Elles sont au nombre de trois. Trois gares qui balisent la LGV Est européenne reliant dans les grandes lignes Paris à Strasbourg. Mais ces trois gares n'ont pas eu le même destin. Champagne-Ardenne TGV, Meuse TGV et Lorraine TGV : état des lieux dans Enquêtes de Région.
Inaugurée en 2007, la ligne à grande vitesse Est européenne compte trois gares sur son parcours, hors départ de Paris gare de l'Est et arrivée à Strasbourg. Ces trois gares ont été construites le long de la voie, dans un souci de proximité avec les territoires traversés.
17 ans plus tard, que sont devenues ces gares ? Leur fréquentation, leur intérêt ? Leur lieu d'implantation a-t-il été judicieux ? C'est un des dossiers de notre magazine Enquêtes de Région intitulé "En mouvements" à retrouver en intégralité sur ce lien ici.
Voici trois bonnes raisons de suivre l'enquête de Clément Barbet et d'Alexandre Keirle.
1. Pour s'étonner encore du choix du lieu pour la gare Lorraine
L'éternelle rivalité entre les villes de Nancy et de Metz est à l'origine de ce démêlé. Le tracé aurait pu passer par une des villes, mais l'idée n'a pas fait long feu. Il coupera la poire en deux en passant légèrement plus près de Metz que de Nancy, mais la balle reste au centre. Il faut ensuite déterminer l'emplacement de la gare TGV Lorraine. Louvigny en Moselle ou Vandières en Meurthe-et-Moselle ? Le débat politique s'éternise. Un site possible se trouve au croisement de la ligne TGV et la ligne TER reliant Metz à Nancy, la gare de Vandières semble tout indiquée.
Après bien des polémiques politiques, le choix se porte sur Louvigny. La gare est construite, inaugurée et mise en service. Tout débat devrait être conclu. Mais en 2015, le conseil régional relance la controverse et lance un référendum sur la construction d'une autre gare de connexion entre le réseau TGV et le réseau TER à Vandières. Résultat du vote, une abstention massive et un score de 58 % des suffrages exprimés contre cette deuxième gare. Point final.
Eh bien non, car les travaux de construction de la nouvelle gare ont bien été budgétisés, comme le confirme un courrier du ministre des Transports de 2016, Alain Vidalies. Le projet figure encore sur le schéma régional d'aménagement du territoire, voté par la région Grand Est en 2019. Pourquoi ?
C'est Louis Blaise, président de l'association des usagers des transports lorrains qui l'explique en lisant un document de 2019 rédigé par le conseil général (ancien nom du conseil départemental) de Moselle : "Il faut rappeler que la gare voyageurs TGV de Louvigny a été construite de manière provisoire, afin de permettre à la Lorraine de disposer d'une halte dès la mise en service de la LGV Est".
Le dossier reste donc dans les placards de la grande région. L'avenir dira s'il continuera à prendre la poussière ou s'il resurgira un jour.
2. Pour s'étonner encore sur la gare Meuse TGV
Si la gare Lorraine se situe à peu près entre Metz et Nancy, la gare des Trois-Domaines en Meuse se trouve perdue au milieu des champs. À égale distance de Verdun et de Bar-le-Duc. Sa situation géographique permet de toucher également une partie des usagers de l'est de la Marne et du nord de la Haute-Marne. Mais elle fait figure de gare secondaire. Pensez, seuls une quinzaine de trains y font un arrêt sur les 150 qui y passent chaque jour.
Afin de donner un sens économique à cette halte éloignée de tout, le conseil général (à l'époque ce n'était pas encore le conseil départemental) de la Meuse a investi dans les terrains adjacents. Il espérait attirer les entreprises, étant désormais situé grâce au TGV à équidistance entre Paris et Strasbourg, à une heure de chaque capitale.
Mais les entreprises ne sont pas venues s'installer. Un temps, l'espoir de voir arriver un géant chinois, fabricant de leds, s'est fait sentir. Une cérémonie officielle de pose de première pierre s'est même tenue. Mais les asiatiques ont fait chemin arrière et les terrains sont restés désespérément vides. Adieu les vastes desseins économiques, restent les bons vieux veaux, vaches, cochons, couvées.
3. Pour se réjouir de la réussite de la gare Champagne-Ardenne
C'est la grande gagnante de la lignée. Il y a bien eu quelques contestations contre les nuisances dans le village de Bezannes à 8 km de Reims dans la Marne. Alors le maire Jean-Pierre Belfie s'est battu pour faire décaler le projet de… 150 mètres. Le premier projet étant trop près du village. Le TGV oui, mais pas n'importe comment. "On a fait des avancées significatives pour protéger nos villages respectifs traversés par le TGV ".
La proximité avec Reims profite au village. La commune se développe et le maire a le sens des affaires. Le réseau de transport se densifie : TER-douze minutes pour aller sur Reims-, le tram, les bus de ville, et des bus longue distance, par exemple vers paris en 40 minutes ou 30 minutes vers l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle. La petite ville développe son attrait et le maire enchaîne les constructions. "Je me suis aperçu que quand, à côté, il n'y avait que des bureaux, ça ne vivait plus. On a pris le pari audacieux pour l'époque de faire des bureaux et de l'habitat, un mixte des deux."
Le pari est gagnant, des entreprises s'installent, des commerces, des hôtels et summum de la réussite économique, un golf. Mais la cerise sur le gâteau, c'est l'implantation de la clinique du groupe Courlancy. Les médecins acceptent de venir y travailler compte tenu de la proximité avec Paris grâce au TGV. Le développement futur de la polyclinique s'annonce.
L'exemple même de l'aménagement du territoire économiquement prospère.