REPLAY. "La grande tueuse" : le documentaire à revoir sur les mineurs de charbon et leur combat pour leur santé

En janvier 2021, les 726 anciens mineurs des Charbonnages de Lorraine ont obtenu que leur préjudice d'anxiété soit reconnu. Dans la mine de charbon, ils ont bien été exposés à des substances toxiques. Le documentaire "La grande tueuse" retrace les combats de haute lutte des mineurs pour leur santé et leur sécurité.

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C'est dans les friches du carreau Vouters à Freyming-Merlebach (Moselle) que s'ouvre le documentaire La grande tueuse. Quelques anciens mineurs de charbon, des "Gueules noires" y accompagnent les réalisateurs sur les vestiges de leur passé professionnel. Voici trois bonnes raisons de voir le documentaire de Marion Fontaine et Richard Berthollet qui retrace les années de lutte pour leur sécurité, leur santé et leur hygiène face à un patronat plus préoccupé par sa productivité que leur santé.

1. Pour mettre un point/poing final à la lutte

Huit années de combat judiciaire, c'est le temps qu'il aura fallu à 726 anciens mineurs lorrains, des années après la fermeture de la dernière mine de charbon, pour faire reconnaître leur préjudice d'anxiété auprès de la cour d'appel de Douai dans le Nord. 


Un jugement qui reconnait qu'ils ont été exposés à des substances toxiques, durant leur carrière, et qu'ils sont en droit de craindre de tomber malades, par la faute de cette exposition. Comme tant de camarades qui ont succombé à des silicoses et autres cancers. C'est l'aboutissement d'une série de combats syndicaux, une sorte de poing levé face à la logique capitaliste des Houillères du Bassin de Lorraine (HBL).

2. Pour comprendre la réalité des dangers

Il est des métiers nimbés d'une aura de courage et de danger : pêcheurs, sidérurgistes, mineurs. Des héros populaires tout droit sortis des lectures de Moby Dick ou de Germinal. Mais la vraie vie est tout autre et beaucoup moins romanesque. Jean Kaspar, un ancien de la mine et secrétaire général CFDT de 1988 à 1992 témoigne : " À 16, 17 ans, quand j'étais au fond de la mine, il m'arrivait de pleurer tellement était dure la souffrance : ça je ne l'ai pas lu dans Zola, je l'ai vécu." Dans les années 1950, à l'aube des années de reconstruction de l'Après-Guerre, il faut fournir du charbon, beaucoup de charbon.

Alors, au mépris des règles de protection des ouvriers et des connaissances médicales et scientifiques, les dirigeants des Charbonnages de Lorraine vont perpétuer des méthodes de travail archaïques et dangereuses pour la santé de leurs mineurs de fond : masques inefficaces face aux différents produits toxiques (silice, amiante, dérivés de goudron, arsenic,...), marteau-piqueurs sans système d'injection d'eau et à air comprimé, etc.

On savait que c'était un métier dangereux (...), mais on avait confiance.

Un ancien mineur de fond

Un des mineurs qui témoigne dans le documentaire explique : " On savait que c'était un métier dangereux, difficile; mais on l'aimait et on avait confiance." Confiance dans les ingénieurs, les médecins, les dirigeants, censés les protéger. Même le danger ultime des coups de grisou semble maîtrisé. C'est sans prendre en compte la poursuite incessante du profit. Et malgré les craintes et les mises en garde, de terribles accidents surviennent dans les années 80. À ce jour, les voix de ces hommes courageux se rompent encore et leurs yeux s'humidifient toujours au récit de leurs souvenirs de ces moments tragiques.


Des mineurs de fond comme de la chair à charbon.

3. Pour dénoncer la perversité d'un système

C'est un système bien calculé : l'ouvrier qui prend des risques obtient des primes, celui qui est en arrière ligne touche moins. Lucien Privet, médecin engagé dans la lutte pour améliorer les conditions de travail des mineurs, l'explique ainsi : " Les gens étaient victimes des Trente Glorieuses : on gagne bien sa vie et on s'en fout pas mal de notre santé." Alors, même si les risques sont connus, ils sont minimisés non seulement par les dirigeants, mais aussi par ceux qui les prennent au vu des avantages financiers qu'ils gagnent. Le salaire de la peur, en quelque sorte . Ainsi ces pseudos avantages financiers viennent créer une sorte de pacte tacite commun: chacun y trouve ou croit y trouver son avantage.  Un jeu de dupes ?

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