Au cœur des manifestations des agriculteurs depuis le 16 janvier 2024 : la loi EGAlim. Elle est censée leur garantir des revenus décents. Pour la Coordination rurale, deuxième syndicat agricole de France, elle profite surtout à l'industrie agroalimentaire au détriment des producteurs.
Pascal Deshayes, le président de la Coordination rurale de Meurthe-et-Moselle, ne décolère pas. Il a participé aux concertations dans le cadre de la loi EGAlim, promulguée le 30 octobre 2018. Elle est censée garantir des revenus décents aux agriculteurs. EGAlim1, EGAlim2, EGAlim3, les versions se sont succédé. Elles sont, pour lui, autant de coups d'épée dans l'eau : "Ce sont l'industrie agroalimentaire et la grande distribution qui managent la profession et veulent conserver leur marge. L'État de son côté ne veut surtout pas que les prix flambent pour les consommateurs et c'est nous les agriculteurs qui dérouillons".
Pour l'éleveur de Ville-sur-Yron (Meurthe-et-Moselle), la loi EGAlim n'a rien changé pour les producteurs de matières premières que sont les agriculteurs. Ils sont coincés entre le marteau et l'enclume : écrasés à la fois par l'augmentation des charges et par les prix imposés par la grande distribution : Nous, on n'a pas le droit d'augmenter nos prix alors que les charges augmentent, que ce soit le gasoil, les engrais ou le matériel. Nous, on a acheté un tracteur il y a deux ans. On l'a payé 157 000 €. Aujourd'hui, pour le même modèle, il faut débourser 220 000 € !"
La Coordination rurale 54 demande que la loi soit déjà appliquée. Elle exige aussi plus de transparence sur la chaîne qui relie les producteurs aux consommateurs : "On demande la publication des marges bénéficiaires de l'industrie agroalimentaire, c'est-à-dire de toute entreprise quelle qu'elle soit, y compris les coopératives. On veut savoir où vont les marges et qui se goinfre sur notre dos. Et ça, on n'y arrive pas. Même l'État n'y arrive pas. C’est toujours confidentiel."
Pascal Deshayes a l'intention de porter la voix des agriculteurs en colère au niveau des institutions européennes. Il se rendra jeudi 25 janvier 2024 avec d'autres exploitants à Bruxelles pour interpeller directement les eurodéputés et les membres de la Commission européenne.