Après la mise en faillite de leur maison-mère British Steel en mai, les 440 salariés du site sidérurgique savaient qu’ils allaient changer de propriétaire avant la fin de l’année 2019. C'est le groupe chinois Jingye qui a été choisi par le mandataire britannique.
Insolvency Service, l'organisme public britannique chargé de la faillite de British Steel a annoncé lundi 11 novembre 2019 qu' " un contrat de vente a été passé avec Jingye Steel (…) pour racheter les activités et actifs de British Steel Limited (BSL), y compris les aciéries de Scunthorpe (nord de l’Angleterre), les fonderies britanniques, des parts de FN Steel BV (filiale aux Pays-Bas) et British Steel France Rail ".
Ce conglomérat chinois, qui est également présent dans d’autres secteurs économiques comme le tourisme ou l’immobilier, produit déjà 15 millions de tonnes d’acier par an. Il rachèterait donc une grande partie des actifs de British Steel. Le montant du rachat n’a pas été précisé, mais d’après plusieurs sources dont la BBC et Reuters, il pourrait s'élever à 70 millions de livres soit 81,2 millions d’euros.
Un si long feuilleton
Le rachat de l'usine à rails d'Hayange c’est un feuilleton comme la sidérurgie en produit désormais régulièrement.Condamnée jusque dans les années 80 à rester éternellement sous la coupe de barons de l’industrie, la sidérurgie est aujourd'hui habituée à voir ses entreprises disparaitre, fusionner, se racheter… A un rythme qui s’accélère de manière effrénée. Pendant plusieurs siècles elle a été considérée comme une industrie lourde, avec des cycles longs, et des investissements à long terme: depuis les années 90, jamais les usines lorraines n’avaient changé aussi souvent de propriétaire. Et parmi toutes, celle d’Hayange bat tous les records: cinq propriétaires en vingt ans!
Fini British Steel
En mai dernier, la justice britannique a mis en faillite la maison-mère de l’usine d’Hayange, British Steel, qui avait racheté en 2014 une grande partie des actifs de TataSteel en Grande Bretagne et sur le continent.C'est le groupe chinois Jingye qui a été finalement choisi par le mandataire britannique. Le fonds de pension turc Oyak avait pourtant tout pour devenir le nouveau propriétaire de l’usine à rails mosellane, qui lamine notamment les rails des lignes à grande vitesse. Celui-ci avait fait une offre fin août 2019 et obtenu des négociations exclusives avec le mandataire britannique chargé de liquider les actifs de British Steel.
Mais selon le quotidien Les Echos, les fournisseurs de British Steel auraient refusé de revoir à la baisse le prix de leurs contrats, mettant fin aux négociations avec les Turcs, fin octobre.
Le compromis de vente comprend des clauses suspensives, liées notamment à des aides promises par le gouvernement anglais. Le rachat de l'usine d"Hayange doit également obtenir le feu de vert du ministère de l'économie français puisque la fabrication des rails est considérée comme une activité stratégique. L'acte de vente définitif ne devrait donc pas être signé avant la fin de l'année 2019 ou le début 2020.
A la découpe ?
Début décembre 2019, des annonces ont paru dans le Financial Times et le journal français Les Echos pour proposer à la vente une entreprise non identifiée "située dans le nord-est de la France et spécialisée dans la production de produits ferroviaires en acier pour chemins de fer, métros et tramways ". Ces annonces relancent l'hypothèse d'une vente séparée de l'usine d'Hayange, option qui serait nourrie par une opposition du gouvernement français à la vente au groupe chinois.
La CFDT, majoritaire sur le site d'Hayange, a exprimé ses doutes et son incompréhension dans un communiqué de presse paru le 5 décembre 2019 : " nous offrir seul sur un plateau en argent à Liberty ou Olympus, des gens que nous connaissons bien et qui ne veulent pas que du bien à notre usine, nous nous posons vraiment la question de la moins pire des options pour notre laminoir avec les Chinois qui resteraient dans la course ". Le syndicat évoque des rumeurs de reprise du site par Olympus, la maison-mère de British Steel et actuel propriétaire de l'usine Ascoval de Saint Saulve, et/ou par Liberty House, le groupe fondé par l'Indien Sanjeev Gupta, qui pratique depuis sa fondation une politique de croissance externe très agressive.