Les tiques trouvent des conditions plus favorables dans certaines régions, dont le Grand Est d’après des chercheurs de l’INRAe qui ont cartographié les régions où la tique à le plus de chance de prospérer.
"Alerte rouge aux tiques sur plusieurs régions, dont le Grand Est". Bientôt, il sera possible de bénéficier d'une carte "météo" pour les tiques comme on le fait déjà pour des événements météorologiques ou pour signaler les allergènes dans l'air. Des scientifiques de l'INRAe L'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (avec VetAgro Sup, ainsi que l'Anses, l'entreprise Boehringer Ingelheim et le Cirad), ont analysé le risque lié à la tique "Ixodes ricinus", principale vectrice d'agents pathogènes en France et en Europe.
L'équipe de recherche s'est basée sur les données récoltées dans sept observatoires caractérisés par différents climats de France métropolitaine ainsi que sur les données météorologiques et des données de l'environnement (végétation, sol…). Des campagnes d'observations complémentaires de terrain ont aussi été réalisées. Les résultats ont fait l'objet de publications scientifiques.
La région Grand Est fait partie des zones très favorables à la présence de tiques. Nous avons posé la question à Jonas Durand, Ingénieur d'Études à lINRAe Grand Est - Nancy et chercheur dans le cadre du Projet CiTIQUE, lui aussi travaille sur les tiques et en particulier sur leur présence dans nos jardins.
La région Grand Est est une zone très favorable pour les tiques. Jonas Durand pose pour nous quelques hypothèses : "Dans la région Grand Est, il y a beaucoup de forêts. Il y a une présence de chevreuils et de sangliers très importante. Le climat est un point important. Il est plutôt humide. L’altitude aussi doit jouer. Les Vosges, qui sont le point le plus haut, restent assez bas par rapport à d’autres régions montagneuses. On retrouve des conditions assez similaires de l’autre côté de la frontière, en Allemagne où les tiques sont très présentes". Sur la Carte, l’Alsace n’est pas épargnée par la présence des tiques. Mais les scientifiques ont manqué de certaines données pour en faire une cartographie au même titre que les autres régions.
35 % des tiques analysées étaient porteuses d’un agent potentiellement pathogène dans le Grand Est, 43 % en Bourgogne France Comté
Jonas Durand, Ingénieur d'Études à lINRAe Grand Est - Nancy et chercheur dans le cadre du Projet CiTIQUE
Entre juillet 2017 et Juin 2022, pas moins de 79.778 piqûres (humains et animaux) de tiques ont été signalées sur l’application CiTiques. Un chiffre qui ne cesse d’augmenter. Jonas Durand et son équipe à l'INRAe de Champenoux en Meurthe-et Moselle analysent les tiques qui sont envoyées par la population. Des données précieuses qui permettent de déterminer le pourcentage de tiques porteuses d’un agent pathogène.
Cette fois, c’est donc une carte du risque de croiser une tique, en particulier la tique Ixodes ricinus, qui pourrait transmettre la maladie de Lyme. Là, aussi, l’Est en général et le Grand Est en particulier sont plus touchés que les autres régions. "35 % des tiques analysées étaient porteuses d’un agent potentiellement pathogène dans le Grand Est, 43 % en Bourgogne France Comté", nous explique Jonas Durand.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce phénomène selon Jonas Durand : "c’est sans doute lié au climat, mais aussi aux hôtes, les animaux sur lesquels les tiques vont se nourrir, mammifères, rongeurs, oiseaux vont être le réservoir pour ces agents infectieux. On retrouve cela en allant plus à l’Est. Des études ont montré qu’il y avait encore plus de tiques et de tiques infectées dans les pays d’Europe centrale. Ce sont des endroits qui ont des biotopes assez proches de ce que nous avons dans la région Grand Est".
La chasse aux tiques est ouverte pour aider la science
La prochaine étape pour Jonas Durand est d’analyser plus de tiques pour avoir une cartographie département par département pour la région Grand Est. Plus que jamais, vous pouvez aider la science en envoyant les tiques trouvées sur vous ou vos animaux sans oublier de remplir le formulaire en ligne qui renseigne le lieu, la date et les conditions de prélèvement de la petite bête.
Les tiques au jardin, un danger pour la santé
Jonas Durand travaille aussi à la caractérisation des tiques trouvées dans les jardins avec l'opération TiquOJardin. Les tiques dans les jardins, c'est un danger potentiel auquel peu de gens se pensent exposés.
Elles sont globalement plus gorgées de sang. Ce qui indique qu’elles ont été enlevées plus tardivement. Ce qui semble conforter l’idée qu’au jardin, on fait moins attention qu’en forêt, alors que le risque existe
Jonas Durand
Et pourtant les premières observations de l'INRAe le montrent. "115 kits ont déjà été pris. L'idée est de comprendre pourquoi elles sont plus présentes dans certains jardins que dans d'autres. Nous allons aussi vérifier si elles sont porteuses d'agents infectieux et si à la même période en forêt, elles sont plus ou moins contaminées. Le risque est-il plus ou moins important ?".
Une première observation a été faite par des étudiants qui travaillent avec INRAe sur ces tiques de jardin." Elles sont globalement plus gorgées de sang. Ce qui indique qu’elles ont été enlevées plus tardivement. Ce qui semble conforter l’idée qu’au jardin, on fait moins attention qu’en forêt, alors que le risque existe. Toutes les tiques ne sont pas infectées. Mais, si elles le sont, plus elles restent longtemps accrochées à la peau, plus elles peuvent transmettre la maladie de Lyme".
L’opération TiquOjardin, c’est jusqu’au 10 juillet 2022. Les ateliers scientifiques ouverts au grand public pour analyser des tiques sont prévus à partir de septembre.