Il y a 40 ans, le FC Metz renversait Barcelone, "il n'y a rien d'irrationnel, Metz a construit sa victoire"

Il y a quarante ans, le 3 octobre 1984, le FC Metz réalise le plus grand exploit du football français en Coupe d’Europe : renverser le FC Barcelone sur la mythique pelouse du Camp Nou. Pas de retransmission télévisée pour cet exploit mais des souvenirs toujours aussi forts.

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Tout a été écrit ou presque sur cette soirée du 3 octobre 1984 au Camp Nou de Barcelone pour le match retour des seizièmes de finale de la Coupe d'Europe des vainqueurs de coupe 1984-1985 entre le FC Metz et le Barça. Exploit, miracle, humiliation... Une remontada 80's aux qualificatifs régulièrement recyclés : fantastique, inoubliable, inimaginable, invraisemblable... "On ne réalise pas vraiment ce qui s'est passé, c'est possible" confirme lucide et sans excès le président Carlo Molinari au micro du journaliste Gérad Clavel, de France 3 Lorraine, juste après la rencontre, "sachez qu'intérieurement, nous éprouvons une très grande joie." Il y a de quoi ! En s'imposant 4 à 1 en Catalogne après s'être incliné 4 à 2 à Saint-Symphorien, le FC Metz entre sans discussion dans la légende du foot français.

L'ogre barcelonais

À l’époque, la compétition est relevée et les grenats ont gagné le droit de la disputer après avoir soulevé la Coupe de France contre Monaco (Victoire 2-0 après prolongations). Parmi les équipes engagées dans cette Coupe d'Europe, des ténors du foot européen comme le Bayern Munich, l'AS Rome, le Celtic Glasgow, Everton ou encore le Rapid Vienne mais aussi des petits poucets comme le voisin du Racing Union Luxembourg.

Le tirage au sort est sans pitié pour l'équipe entraînée par Marcel Husson. Ce sera Barcelone et ses neuf titres de champion d’Espagne où résonnent encore les noms des Hollandais Johan Cruijff et Johan Heeskens ou du buteur autrichien Hans Krankl. Un affrontement entre une 2CV et une Ferrari. Diego Maradona vient de quitter le club après deux saisons. L'attaquant écossais Steve Archibald, vainqueur de la Coupe UEFA avec Tottenham est une des nouvelles vedettes des Blaugranas avec le milieu de génie et enfant terrible du foot allemand, Bernd Schuster et les espagnols Ramón Alexanko Ventosa ou Lobo Carrasco. Un Barça pas très paillette mais solide et entraîné par un anglais que les clubs européens s'arrachent à l'époque, Terry Venables. Un autre monde. Une autre planète.

Au match aller, le FC Metz a fait preuve de beaucoup de complaisance, en offrant plusieurs buts à son prestigieux adversaire. Grosse cata et une défaite 4 buts à 2 devant 22.000 spectateurs. Logique respectée. Bernd Schuster en rajoute et ironise en qualifiant les joueurs messins de "jambons." Dans ces conditions, le match retour semble joué d'avance. Un petit tour et puis s'en va. Barcelone est déjà qualifié. L'affiche n'est même pas retransmise à la télévision française. Une soirée cauchemar en perspective où il faut éviter l'humiliation. Finalement, Metz est déjà éliminé. Tout est plié pour les joueurs Grenats de l'époque (Ettorre, Zappia, Sonor, Rohr, Bernad, Bracigliano, Hinschberger, Kurbos ou encore Bocandé) qui arrivent à Barcelone, presque en touristes. "Certains joueurs sont allés voir l'Open de tennis ATP" se souvient Joel Muller (1), qui était du voyage en tant que responsable du centre de formation, "d'autres sont allés se balader, comme moi, d'autres sont restés à l'hôtel. Il y avait une certaine décontraction dans la mesure où on avait tout à gagner."

"La veille du match retour, un dîner a lieu entre les dirigeants et lors de ce dîner, les dirigeants barcelonais invitent Carlo Molinari à venir assister au prochain tour du Barça dans cette coupe d'Europe" rapporte le journaliste Pierre Théobald, auteur de la "Nuit des jambons" (2) qui revient dans un livre sur cette rencontre, "vous serez notre invité, lui disent-ils. Ils n'imaginaient pas le scenario que l'on connaît."

"Au niveau de la causerie, j'ai joué sur l'amour-propre du collectif" raconte Marcel Husson, l'entraîneur des grenats (1), "on n'avait pas été bon à l'aller. Avec toutes les critiques subies, on était persuadé qu'on serait capable de hisser notre niveau de jeu et ça s'est produit".

