Depuis deux ans, les Restos du Cœur de Meurthe et Moselle ont investi dans un camion itinérant pour éviter les zones blanches de la distribution. Trois jours par semaine, ce sont les communes du sud-est du département : Badonviller, Blâmont, Ogéviller et Val et Châtillon qui sont desservies. Une belle initiative pour aller vers des bénéficiaires isolés en milieu rural et lutter contre l’isolement social.
C’est devenu un rituel. Chaque mardi matin, un peu avant 8 heures, deux bénévoles des Restos du Cœur prennent la route au volant de leur camion itinérant, plein à craquer de denrées alimentaires en tout genre, à destination des bénéficiaires, vivant en zone rurale et n’ayant pas la possibilité de se déplacer au centre de distribution le plus proche.
30% de bénéficiaires de plus en un an à Blâmont
Direction Blâmont, dans le sud-est du département de la Meurthe et Moselle, une commune de 1.000 habitants qui compte 110 bénéficiaires en ce début de mois février 2022, soit 30 % d’augmentation en un an. La crise du Covid ayant appauvri un secteur déjà bien sinistré en termes d’emploi.
"C’est vrai que c’est très difficile ici, au niveau de l’emploi. L’année dernière, on était à 80 bénéficiaires, cette année, on est à 110, le bouche à oreille fonctionne bien," explique Jean-Pierre, entre deux personnes à servir. "Avec la crise Covid, les riches se sont enrichis de plus en plus et les pauvres se sont appauvris de plus en plus, on le voit très clairement ici." poursuit le bénévole.
"Ils viennent à la campagne pour espérer avoir des loyers moins chers, une vie moins chère, alors qu’en fait, ils s’isolent. La plupart n’ont pas de voiture donc l’impossibilité de trouver un emploi : c’est un peu le chat qui se mord la queue", raconte Maryline Lemaire, bénévole aux Restos du Cœur.
Le fait de venir à la campagne, c’est pas vraiment ce qui va les sortir de leur précarité.
Maryline Lemaire, bénévole aux Restos du Coeur 54
A Blâmont, les loyers sont forcément plus attractifs qu’à Lunéville, la ville la plus proche, située à 60 kilomètres. L’on peut y trouver un logement de 100m2 pour 300 euros par mois. Il n’en suffit pas plus pour que de jeunes couples avec enfants, en manque d’espace, franchissent le pas pour s’installer à la campagne. Se pose alors le problème des déplacements, outre celui de fins de mois difficile. Alors, la venue du camion itinérant des Restos du Cœur est une vraie aubaine pour ces bénéficiaires.
Quand on a le permis, mais pas de voiture, c’est très pratique sinon on ne pourrait pas bénéficier des Restos du Cœur. Sans eux, je ne finirais pas le mois.
Une jeune maman, bénéficiaire
Sauf que voilà, l’isolement s'y fait davantage ressentir.
Parmi les bénéficiaires qui se sont déplacés ce mardi 1er février au matin, quelques jeunes couples avec enfants, des familles monoparentales et des retraités également, aux faibles pensions. Pas d’étudiants contrairement aux zones urbaines, avec cette autre singularité : ces bénéficiaires de Blâmont sont quelque part décomplexés d’être inscrits aux Restos du Cœur. Ils s’y retrouvent depuis deux ans, chaque mardi pour faire le plein de courses. Un peu comme s’ils se rendaient au supermarché du coin, comme Huguette, qui veut bien reprendre des petites saucisses et des pâtes.
C’est formidable qu’ils passent ici. On n’a pas de voiture. Ca m’aide bien, je suis toute seule, franchement ça me dépanne. Je ne sors pas de chez moi, ça me permet de discuter avec eux, on rigole des petits coups : franchement, c’est sympa
Huguette, bénéficiaire des Restos du Coeur de Blâmont
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Tout le monde devrait le faire
Jean-Marie est bénévole aux Restos du Cœur depuis 18 mois, aussitôt sa retraite prise.
Lui reste dans le camion où il effectue la distribution des produits congelés (viande, poisson) ainsi que des conserves. Les légumes sont distribués par d’autres bénévoles, à l’intérieur de la médiathèque, mise à disposition des Restos par la mairie. Un vrai local où les bénévoles proposent aux bénéficiaires de se poser et de prendre un café, pour celles et ceux qui le souhaitent.
"Je les adore, c’est mes amours", rigole Huguette, en parlant des bénévoles.
"Je pense que tout le monde devrait le faire à un moment où à un autre. On leur apporte une aide alimentaire mais on passe beaucoup de temps à discuter. On devrait tous être capable d’aider son voisin, on se rend compte que même à la campagne, il n’y a plus de solidarité. Et les bénéficiaires qui viennent aux Restos, ils sont hyper isolés. Et pour nous, c’est une expérience de vie très enrichissante" poursuit Maryline Lemaire.
Le camion itinérant des Restos du Cœur arrive chaque mardi à 9 heures, il se stationne à proximité de la médiathèque du village et y reste jusqu’à 15h30 pour permettre aux 110 bénéficiaires recensés de venir s’approvisionner.
D’autres villages du département de la Meurthe-et-Moselle sont également desservis par le camion itinérant des Restos du Cœur : Badonviller, Blâmont, Ogéviller et Val-et-Châtillon . Avec à chaque fois, cette chaleur humaine et ce don de soi, propre aux bénévoles des Restos, pour être au plus près de ceux, qui n’ont pas les moyens de se déplacer.
