Après deux années blanches, la Foire Expo de Nancy a lancé son édition 2022 samedi 4 juin. Alors que les prix ne cessent d’augmenter, les visiteurs sont plus regardants à l'achat tandis que les exposants accusent le coup de l’augmentation des prix de leurs matières premières.
Les deux dernières éditions de la Foire Expo de Nancy n'avaient pas pu avoir lieu en raison de la crise sanitaire. Samedi 4 juin 2022, elle a rouvert ses portes, et ce jusqu’au 12 juin. Dans les allées des quelque 400 exposants, les premiers visiteurs déambulent et profitent de ce rendez-vous retrouvé. Mais avec une inflation galopante, bien partie pour durer, la plupart des acheteurs font plus attention aux prix avant d’acheter.
Aurélie et Jérémy, 38 ans, sont des fidèles de la Foire Expo. S’ils viennent profiter des animations qu’offrent l’événement avec leur fils, ils sont aussi à la recherche d’ameublement pour leur terrasse. Avec l’augmentation des prix, ils ont déjà dû changer de supermarché afin de faire des économies.
Alors à la foire, ils sont attentifs aux prix. “Nous allons peut-être revoir à la baisse certaines prétentions”, explique Aurélie. “Nous savons que les prix vont continuer à augmenter donc nous allons faire des comparatifs et peut-être acheter rapidement avant que les prix n’augmentent trop”, détaille cette directrice d’hôtel.
Dans le hall des artisans, Virginie et Romain, mère au foyer et intérimaire dans l’industrie, ont fait quelques achats. Dans leurs sacs : du vin, de la viande et des tasses. Le reste de l’année, le couple et leurs deux enfants se serrent la ceinture. “On consomme local, on ne part pas en vacances, on ne mange pas au restaurant. Donc aujourd’hui à la foire, on veut se faire un peu plaisir”, confient-ils.
Faire attention aux prix, une habitude
Au stand des motos, Jean-Luc, magasinier cariste, et sa femme Bernadette, sans emploi, s'attardent. “On aimerait bien une moto mais c’est un peu cher et ça veut dire une assurance et du carburant. Ça freine !”, constate l’homme de 58 ans pour qui la Foire Expo est une tradition depuis l’enfance.
“Tous les prix ont flambé donc on est plus regardant, on peut supprimer le superficiel”, constate de son côté Stéphanie, 50 ans et préparatrice en pharmacie. Même son de cloche du côté d’Evelyne, retraitée. “On est bien obligé de faire attention aux prix, tout augmente ! Mais ça fait du bien de sortir un peu”, fait remarquer la femme de 70 ans.
D’autres visiteurs, comme Guillaume et ses parents ont “toujours fait attention aux prix”. A la recherche d’un nouveau portail, cet analyste développeur de 40 ans, pochette bleue sous le bras, a déjà demandé deux devis à des exposants et prendra le juste prix. Léa et son compagnon Sylvain, quant à eux, ont fait le plein de charcuterie, fromage et spiritueux. “On ne regarde pas les prix”, avoue la jeune femme, heureuse de faire le plein de produits artisanaux qu’elle ne trouve pas dans les commerces de ville.
Inflation à 5,2% : un nouveau record depuis 1985
En mai, sur un an, les prix ont augmenté de 5,2%. Un nouveau record pour l’inflation en France depuis 1985. François Werner est président du conseil d’administration de Destination Nancy, en charge la gestion et l’exploitation du Parc Expo. “La vie devient chère, c’est pour cela qu’il ne faut pas proposer qu’une activité strictement commerciale” à la Foire Expo, estime-t-il. Bien conscient que l’inflation pourrait jouer sur les ventes cette année, il ajoute : “On vient ici passer du temps, une belle journée, acheter juste : juste le produit dont on a vraiment besoin, et au juste prix.”
Du côté des exposants, certains secteurs sont plus touchés que d’autres par l’augmentation des prix des matières premières. A l’image d’Audrey, créatrice de vêtements et d’accessoires. Pour la première fois depuis la création de sa marque “L’araignée du soir” il y a six ans, elle “[s]e demande si [elle ne va] pas devoir arrêter [son] activité”. L’artisane constate que les acheteurs sont plus réticents à l’idée de dépenser de l’argent dans du superflu.
Augmenter ses prix ou adapter sa production
“Dans le textile, toutes les matières premières ont augmenté. Les tissus mais aussi les fermetures, les boutons et les élastiques”, énumère la jeune femme de 37 ans. Le tissu qu’elle utilise pour fabriquer ses trousses est passé de “six à neuf euros le mètre depuis le Covid” par exemple.
“Je n’ai pas du tout augmenté mes prix. Mais j’ai systématisé ma production. Je fais moins de pièces uniques et plus de séries. Je fais aussi plus attention à ne pas gâcher trop de tissu lors de la découpe”, détaille-t-elle. A mois égal, par rapport à 2019, elle explique réaliser seulement “un tiers de [s]on chiffre d’affaires”. “Je vais voir à la fin de l’année si je vais finalement devoir augmenter mes prix ou non”, souligne Audrey.
Dans le secteur du haut de gamme, on s’inquiète un peu moins même si on subit également l’augmentation des prix. Ludovic Leblanc est le PDG de Como Cucine, spécialiste de cuisines. “Le prix du carton, dans lequel nos meubles sont emballés, a doublé en deux ans. L’essence et l’électricité ont aussi augmenté or nos usines ont besoin d’énergie. Le bois et l’aluminium ont également augmenté”, observe-t-il.
Résultat, les prix de ses meubles de cuisine “ont augmenté de 15 à 20%”. “A la rentrée, je pense qu’on va avoir une petite baisse des ventes”, estime le PDG de l’entreprise présente à la foire depuis quinze ans.