Rencontre avec de jeunes lorrains, étudiants en cinéma et audiovisuel, qui réalisent une web-série documentaire sur les migrants et les mineurs non accompagnés de Nancy. Pour les aider à réaliser leur projet ambitieux, ils ont lancé une cagnotte en ligne.
Début juin, France 3 Lorraine assiste au recours du jeune Mamadou, à la Cour administrative d’appel de Nancy. Ce jeune guinéen de 18 ans, élève brillant, fait en effet l’objet d’une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) et risque l’expulsion à tout moment. Sur le parvis du tribunal, trois jeunes nancéiens, caméra au poing, micro à la main, sont venus interroger Mamadou. Ils ne sont pas journalistes, ils sont étudiants en cinéma et audiovisuel et réalisent une web-série documentaire sur les migrants et les mineurs non accompagnés de Nancy.
Une éducatrice à l’origine du projet
À l’origine de cette entreprise courageuse, Laurence Faure, éducatrice spécialisée depuis trente-deux ans. Le but du projet, donner la parole aux jeunes qu'elle suit, des mineurs non accompagnés, c'est-à-dire les moins de 18 ans séparés de leurs représentants légaux sur le sol français. "On parle souvent sur eux, mais on leur donne rarement la possibilité de parler d’eux. Leur donner la parole c’était leur laisser le jeu pour qu’ils puissent exister dans ce qu’ils sont", explique l’éducatrice. L’idée germe d’abord dans son esprit puis elle contacte les étudiants de Master 1 en audiovisuel et cinéma de l’Institut Européen de Cinéma et d’Audiovisuel (IECA) de Nancy.
On parle souvent sur eux, mais on leur donne rarement la possibilité de parler d’eux.
Yazid Moustaïd, étudiant de 21 ans à l’IECA et réalisateur en herbe, nous raconte admiratif le travail de cette éducatrice spécialisée: "Laurence crée un lien de confiance très fort avec ces mineurs non accompagnés. Sa personnalité et son courage font que, grâce à elle, nous avons pu accéder à ces jeunes pour réaliser ce projet". Au total, six étudiants de l’IECA, passionnés d’audiovisuel, ont rejoint le projet.
L'adolescence quand on a dû quitter son pays
La web-série documentaire "Nos Meilleures Années" dresse le portrait d’un MNA (mineur non accompagné) par épisode. L’amitié, la communauté, la colère, les doutes, l’avenir ou encore l'attachement au pays font partie des thématiques abordées. La priorité, être le plus fidèle à la personnalité de chacun et ne pas sombrer dans le voyeurisme. D’autres enjeux essentiels à la compréhension du parcours de ces migrants, âgés de 15 à 18 ans, sont mis en avant, comme les démarches administratives auxquelles ils sont confrontés ou les moyens déployés pour les soutenir. "À la base ce qui m’intéressait, c’était de réaliser un projet de A à Z et la thématique de l’immigration. Mais j’étais loin de m’attendre à de tels échanges, c’est encore plus riche que ce à quoi je m’attendais", avoue Léna Guichard, 22 ans, co-réalisatrice de "Nos Meilleures Années".
Nous souhaitons leur rendre hommage, sans être voyeuristes.
"On parle d’adolescence, d’expériences universelles. Ça nous touche beaucoup, les jeunes que nous avons rencontrés sont tous absolument incroyables et fascinants, on est presque familiers de par la proximité d’âge. Nous souhaitons leur rendre hommage, sans être voyeuristes. On peut en dire plein de choses de façon subtile, c’est important pour moi car mon père est lui même immigré", confie Yazid Moustaïd, l’un des co-réalisateurs. "Ils ont été très émus en voyant les images du teaser, ils sont encore plus motivés pour le projet. Ça nous touche beaucoup. C’est une des meilleures récompenses", ajoute le Nancéien.
Une cagnotte en ligne pour soutenir la web-série
Caméras, trépieds, enregistreurs, cartes SD, piles ou encore frais de transports engendrés par les déplacements, tout est à la charge des étudiants réalisateurs. C’est pourquoi, ils ont décidé de créer une cagnotte en ligne pour les aider dans leur dépenses. Le tournage de la web-série aura lieu jusqu’à fin juillet et le montage en août. Sa sortie est prévue pour début septembre 2021, sur Youtube.
La web-série sera composée de 10 à 15 épisodes en tout. Un travail ambitieux et prometteur, que des producteurs ont déjà repéré. Ils pourraient même financer un long-métrage l'année prochaine.