Depuis le 1er juillet 2021, une nouvelle version du diagnostic de performance énergétique est en vigueur pour tous les logements mis en vente ou en location. Une méthode plus fiable, basée non plus sur la seule consommation énergétique, mais sur les caractéristiques du bâti.
C'est un système d'évaluation qui existe depuis 2006 : le diagnostic de performance énergétique, plus communément appelé DPE. Il permet de classer les logements mis à la location ou à la vente, selon leur consommation d'énergie et leur impact en termes d'émissions de gaz à effet de serre. Le tout sur une échelle allant de A à G.
Déjà réformé une première fois en 2013, ce diagnostic a fait l'objet d'une deuxième réforme qui s'applique depuis le 1er juillet 2021. Il est désormais plus strict, plus fiable, même s'il est critiqué, et il prend un caractère opposable. Cela signifie que s'il est mal réalisé ou s'il est erroné, le diagnostiqueur peut faire l'objet de poursuites judiciaires. C'est un des thèmes abordé dans notre émission "Enquêtes de région", sur les chantiers de l'immobilier.
Comment se déroule un diagnostic ?
Que ce soit dans le cadre d'une vente ou d'une location, le DPE est obligatoire et fait partie d'un dossier de diagnostic technique (DDT). Il doit être effectué par un diagnostiqueur indépendant et certifié.
Et si on n'a pas de factures, il va falloir contrôler par d'autres moyens. Et si on ne peut pas vérifier ça défavorise le client.
Stanislas Lecolier, diagnostiqueur
Stanislas Lecolier est diagnostiqueur depuis 14 ans en Meurthe-et-Moselle. Pour réaliser ce nouveau DPE, il va demander à ses clients, dans le reportage Stéphane Di Rezze, un maximum de factures relatives aux travaux d'isolation et de chauffage. Là où, auparavant, seules les factures de consommation énergétiques faisaient foi, il doit désormais recueillir et contrôler toutes les informations utiles au futur acquéreur ou locataire sur la consommation, les mesures d'isolation et de chauffage de toute la maison.
Tous les propriétaires ne sont pas aussi organisés que son client du jour : " une des difficultés du diagnostic, c'est que ce sont les factures qui nous orientent sur l'isolation. Et si on n'a pas ces infos, il va falloir contrôler par d'autres moyens comme démonter une prise électrique et voir l'isolation derrière. Et si on ne peut pas vérifier, le mur sera caractérisé comme "inconnu" et ça défavorise le client, car cela peut baisser la note finale".
Jusque-là purement informatif, le diagnostic pouvait laisser quelques flous ou se contenter des déclarations des propriétaires. Le DPE devenu opposable, les diagnostiqueurs préfèrent signaler tout manque et parfois sous-noter faute d'informations fiables. Pour le client ou le locataire, c'est gage de fiabilité, charge au propriétaire de prouver la qualité de son bien.
Les logements classés en A et B prennent de la valeur
Jacky Dal Lago, ancien président de l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) en Lorraine est opposé à ce nouveau système. Il estime que " le nouveau DPE fait perdre une classe pour 70 % des cas" (voir en format PDF, le nouveau DPE présenté en dix points).
Plus fiables, plus précis, plus uniformisés, les DPE sont devenus un argument central pour les ventes et les locations. Me Dominique Bravetti, notaire et membre de l'Observatoire de l'immobilier, constate : " D, qui était plutôt une bonne note avant et qui représentait dans notre région 35 % du volume des transactions, est devenue une note médiocre. Quand on passe en E, on est mauvais. Avec F et G on est dans les logements trop énergivores ou perçus comme pas performants."
Il poursuit : " les prix des maisons anciennes fluctuent aussi en fonction de la note. Les logements classés en A et B prennent de la valeur et les autres non. Et F et G, les passoires thermiques subissent une moins-value qui peut aller de - 10 à -15 %."
Ce que constate aussi Gaëlle Bona, agent immobilier à Nancy. Si elle considère que le DPE est un bon outil d'information, elle voit que " ça donne un argument aux éventuels acquéreurs pour essayer de négocier. Mais nous, si l'estimation est bien faite, on a déjà tenu compte de ça pour fixer le prix de départ."
La chasse au gaspi des passoires énergétiques
La location des logements catégorisés en G est de plus en plus contraignante. En 2022, les propriétaires de ces logements se sont vu interdire d'augmenter les loyers. Dès 2023 pour les plus énergivores d'entre eux, et dès 2025 pour tous les logements classés G, ils seront purement et simplement interdits à la location.
Dans l'incapacité de les louer, les propriétaires vont devoir se résoudre à remettre leurs biens sur le marché de la vente. Ce qui pourrait faire baisser la tension sur certains secteurs.
Il faut que l'état aide davantage les petits propriétaires pour la rénovation
Jacky Dal Lago, UNPI Lorraine
Jacky Dal Lago, de l'UNPI Lorraine s'explique : " nos adhérents ont un à deux biens. Souvent, ils sont retraités et c'est un complément de retraite. Si vous retirez à quelqu'un qui a 800 ou 900 euros de retraite par mois le prix d'un loyer, l'impact est fort. Ils n'ont pas toujours les moyens d'engager les travaux de réhabilitation. Donc c'est une double peine pour eux. Il faut que l'Etat les aide davantage pour la rénovation." Il estime qu'un tiers des propriétaires de plus de 80 ans vont devoir se résoudre à remettre leurs biens sur le marché faute de pouvoir rénover.
Rebattre les cartes et rénover
L'horizon 2025 s'approche à grands pas et les propriétaires ont le choix entre effectuer les rénovations ou remettre leurs maisons et leurs appartements classés G sur le marché de la vente. Les mêmes exigences environnementales s'appliqueront en 2028 pour les logements classés F et en 2034 pour les classés E. Les carnets de commande des artisans se remplissent.
Olivier Dieudonné, président de la FNAIM Lorraine, souhaite des adaptations : "2025, c'est court et c'est ambitieux". Dominique Bravetti conforte ce propos : "l'intention est louable, mais il ne faudrait pas qu'il y ait trop de gens qui restent sur le côté."
C'est toute l'ambition des normes mises en place dans le cadre de la loi Climat et Résilience et de la politique énergétique définie au niveau européen : réduire au maximum l'impact du logement sur l'environnement en réduisant la consommation d'énergie des bâtiments et en limitant les émissions de gaz à effet de serre. Aujourd'hui, le secteur du bâtiment est responsable de 43 % des dépenses énergétiques françaises et de 23 % des gaz à effet de serre.