La lucidité messine

Miracle, les Messins semblent invincibles ce soir-là. Pourtant mené 1 à 0 grâce à Carrasco, déjà buteur à Metz, qui ouvre la marque pour les Blaugranas à la demi-heure de jeu, Metz vire en tête à la mi-temps après l'égalisation de Tony Kurbos et un but de Sanchez qui donne l’avantage aux Grenats en marquant contre son camp (1-2, 39°). "J'y ai toujours cru" affirme Michel Etorre au micro de France 3 Lorraine (Video 1), "c'était un état de grâce, j'étais persuadé qu'on allait gagner." "Moi aussi, j'y ai toujours cru" explique Jean-Paul Bernad, invité sur le plateau de France 3 Metz, "ils en faisaient un plat de Barcelone mais ils étaient prenables. Ils étaient lourds en défense et j'ai dit aux gars que si on arrivait à jouer en rapidité, on risque de passer."

Il n'y a rien d'irrationnel dans ce match, le FC Metz a construit sa victoire face à Barcelone

Pierre Theobald, journaliste et écrivain

"Il n'y a rien d'irrationnel dans ce match" insiste Pierre Theobald, "le FC Metz a construit sa victoire face à Barcelone. Nos flèches en attaque, Jules Bocandé et Tony Kurbos ont crucifié une défense très lourde. Et derrière, on a tenu."

Presque à lui tout seul, Tony Kurbos corrige le Barça en inscrivant trois buts. "Tout le monde a fait le match de sa vie, un match extraordinaire" rappelle modestement l'attaquant recruté en Belgique au KSK Tongeren (1), "qu'est-ce qu'on n'a pas fêté ! On a fait quelque chose de grand. Mon quatrième but, c'était du délire. Je me souviens que les supporters du Barça ont quitté le stade en courant. Nous, on était aux anges. Le déclic a eu lieu dans le vestiaire à la mi-temps. On s'est dit, on peut gagner et se qualifier." Victoire finale : 4 à 1.

Le gros regret, c'est le deuxième tour face et une élimination face à une équipe de RDA : le Dynamo de Dresde (1-3, 0-0). La Grosse satisfaction, c'est la saison en première division, l'équipe finit à la cinquième place du championnat de France. "C'est la preuve qu'on avait des qualités" dit Marcel Husson. En fin de saison, huit joueurs quittent la Moselle pour des équipes plus prestigieuses comme Tony Kurbos qui signe à Saint-Etienne ou Jean-Philippe Rohr qui rejoint Monaco. "Cette équipe était composée à 70% de joueurs de Moselle ou de Meurthe-et-Moselle" insiste Pierre Theobald, "à l'époque, le département et la région Lorraine était en grande difficulté comme le FC Metz qui a failli disparaître car il était au bord de la faillite. Et à un moment, il y a eu ce sursaut avec la victoire en coupe de France et cette victoire en Catalogne. Ce n'est que du foot mais ce qui se passait sur le terrain était aussi le reflet de ce qui traversait la société, ici, avec la crise sidérurgique. Ce match restera, éternellement."

(1) Interview France 3 Metz, octobre 2009

(2) Pierre Théobald, "La Nuit des jambons", éditions du Goûteur Chauve (2024).

Metz – Barcelone : 2-4
Mercredi 19 septembre 1984 (Stade Saint-Symphorien) 1/32e de finale aller de la Coupe des Vainqueurs de Coupes
Buts pour Metz : Kurbos (44°), Rohr (85°, sp) ; Buts pour Barcelone : Sonor (12°, csc), Schuster (47°), Calderé (53°), Carrasco (64°).
L’équipe messine : Ettorre, Colombo (Lowitz, 62°), Zappia, Barraja, Sonor, Rohr, Bracigliano, Bernad, Hinschberger (Deza, 77°), Kurbos, Bocandé. Entraîneur : Marcel Husson.

Barcelone – Metz : 1-4
Mercredi 3 octobre 1984 (Camp Nou) 1/32e de finale retour de la Coupe des Vainqueurs de Coupes
Buts pour Metz : Kurbos (38°), Sanchez (39°, csc), Kurbos (55°), Kurbos (85°) ; But pour Barcelone : Carrasco (33°).
L’équipe messine : Ettorre, Lowitz, Zappia, Barraja (Pauk, 60°), Sonor (Colombo, 52°), Rohr, Bracigliano, Bernad, Hinschberger, Kurbos, Bocandé. Entraîneur : Marcel Husson.

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