Trois mois après la tenue à Metz des Assises Nationales des Centre-villes, un commerçant Messin tente de lancer un système de monnaie locale, baptisée le Beanz. Objectif : favoriser les achats chez les commerçants du centre.
La question de la fuite des consommateurs vers les périphéries des villes menace la majorité des villes moyennes et le monde rural. Les réponses face à cet exode commercial tentent de s'imposer avec plus ou moins de succès.
En Moselle, trois mois après les Assises des Centre-ville à Metz, un commerçant du centre-ville de Metz, Sandro Di Bernardi, tente une nouvelle expérience. Avec un système de paiement qu'il définit comme "gagnant-gagnant". Grâce à une sorte de monnaie locale qu'il a baptisée, le Beanz. Reprenant le nom de la fève de cacao qui constituait jadis une monnaie.
Comment ça marche ?
Son système de paiement poursuit un double objectif, celui d'attirer les clients vers le centre de Metz, avec une carte qui permet de gagner un peu d'argent à chaque achat chez l'un des 350 commerçants partenaires. Fabriqué par des Chinois, sous Android, ce terminal ressemble à un lecteur de carte bleue et à un téléphone. Il permet aux commerçants de grouper leurs frais bancaires, et donc de payer moins cher les transactions.
En échange de quoi, ils reversent quelques centimes d'euros aux clients. Pour 10 euros dépensés, le client récupère 80 centimes sur sa carte.
Frédéric Schnur, président de Grand Est Numérique estime pour sa part que l'initiative mérite d'être soutenue.
C'est une monnaie locale dématérialisée. Les essais de monnaie locale réelle ont souvent échoué, je pense que cette monnaie liée à une carte bancaire ne peut que fonctionner.
Cet argent crédité est utilisable uniquement chez les commerçants de ce réseau local, ou bien pour payer son stationnement dans l'un des 12 parcs de la ville.
"J'agis comme une centrale d'achat, explique l'inventeur du système local Sandro Di Bernardi. Qui précise prendre au passage un petit pourcentage pour chaque transaction. En fait, on veut faire comme les géants de l'achat en ligne, concentrer des volumes et faire baisser les frais bancaires de 10 et 20%".
Le système doit permettre à chaque commerçants d'économiser entre 5000 et 10000 euros par an.
Le tarif mensuel de la location du terminal est de 25 euros par mois.
Cash-back ou crédit fidélité
"Mon intérêt est à la fois idéologique et en terme de business. Avec la carte Bonjour Metz qui est utilisée pour payer son stationnement. Elle devient un vrai moyen de paiement. D'autant qu'on peut coupler cette carte Bonjour Metz avec sa carte bleue. Idéologique car je ne veux pas laisser mourir les centre-villes".
Chaque client qui utilise cette carte a renseigné au préalable son identité. Ce qui génère une traçabilité. Espionnage ? Oui et non, car il s'agit d'achats du quotidien. Le client sait qu’il est identifié, mais il gagne des offres personnalisées. Le commerçant peut tirer des enseignements sur sa clientèle.
Ce cash back ou "crédit fidélité" en français est connectée avec les 12 parking de la ville et les 350 horodateurs installés à Metz. L'unité de monnaie locale, le BEANZ (dites bin's) est égale à un euro. Il vise à consommer localement.
Lien social
Créer de l’attractivité voilà ce qui est visé. "Car face à la mondialisation, il y a aussi des effets pervers. une partie de l’argent s’échappe de la vile et appauvrit le commerce local". Une tentative qui a séduit le conseiller municipal de Metz et médecin urgentiste de guerre Raphaël Piti. "Je soutiens l'idée de créer une monnaie locale. Souvent les essais se sont effondrés or il faut du durable. On ne peut pas empêcher un entrepreneur de se lancer. Ces monnaies existent partout ou presque, mais il faut donner envie de l’utiliser. C'est possible de dépenser en monnaie locale. Et on a des problèmes dans les centre-villes. Cette monnaie peut créer du lien social".
Pour l'anecdote, au Moyen Âge, Metz possédait déjà une monnaie locale : le gros et le demi-gros !
Pour le médecin qui aspire à plus de solidarité dans les villes, ce genre de système permet une réapropriation citoyenne, elle donne confiance dans l'échange commun. la monnaie locale doit être circulaire, solidaire et éthique. D'ailleurs les commerçants pourront inviter les clients à arrondir leurs achats au chiffre supérieur. Le surplus permettra d'alimenter le fonds de dotation Metz mécène solidaires. Un fonds qui contribue a subventionner des projets de l'économie sociale solidaire.
Si le système fonctionne, ce commerçant messin envisage de le déployer partout en France. La commune de Cagnes sur Mer va adopter le terminal de paiement cet automne 2018.
Pour moi, les concurrents des commerçants de centre-ville sont à l’extérieur. Ce système est une réponse à la fuite des acheteurs et donc la fuite de l'argent ailleurs qu'à Metz. Sandro di Bernardi.
A Metz, 34 000 personnes possèdent déjà une carte Bonjour Metz activée, sur une population intra muros estimée à 125 000 personnes. La Ville a facilité les accords avec les gestionnaires de parkings et assure la promotion à l'extérieur.
L'idée avait été a été mise en avant aux Assises du centre ville en juin à Metz.
Le secrétaire d'État auprès du ministre de la Cohésion des territoires, Julien Denormandie lui a demandé de venir lui expliquer son système à Paris. Et le député LREM de Moselle, ex premier adjoint à la Mairie de Metz, Richard Lioger a également apporté son soutien.
Ce système doit entrer en vigueur à Metz le 1er octobre 2018. 50 commerçants du centre commercial Muse situé près de la gare de Metz seront également de la partie.