C’est le projet d’une ville idéale que soumet au financement participatif l’artiste nancéien Rarès-Victor. Une cité plus verte et plus solidaire dans laquelle les particuliers accepteraient de mettre leurs caves inoccupées en plantations pour que la verdure envahisse les façades.
C’est un artiste citoyen à la frontière de la peinture, de l’architecture et de l’écologie, comme la Renaissance italienne en produisait. Il y a vingt ans, Rarès-Victor quitte Brasov, au cœur des Carpates, pour venir étudier à l’Ecole nationale supérieure d’art et de design de Nancy. Aujourd’hui, il enseigne au Centre international d’art verrier de Vannes-le-Châtel et multiplie les projets écocitoyens.
Pour le dernier ''Caves vertes pour nous tous!", il lance une "éco-cagnotte" sur internet en ce mois de janvier 2021. Il s’agit de planter dans ces caves des arbres qui auraient atteint une hauteur d’homme en pépinières, dans du sable ou à même la terre battue. Pour qu’ils puissent continuer à pousser à l’extérieur et que leur feuillage colonise les façades. Sur ses simulations, les rues grises se peuplent tous les 30 mètres de vigne vierge, de glycine ou même de poirier en partie basse des murs.
Réservoir d’eau
Des vieilles caves à charbon qui ont une fenêtre au ras du trottoir, il y en a plein à Nancy. "Enormément de caves sont à l’abandon mais elles contiennent un trésor inestimable : leur taux d’humidité".
A une époque où les villes sont de plus en plus minérales et ou les températures augmentent l’eau va devenir une denrée essentielle. "La végétalisation des façades des rues est propre à concilier enjeux écologiques – maîtrise de l’eau, baisse de la température localement, insonorisation, préservation de la faune (insectes, oiseaux) – et plaisir esthétique : véritable bijou de ville, la nature est ici raffinement du milieu urbain", précise-t-il dans son dossier de présentation.
Artistes engagés
Lui qui travaille beaucoup en peinture sur le rapport entre intimité et monde extérieur y voit aussi une démarche artistique. "La cave c’est aussi le lieu de toutes nos craintes, de l’obscurité. Elle fait peur mais elle peut aussi donner des espoirs pour le futur".
Quand on lui demande si un artiste doit être citoyen, il répond: "Aujourd’hui, avec les confinements, on voit bien ce que veut dire le vide quand les artistes manquent à l’appel. Quelle pauvreté si on ne fait que travailler et rentrer dormir".
Recréer du lien social
En ville, si on devenait le paysan qu’on n’est pas ?
Rarès-Victor a soumis son projet à la ville et à la métropole de Nancy. Il aimerait lancer des essais dans trois quartiers différents mais surtout que les habitants se l’approprient et recommencent à agir sur leur milieu de vie. Qu’un immeuble organise des cours de taille de fruitiers, que d’autres voisins réinvestissent leur cave pour y faire pousser des endives ou des champignons pourquoi pas. "Il faut que ça devienne un acte citoyen", martèle-t-il.
Alain Souchon dit qu’on peut changer les hommes avec des géraniums. Rarès-Victor, lui, veut y croire. Qui a dit qu’un artiste n’était pas essentiel ?