La faillite de la maison mère norvégienne annoncée en octobre 2024 met un coup d’arrêt au projet d’installation d’une usine de production de solvant vert sur le site de la centrale thermique de Carling en Moselle. La filiale française, rebaptisée CSC France, doit trouver un nouvel investisseur sous peine d’abandon du projet.
"Circa ? Ça doit bien faire six ou sept mois qu’on ne les voit plus sur le site" lâche un salarié de la centrale thermique de Carling. Propriété de GazelEnergie, elle a signé avec Circa un bail pour accueillir une usine de production de solvant vert, produit avec des résidus de biomasse : le projet ReSolute.
Depuis la faillite de la maison mère norvégienne Circa en octobre 2024, la filiale française baptisée CSC France doit voler de ses propres ailes, et trouver elle-même les fonds nécessaires à la réalisation de ses projets.
"Tout est gelé" confirme David-Alexandre Leduc, consultant senior pour CSC France, "nous avons signé un bail de 18 ans avec GazelEnergie, 80% des équipements sont sur le site, et nous aurons l’autorisation environnementale de la DREAL le 22 novembre. Mais nous devons lever des fonds pour obtenir les garanties bancaires". En clair : il manque à CSC France, entité qui ne compte à l’heure actuelle que deux salariés, un investisseur qui permette d’emprunter et de rassurer tout le monde.
Dans sa communication, CSC France entend avec ReSolute "contribuer à la transformation de la chimie en verdissant les molécules chimiques pétro-sourcées via une nouvelle technologie brevetée pour synthétiser des molécules à forte valeur ajoutée issues de résidus de biomasse. Impacts : réduction de l’empreinte carbone, réduction significative (-90%) de la consommation énergétique, réduction des déchets et sous-produits (recyclage du biochar), et des produits qui ne sont plus reprotoxiques (selon la réglementation REACH). Le projet ReSolute est lauréat France Relance, France 2030 Export, BBI JU, et en cours de levée de fonds pour accompagner le LBO en cours ; son avancement global est de 55%".
Inquiétudes pour le futur développement de la plateforme chimique
Le consultant assure que la commercialisation des molécules vertes devrait trouver des débouchés en Suisse et en Allemagne notamment, dans l’industrie pharmaceutique, l’agrochimie et la parfumerie : "nos produits sont biosourcés et permettent aux industriels de raccourcir leur process, ils n’ont pas à éliminer les substances indésirables des produits pétroliers". 50 millions d’euros avaient été initialement levés avant la faillite de la maison mère, qui ont permis de procéder aux études d’ingénierie et d’acheter les premiers équipements. 50 emplois devaient être créés dans le projet initial.
Après les inquiétudes concernant le projet Parkes de recyclage du plastique, lui aussi "gelé", c’est un nouveau revers pour les espoirs de conversion de la plateforme de Carling vers la chimie verte. Si ces projets n’aboutissent pas, la possibilité pour GazelEnergie de construire une centrale biomasse s’éloignerait : le groupe n’aurait plus d’énergie à fournir à Parkes ni à ReSolute. Dans son accord avec Circa, GazelEnergie devait également transférer des personnels pour faire tourner l'usine.
Si l'État décide de ne pas prolonger l'autorisation d'exploitation de la tranche thermique au-delà du printemps 2025, il ne resterait à GazelEnergie que la perspective d’une unité de production d’hydrogène pour maintenir durablement sa présence en Moselle. Ce projet, baptisé Emil’HY, pourrait voir le jour en 2027 et constituer un espoir de reclassement pour les salariés de la centrale en cas d’abandon définitif du charbon.
Gazel a également mis sur la table la possibilité de convertir sa centrale à charbon au biogaz, elle écrit dans un communiqué de presse avoir "déposé un dossier industriel le 5 septembre 2024 visant la conversion de cette centrale au biogaz à travers un investissement de plus de 100 millions d’euros, ce qui permettrait de sécuriser le système électrique tout en respectant les objectifs climatiques de neutralité carbone. Plusieurs réunions avec les cabinets des ministres concernés et avec l’administration ont eu lieu pour rendre opérationnelle cette option".
"Les actionnaires de Gazel ont donné leur accord pour investir, et les clients sidérurgistes sarrois ont décidé d'accélérer leur virage à l'hydrogène, les signaux sont très positifs de ce côté-là" assure un bon connaisseur du dossier. L'hydrogène pourrait créer plusieurs centaines d'emplois en Moselle-Est si l'ensemble des projets, réunis sous la marque mosaHYc (Moselle Sarre HYdrogène Conversion) aboutissent à l'horizon 2050.