatGPT.