Entre les files d’attente interminables et les stations-service "à secs" depuis plusieurs jours, il est devenu difficile de se déplacer en voiture. Certains salariés ne peuvent même plus se rendre sur leur lieu de travail. Mais pour autant pouvez-vous être sanctionné ? Quels sont vos droits ? Antoine Loctin, de CL Avocats à Nancy (Meurthe-et-Moselle) répond à nos questions.
Alors qu'un peu moins de 30% des stations-service rencontrent encore des difficultés d'approvisionnement mardi18 octobre 2022, tout le monde redoute la panne sèche. Depuis près d'un mois, cela inquiète surtout les salariés qui se rendent sur leur lieu de travail en voiture.
Sinon, il y a bien sûr les transports en commun, la marche à pied, le vélo, le covoiturage ou encore le télétravail... Mais pouvons-nous aussi tout simplement rester à la maison ? Antoine Loctin de CL Avocats-Nancy (Meurthe-et-Moselle) répond a nos questions.
Tout d'abord, simplement, que prévoit la loi ?
"D’emblée, il faut préciser qu’aucune loi n'encadre ce cas de figure. Le seul cadre légal existant est celui selon lequel un salarié n'est pas rémunéré s'il ne vient pas travailler. Dans ces conditions, il ne faut pas raisonner en termes de droit pour le salarié mais plutôt en termes de limitation de son éventuelle faute dans l’accomplissement de ses obligations contractuelles en raison de son absence ou de son retard.
Avec le prétexte de situation de "force majeure" ou de "l'impossibilité de me déplacer" ?
"Bien sûr on pourrait être tenté d’opposer l’idée "d’une force majeure". Mais cette notion ne semble pas adaptée puisqu’elle ne s’applique qu’en cas d’évènement qui échappe au contrôle des individus, insurmontable et imprévisible. Ce qui ne semble pas être le cas dans la mesure où les difficultés d’approvisionnement des stations-service restent prévisibles".
En attendant un retour à la normale, les automobilistes tentent de s’adapter. En effet, si je ne peux pas aller au travail, s'agit-il d'un abandon de poste ? Faut-il justifier son retard ou son absence ?
"Dans la mesure où le principe de la bonne foi est toujours présumé en droit du travail, ne pas pouvoir se rendre sur son lieu de travail en raison d'une pénurie de carburant n'apparait pas sanctionnable à partir du moment où le salarié justifie son absence. Il faut donc apporter les preuves de l’incapacité de se rendre sur son lieu de travail (photographie datée de sa jauge d’essence vide, de la file d’attente à la station-service, etc.). Ces justifications peuvent donc éviter une inexécution fautive du contrat de travail.
Attention toutefois : l’employeur pourrait, le cas échéant, faire valoir que, d’une part, le salarié pouvait prendre les transports en commun pour se rendre sur son lieu de travail, d’autre part, remettre en cause la véracité des éléments de preuve apportés par le salarié.
Dans la mesure où le principe de la bonne foi est toujours présumé en droit du travail, ne pas pouvoir se rendre sur son lieu de travail en raison d'une pénurie de carburant n'apparait pas sanctionnable à partir du moment où le salarié justifie son absence.
Antoine Loctin, de CL Avocats à Nancy
Les patrons peuvent-ils demander, ou imposer, de poser une journée de congé ou de RTT ?
"Enfin, depuis les confinements, on peut négocier une éventuelle période de télétravail avec son employeur si le salarié ne peut se déplacer. En revanche, lorsque la mise en place du télétravail est impossible, il reste l’ultime levier à savoir poser une RTT."
Depuis le lundi 17 octobre, le gouvernement procède à de nouvelles réquisitions pour alimenter les stations-service en carburant. La situation s'est légèrement améliorée.