Fabriquer en non-stop 800 000 masques en tissu lavables 10 fois, c'est parti pour un marathon de 8 semaines ! 75 personnes viennent d'être embauchées pour 2 mois. Aux manettes, une équipe inédite privé-public : le créateur Davy Dao, le département de Meurthe-et-Moselle et la ville de Maxéville.
Pour leur premier jour de boulot, ils bossent déjà à fond. Derrière leurs visières en plexiglas, trop absorbés par leurs toutes nouvelles tâches, les douze ouvriers de l'après midi ne lévent pas trop les yeux sur les visiteurs. En effet, depuis le matin de ce samedi 2 mai, ils étrennent une chaîne de fabrication textile inédite car créée dans l'urgence. Alors la routine des gestes ne s'est pas encore installée. Coronavirus et nouvelles mesures sanitaires obligent, la demande de masques en tissu s'est faite pressante et obligatoire. Leur pari et leur objectif : confectionner en huit semaines une grosse commande de 800 000 masques en coton. Un projet citoyen, local et solidaire.
Marathon de la couture
Avant, l'endroit s'appelait "la fabrique des Grô". On y brassait du lorrain. Ce local des anciennes brasseries de Maxéville, où se tient le marché tous les jeudis, s'est transformé en unité de production textile : quatre lignes de trois coututières, blanchisseuses et opérateurs. Les machines sont flambant neuves.
Les premiers cartons se remplissent, les nouveaux venus se familiarisent avec leurs outils de travail et petit à petit la cadence arrive. Il va falloir tenir le rythme. C'est parti pour un marathon de la couture : l'atelier va tourner 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.
Avec 75 personnes en recherche d'emploi ou en insertion recrutées par le réseau de Davy Dao et des agences d'intérim du secteur de Nancy.Pour ce premier jour, on tourne autour de 5000 masques, il faut que les gens se forment et s'habituent. L'objectif c'est 15 000 par jour jusqu'au 12 juin
- Davy Dao, créateur
"Une prouesse !"
Le projet s'est monté en moins d'un mois. Début avril, le créateur nancéien Davy Dao a reçu un message du département de Meurthe-et-Moselle. Il avait le savoir-faire, restaient à trouver un local, le financement et de la main d'oeuvre. Premier objectif : fabriquer plus de 500 000 masques en tissu.Dès le début du confinement, au lendemain de la fermeture de sa boutique, le styliste et son équipe avaient proposé et fabriqué des masques gratuits avec leurs chutes de tissus.
Le tissu est récupéré et la main d’oeuvre prête à se mobiliser pour la bonne cause. Le Centre Psychothérapique de Nancy et d’autres sont vite preneurs. "On a tout le matériel pour", explique Davy.
C’était instinctif et naturel de vouloir aider le personnel soignant. On les a distribués aux personnes qui étaient en première ligne face à cette pandémie.
- Davy Dao, styliste
Tout le mois d'avril a été consacré à monter le projet : après avoir signé une commande formelle auprès de la société de Davy, le département a mis la machine en route au niveau humain, logistique et relationnel. La mairie de Maxéville a ainsi proposé le local qu'il a fallu aménager et mettre aux normes. Les agences d'intérim et le réseau peronnel de Davy ont recruté en un temps record les 75 personnes nécessaires pour assembler et empaqueter les fameux masques. Pour tenir la cadence annoncée, il a fallu aussi planifier et organiser les relais des équipes en "trois-huit".
Tissu vosgien
Les masques présentent trois couches de tissu. Les deux couches extérieures sont en coton fourni par l'entreprise textile Tenthorey d'Eloyes (Vosges). La partie intérieure est en viscose, ce qui garantit une qualité de filtration de catégorie A pour la Direction Générale de l'Armement et qui répond aussi aux normes de l'AFNOR. La particularité de ce masque :Les élastiques se passent derrière la tête, pas de frottements aux oreilles, c'est plus agréable !
- Romain Cottarel, associé de Davy Dao
Du travail pour 75 personnes
Embauchées pour deux mois, les 75 personnes recrutées pour ce projet seront rémunérées sur la base du SMIC. Avec en plus des primes pour le travail de nuit, les week-end et les jours fériés travaillés. La plupart d'entre elles étaient en recherche d'emploi ou en chômage partiel suite à la pandémie. Une aubaine à saisir pour la plupart avec en plus une volonté de participer à un projet solidaire en temps de crise. Pour Coralie, 19 ans, couturière sur ses temps de loisirs, l'apprentissage s'est fait assez rapidement :J'ai appris à enchaîner les gestes et à être plus efficace, il faut tenir le rythme !
- Coralie, nouvelle recrue à la couture
2 euros 30 l'unité
Pour Mathieu Klein, président du Conseil Départemental de Meurthe-et Moselle et commanditaire du projet, la fabrication de ces masques répondait à une demande urgente mais surtout avec une démarche citoyenne, locale et solidaire.Nous sommes à un coût de 2 euros 30 l'unité, avec 50% pris en charge par la communauté de commune et 50 % par le Département.
- Mathieu Klein, président du Conseil départemental 54
Les premiers masques seront livrés gratuitement à partir du 7 mai aux collègiens et aux agents du département. Les 568 communes et intercommunalités intéressées seront fournies par la suite sur des points de livraison qui restent à définir.