Le couturier vosgien Maël Charton prend la parole et répond aux critiques. Deux jours après le concours Miss France 2024, le créateur de la robe-table portée par Miss Lorraine ne comprend pas le déferlement de haine à son encontre. Son travail fait l'objet de nombreuses moqueries en ligne. Nous l'avons rencontré.
Maël Charton a attendu un peu avant de prendre la parole publiquement. Depuis le concours de Miss France, ce samedi 16 décembre 2023, le jeune couturier vosgien est au centre d'un déferlement de critiques et de moqueries sur internet. C'est lui qui a créé la robe-table, le costume régional porté par Miss Lorraine. Ce lundi 18 décembre 2023, Laurence Duvoid, journaliste à France 3 Lorraine, a rencontré le créateur vosgien.
Quelle a été votre réaction suite au déferlement de critiques des internautes ?
Cela avait plutôt bien commencé parce qu’au début c'étaient des blagues gentilles. Je suis le premier à faire de l’autodérision sur mon travail. Je savais qu’avec un costume un peu subversif comme celui-là, ça allait faire réagir. On connait les réseaux sociaux et leurs petites blagues. Mais très vite, c’est devenu plus sérieux, plus méchant et plus blessant. Les gens n’ont peut-être pas mesuré la portée de leurs propos mais il y a eu des réactions quand même très virulentes.
Comprenez-vous ces critiques et que répondez-vous ?
Oui et non. Je comprends que ça puisse un peu déranger, un peu perturber. C’est toujours cette petite touche que j’ajoute à mon travail. Je n’aime pas faire comme tout le monde, j’aime bien sortir des cases. Après, je ne comprends pas la méchanceté gratuite qu’il y a pu avoir, puisqu’il y a vraiment eu des commentaires qui sont allés très loin. On parle quand même, pour vulgariser la chose, d’un morceau de tissu et d’une robe qui est passée deux minutes à la télévision. Je ne rabaisse pas l’évènement mais je pense qu’il y a quand même beaucoup plus grave et important aujourd’hui dans la vie. Je trouve totalement injustifié de recevoir autant de haine. Je suis quelqu’un d’assez jeune, qui veut juste partager sa passion, qui voulait rendre hommage à la Lorraine. Je n’y habite plus depuis six ans mais j’y retourne dès que je peux parce que j’aime ma région et c’est pour cela que je voulais la représenter comme il y a six ans à Miss France.
Qu’avez-vous voulu montrer avec cette robe ?
Déjà, j'ai voulu réfléchir à quelque chose qui n’avait jamais été fait. La gastronomie n’avait jamais été évoquée dans le concours des costumes régionaux. Ensuite, j’ai voulu réfléchir à comment sublimer la Lorraine et j’ai notamment découvert que Jean-Pierre Coffe était Lorrain, je ne le savais pas. Du coup, cela m’a fait penser à l’idée de ce cuisinier et de la table de ce restaurant sur laquelle cette cheffe cuisinière, Angéline Aron-Clauss, présentait tous ses mets et spécialités lorraines.
Cette robe a été essayée par Angéline Aron-Clauss et validée par le comité ?
Oui, j’ai eu des retours de Stéphanie Didon, la directrice du comité Miss Lorraine. J’ai eu des retours d’Angéline elle-même qui, une fois son élection, à la découverte de mon costume, a dit qu’elle était très pressée de l’essayer, que le dessin était très prometteur et que l’idée lui plaisait beaucoup. Et lorsque nous avons pu nous rencontrer courant octobre, pour le premier essayage de la robe, elle a eu exactement la même réaction. Elle était assez impressionnée de la qualité du travail car il y a beaucoup de choses qui ont été faites à la main sur ce costume. Dès qu’elle a essayé la première toile que j’avais faite pour l’essayage, elle a commencé à déambuler dans le salon de mes parents, toute heureuse en dansant avec sa robe. Je savais que ça allait marcher et j’étais rassuré qu’un costume original comme celui-là ne l’effraie pas.
Quels enseignements tirez-vous de ce déferlement de haine ?
Je ne pense pas que cela va perturber mon travail. C’est sûr que ça a été émotionnellement un peu compliqué de recevoir autant de critiques mais je suis le premier à souvent remettre mon travail en question et honnêtement, pour la première fois depuis longtemps, j’ai moi-même été étonné du rendu de mon travail à la télé. J’étais très heureux, très fier de moi et je continuerai à le dire. Mais cela ne va pas changer ma manière de faire. Loin de moi l’idée de me comparer à ces gens mais mes modèles sont Jean-Paul Gaultier, Lady Gaga. Ce sont des gens qui ont bousculé, qui ne se sont jamais vraiment excusés de faire ce qu’ils aimaient faire. Ils ont toujours assumé. Générer autant de buzz, ça me pousse à assumer. Ça fait parler. Qu’on parle de moi en bien ou en mal, au final, on en parle. Oui, j’aime bien bousculer les esprits, essayer de remettre en question, interroger et faire avancer les choses tout simplement. Donc non, cela ne va pas changer ma manière de créer, cela va même peut-être la pousser encore plus.