Marne : des professionnels de santé testent un simulateur de vieillissement, "on a bien senti nos 80 ans"

Déployé dans la résidence de service seniors Domitys de Vitry-le-François, la Salamandre, le simulateur de vieillissement a permis aux participants de comprendre les difficultés ressenties par nos seniors pour leurs gestes du quotidien. 
 

"On a bien senti nos 80 ans en participant à ces ateliers équipée comme j'étais", avoue Peggy Dhumez, infirmière en charge de l'équipe mobile d’intervention gériatrique à l'hôpital de Vitry-le-François. Avec plus de 20 kg sur elle après avoir enfilé la combinaison et ses accessoires, Peggy s'est aperçue de nombreuses difficultés pour se déplacer, faire des gestes de la vie quotidienne. 

"Dans le kit de la combinaison il y a plusieurs éléments, explique Lydie Fabing, chargée de réseau Domitys pour la résidence de service seniors, La Salamandre, à Vitry-le-François et qui anime ses ateliers. Une paire de lunettes permettant d’imiter le jaunissement du cristallin et la réduction du champ visuel, un casque auditif simulant une perte d’audition à haute fréquence, un collier cervical à porter qui réduit également la motricité de la tête, des coudières et des genouillères de 2,5 kg chacun, qui réduisent ainsi la perte d'agilité et des mitaines qui atténuent la dextérité et la sensibilité des doigts. Et on rajoute un gilet de 10 kg."
 

Un aperçu de ses 80 ans

Ces accessoires permettent de simuler trois altérations liées au vieillissement: celle de la motricité, de la vision et de l'audition. Grâce à une mise en situation très réaliste, les participants ont ressenti le poids des années. La démarche particulière liée à l’âge, l’altération de la capacité de préhension, la diminution de l’agilité ainsi que la réduction de coordination des mouvements. "Alors que ces difficultés peuvent parfois entacher le moment présent et pousser à l’isolement des seniors, l'idée de ses ateliers est de tout mettre en œuvre pour comprendre ces comportements et ainsi les prévenir", ajoute Lydie Fabing. "Les difficultés commencent dès le réveil, avoue Peggy, qui a dû s'y reprendre à plusieurs fois pour sortir du lit avec cette combinaison."

Peggy Dhumez a participé avec trois autres professionnels de santé à ces ateliers " Je suis en charge en tant que responsable gériatrique de l'autonomie et fonctions cognitives gériatriques aussi pour moi tester cette combinaison qui simule le vieillissement me semblait important pour encore plus accompagner mes patients dans leur vie quotidienne". Pendant 20 minutes, Peggy a senti les difficultés et a eu un aperçu de ses 80 ans. Le retour du futur est sans équivoque. "C'est très impressionnant ! Le poids de la combinaison et de ses accessoires nous permet de nous rendre compte des conséquences du vieillissement et rend nos gestes de la vie quotidienne extrêmement difficiles", raconte Peggy.

Lydie Fabing anime ces ateliers et propose de réaliser des gestes de tous les jours à ses participants. Comme se verser un verre d'eau, prendre un comprimé, lire un livre, descendre des escaliers, pousser un déambulateur, sortir de son lit ou encore saisir un objet en hauteur. "Ainsi équipée, les choses sont plus difficiles à accomplir, comme se baisser pour ramasser une pièce par terre ou tout simplement sortir de son lit, raconte Peggy. J'ai dû faire preuve d'imagination pour me baisser et ramasser la pièce qui était au sol durant l'atelier. Chacune de nous qui participait à l'atelier avait une méthode différente."


Pour une prise de conscience

Ces ateliers avec ce simulateur sont proposés par Domitys et sont accessibles aux personnels de santé avec un panel large mais aussi aux proches des familles. Pour permettre aux personnes qui s'occupent des seniors de mieux comprendre qu'ils ressentent. "Moi, je n'ai plus été capable de lire", se rappelle Peggy.

Avec Peggy, 43 ans, il y avait une pharmacienne de 25 ans, une infirmière 33 ans et une aide à domicile de 50 ans. "Nous étions ainsi dans un panel large entre 25 et 50 ans et nous avons toutes ressenties les mêmes difficultés. On était toutes les quatre bien contentes de se débarrasser de cette combinaison."

Tout est difficile à faire avoue Peggy. "Pour descendre les escaliers, je ne voyais rien... J'ai trouvé la solution en me mettant de côté et en tenant la rampe. Mais moi, ce n'était qu'une fois. Quand on est âgé et qu'on doit tous les jours faire ces efforts, j'imagine beaucoup mieux que parfois elles n'aient pas envie ou moins envie de faire des choses."

"Il y a des familles qui veulent que leurs seniors restent absolument à domicile, mais ça peut être très difficile pour ces personnes de devoir faire des gestes de la vie courante sans aucune aide", rappelle Lydie. Le but, c'est de changer le regard par rapport aux seniors et aussi d'adapter son travail à eux." "Forcément, le professionnel ou le proche sera davantage dans l'écoute et l'accompagnement après avoir vécu pendant 20 minutes dans le corps d'un senior de plus de 80 ans", reconnaît Peggy.

Durant cet atelier, Peggy s'est rappelée de ses proches. "J'ai revu grand-mère et j'ai compris pourquoi elle se déplaçait comme elle le faisait. Et j'ai également pensé à mes patients bien sûr. On comprend pourquoi ils balancent leur poids d'une jambe à l'autre." Des gestes comme boire deviennent difficiles et Peggy sait maintenant pourquoi les personnes âgées boivent peu. Arriver à le faire relève d'un effort réel.

"Je pense qu'on sous-estime le vieillissement. Les actes de la vie deviennent de plus en plus difficiles. Ça m'a fait réfléchir même vis-à-vis de moi", avoue-t-elle. J'ai un surpoids et je me suis dit que je devrais perdre quelques kilos pour pouvoir bouger plus aisément plus tard. Ce simulateur m'a fait me projeter dans le futur et je me suis dit qu'il fallait que je fasse des efforts pour être moins essoufflée et ralentie dans quelques décennies."

Alors que les difficultés de mobilité des seniors peuvent parfois entacher le moment présent et pousser à leur isolement, l'idée de ces ateliers est de tout mettre en œuvre pour comprendre ces comportements et ainsi les prévenir. Le groupe de résidences seniors Domitys fait partie du premier think-thank, "Matières Grises", dédié au vieillissement de la population. Le simulateur fait le tour des 120 résidences où vivent 12.000 seniors. Après la résidence de Vitry-le-Francois, il poursuit ses essais dans le Grand Est à Kingersheim et à Mulhouse.

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