" Aux arbres citoyens ! ", France Télévisions se mobilise pour la cause des arbres ce mardi 8 novembre 2022. Cyril Galley est directeur du Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) en Meurthe-et-Moselle. Il a confiance en la science et en l'action participative des citoyens.
Dans le cadre de l’opération "Aux arbres citoyens ! ", organisée par France Télévisions ce mardi 8 novembre 2022, nous avons demandé à des scientifiques, à des observateurs de la nature et à des acteurs de la biodiversité de répondre à quelques questions.
Cyril Galley est directeur du Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) de Champenoux, près de Nancy, en Meurthe-et-Moselle. Cette association, créée en 1995 à l’initiative de salariés du centre INRA (devenu INRAe) travaille sur deux axes : la sensibilisation des publics et l’accompagnement du territoire sur ce qu’on appellera vingt ans plus tard : la transition écologique.
Le CPIE anime un lieu remarquable depuis plus de 30 ans : l’arboretum d’Amance, à la fois support pédagogique et lieu de formation. Huit hectares qui servent depuis toutes ces années à tester des essences d’arbres. Un véritable tour du monde des arbres. Depuis peu, le lieu est entièrement ouvert au public.
Arrêtons de voir la forêt à moitié vide !
Cyril Galley, directeur du CPIE
Voici les réponses de Cyril Galley à nos questions :
Que pouvons-nous faire pour les arbres ?
"Avant tout et surtout, il faut savoir que la forêt et les arbres ne se portent pas si mal, selon les endroits de notre planète. Arrêtons de voir la forêt à moitié vide ! La déforestation, des pratiques hasardeuses de plantations, la pression en matière de besoins en bois et stockage de carbone éprouvent encore plus la forêt certes, mais en France et dans plusieurs pays d'Europe, on peut s'appuyer sur l'expertise de gestionnaires, de chercheurs et d'ingénieurs, basée sur un historique robuste. En Lorraine, l'École forestière, INRAE et bien d'autres laboratoires travaillent sur les enjeux des arbres et de la forêt de demain.
Au niveau individuel, tout le monde a un rôle à jouer : les agriculteurs pour ne plus arracher les haies existantes (et replanter) ; les investisseurs immobiliers et les collectivités pour limiter l'arrachage d'arbres pour construire et bitumer.
Pour notre association, le CPIE de Champenoux, il s'agit de permettre aux citoyens de bien comprendre les arbres, leur fonctionnement, mais surtout d'interroger notre relation à l'arbre dans toute sa complexité. C'est mettre en évidence les services que les arbres nous rendent. Préserver et gérer durablement la forêt de Haye, c'est aussi réguler le climat local, stocker du carbone, disposer d'une eau de qualité ou encore produire du bois. Il s'agit aussi de se rapprocher d'eux dans leur composante sensible et sensorielle. Nous accompagnons les initiatives citoyennes dans ce sens : chantier d'entretiens et de plantations, parcours pédagogiques, atelier pour favoriser la biodiversité, concertation entre acteurs."
Que peut faire la science pour les arbres ?
"Les scientifiques disposent de plus en plus de données extrêmement précises sur l’état des forêts dans le monde, de la vision satellitaire des forêts depuis l’espace jusqu’au niveau cellulaire du bois. Faisons confiance et appuyons la communauté scientifique pour qu’elle puisse aller encore plus loin et permettre d’épauler les gestionnaires des arbres (des forêts, des villes ou de la campagne) par des scénarios d’adaptation ou d’atténuation.
Pour notre association de médiation, il s'agit de faire ce lien entre la communauté scientifique et les citoyens pour éclairer au mieux les débats sur le sujet : animations, conférences, ateliers, comme nous le faisons avec la démarche locale et multi acteurs du programme "des hommes et des arbres".
Auriez-vous une histoire d’arbre à nous raconter ?
"Le CPIE anime depuis près de 30 ans un site particulier : l’arboretum d’Amance, propriété de l’INRAE qui rassemble plus de 300 essences d’arbres des forêts tempérées du globe. Cette collection, toute proche de Nancy, a été créée en 1900 afin de tester des essences pour le reboisement des forêts du Nord Est de la France. C’était aussi et cela reste encore un espace pédagogique de formation et de sensibilisation à la nature et l’arbre.
C’est ainsi que, des essences présentes sur les huit hectares, qui n’avaient que peu d’intérêt forestier dans nos contrées, voient maintenant un regain d’intérêt depuis la nécessité de tester de nouvelles essences en forêt. 100 ans après, l’histoire se répète, mais pas pour les mêmes raisons. Le chêne de Hongrie, l’épicéa d’Orient, le Carya à noix douce intéressent les gestionnaires forestiers pour leur capacité potentielle de résilience aux aléas climatiques comme les canicules et sécheresses. Une belle preuve d’intérêt pour préserver et conserver, voire améliorer ces arboretums souvent délaissés depuis plusieurs décennies, faute de moyens."
Comment imaginez-vous 2050 ?
"2050, c’est dans très peu de temps à l’échelle humaine, mais de surcroît, à l’échelle d’un arbre ou d’une forêt. Selon les experts, les forêts ne seront plus vraiment les mêmes et continueront à changer, sans doute dans leur composition, qu'elle soit subie ou voulue par l’homme. Il va s’agir d’utiliser toutes les possibilités que nous offre la capacité de résilience et d’adaptation des arbres dans leur ensemble. La forêt de 2100 sera peut-être plus mélangée, diversifiée avec des modes adaptés de gestion afin qu’elle continue à nous offrir du bois, des activités récréatives tout en préservant les rôles de régulation essentiels qu’elles fournissent pour l’humanité.
Je rêve de milliers de citoyens qui s’engageraient dans l’entretien et dans la gestion de leur territoire de proximité aux côtés des gestionnaires. Une vision participative et engagée pour le bien-être de toutes et tous !"