Le mardi 7 janvier 2015, plusieurs membres de Charlie Hebdo étaient tués dans un attentat terroriste à Paris. Parmi eux figuraient Tignous, Cabu ou encore Wolinski. Dix années ont passé et le juge Gilbert Thiel, les dessinateurs lorrains Rémi Malingrey, Baru et Yann Lindingre évoquent cette journée.
Le mardi 7 janvier 2015, le journal Charlie Hebdo était la cible d'un attentat terroriste. Quelques jours plus tard, de nombreuses marches "républicaine" ont rassemblé plus de quatre millions de personnes en France.
Increvable !
— Charlie Hebdo (@Charlie_Hebdo_) January 6, 2025
Notre numéro spécial 7 janvier de 32 pages :
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Dix ans après, mardi 7 janvier 2025, le dessin de presse a-t-il changé ? "Normalement, non", dit l'auteur de bande dessinée Baru. Originaire de Villerupt, Baru habite maintenant à Nancy en Meurthe-et-Moselle. "A Charlie, j’avais deux amis, Cabu et Wolinski. C’est Cabu qui est responsable de ce que je suis devenu. C’est lui qui m’a donné envie d’être dessinateur de bandes dessinées. Wolinski, il avait le sens du jugement. Dans Charlie mensuel, il y avait toutes mes idoles du magazine Hara-Kiri". Baru publie dans les années 80 "La piscine de Micheville", et les trois volumes de "Quéquette Blues". Il a reçu le Grand prix de la ville d’Angoulême pour l’ensemble de son œuvre.
Un vrai gentil
Piliers de la rédaction de Charlie Hebdo, Tignous était un ami de Gilbert Thiel, l’ancien juge de l’antiterrorisme. "J’ai connu Tignous au premier procès d'Yvan Colonna en 2007. Il était venu au Palais et puis on a sympathisé. Ensuite, on s’est très souvent revus, dans le 13ᵉ arrondissement de Paris avec Charb et l’éditeur". Et aujourd'hui encore, la douleur est toujours omniprésente. "Je me souviens très bien, c’est l’éditeur qui m’appelle le 7 janvier : "T’es au courant ? Je lui réponds, non mais dis-moi. Il y a eu une fusillade à Charlie Hebdo. Écoute, je ne sais pas si tu peux te renseigner... me dit-il. Et puis j’ai tout de suite appelé la direction de la police antiterroriste à Paris. Ils m’ont répondu : ils sont tous morts".
Tignous c’était un vrai chaleureux, il aimait les gens.
Gilbert Thiel, ami et ancien juge
Les dessins de Tignous témoignent de ses convictions et de ses engagements. Bernard Verlhac, dit Tignous venait d’un milieu ouvrier. Il est mort à l’âge de 57 ans. Il était père de quatre enfants. "C’était un vrai chaleureux, il aimait les gens". Ensemble avec Gilbert Thiel, ils devaient écrire un "Code pénal corse illustré en bande dessiné", "avec le droit silence et le droit à l’Omerta".
Un combat
En 2025, le dessin de presse est-il de plus en plus menacé ? "Non.". Le constat de Baru est partagé par Remi Malingrey, dessinateur de presse. "Les dessinateurs de presse continuent à le faire bien sûr et le ton reste le même. Je pense qu’il y a un public qui comprend cet humour même s’il est un peu plus vieillissant".
L’effet de sidération est encore là. On a l’impression que ça s’est déroulé hier
Remi Malingrey, illustrateur
Remi Malingrey est né à Commercy (Meuse). Il vit et travaille à Nancy. Ses dessins sont régulièrement publiés dans le Nouvel Obs, Libération, Okapi, Le Monde ou Science-et-Vie Junior. Quel souvenir gardez-vous de cette journée du 7 janvier ? "Je me souviens très bien de cette journée, je pense que c’est incroyable. L’effet de sidération est encore là. On a l’impression que ça s’est déroulé hier. Ce sont des gens qui nous ont nourri dans la représentation de la déconne, du dessin. Ils n’ont pas été remplacés".
"Celui de la liberté d'expression"
Yan Lindingre, l’ancien rédacteur en chef de Fluide Glacial, est illustrateur et dessinateur de presse pour le Canard Enchaîné et Siné Mensuel entre autres. Il y connaissait bien Charb et Tignous. Ce jour-là, le 7 janvier 2015, il avait rendez-vous avec Wolinski,"j'attendais ses dessins. On avait rendez-vous après le bouclage". Il n’oublie pas que les dessinateurs de Charlie Hebdo vivent toujours avec des gardes du corps, pourtant, "on n'est pas dans un pays de censure. On s’est interrogé depuis Charlie et dans les années 70 on lisait Hara Kiri et on pouvait tout se permettre. Aujourd'hui, il y a une forme de pensée unique qui peut s’installer. Et c’est vrai que tout le monde se donne la possibilité de critiquer les dessins et de condamner".
Charlie Hebdo a publié les résultats d’une étude de l’IFOP pour la Fondation Jean-Jaurès effectuée en juin 2024. Ainsi, 76 % des Français estiment que "la liberté d’expression est un droit fondamental, [et que] la liberté de caricature en fait partie".