Le Professeur Cyril Schweitzer du CHRU de Nancy, président de la société pédiatrique de pneumologie et d'allergologie est un des 7.000 signataires de la lettre ouverte adressée le 22 octobre à Macron pour alerter sur la situation alarmante de la pédiatrie. Il réagit à l'annonce du ministère de la Santé de débloquer 400 millions d'euros.
Professeur Cyril Schweitzer, comment réagissez-vous à l'annonce, le 2 novembre 2022, de François Braun, le ministre de la Santé, d’allouer 400 millions d'euros à la filière pédiatrique ?
C’est une bonne nouvelle. On ne peut que se réjouir de cette arrivée d’argent. La bonne nouvelle est aussi la réintégration des puéricultrices, infirmières spécialisées dans les soins de l’enfant dans la prime de réanimation. Elles en avaient été exclues en octobre 2021. Cela avait été vécu comme une profonde injustice.
Cela dit, et comme je l'avais déjà évoqué dans une interview du 22 octobre 2022, le problème qui nous touche n’est pas une question de financement ponctuel, mais de réorganisation globale de l’hôpital.
Le problème serait moins financier que structurel ?
Une arrivée d’argent frais est toujours bienvenue mais ne solutionnera pas le problème de fond, car nous ne trouvons pas de personnel à recruter. C’est un problème d’attractivité, de valorisation des métiers de santé et surtout de réorganisation de la filière hospitalière sur le long terme.
Quelle est la situation aujourd’hui au service pédiatrie du CHRU de Nancy ?
A ce jour, mon service est complet. Comme nous sommes en période de vacances scolaires, nous avons moins de chirurgies programmées, ce qui a permis de libérer des lits. Grâce au financement d’heures supplémentaires par la direction du CHRU, nous avons aussi activé douze lits de plus: nous sommes passés en réanimation de 14 à 20 lits et de 12 à 18 lits en médecine.
Malgré cet effort, une vingtaine d'enfants se retrouvent en dehors des capacités d'accueil normales et sont hébergés dans d’autres services, ce qui n’est pas rien.
Concernant l'épidémie de bronchiolite, quelle est la situation à Nancy ?
Ca continue à monter. Elle est précoce et importante, mais pas supérieure aux autres années. Cette épidémie est le facteur qui aggrave la situation dans une filière pédiatrique déjà précaire, avec des personnels épuisés.
Etes-vous sollicités par les hôpitaux débordés de la région parisienne ?
Le SAMU 75 nous appelle tous les jours pour savoir si nous avons des lits disponibles. C’est une gestion au jour le jour.
Hier par exemple, il aurait été impossible d’accueillir des enfants en réanimation, toutes nos places étaient occupées. Pour le moment les enfants de la région francilienne sont envoyés vers des hôpitaux proches de Paris comme, Reims et Rouen.
Au printemps 2023 le ministère de la Santé organisera Les Assises nationales de la pédiatrie, qu'en attendez-vous ?
Nous verrons la forme exacte que ces Assises nationales prendront. Il faudra dans un premier temps remettre à plat le problème de la structuration générale des soins à l’hôpital puis, pour ce qui me concerne, de la filière pédiatrique.
Ma conviction est que des choix devront être faits au niveau de l’organisation globale pour rendre le système plus efficace.