Tous les deux ans, l’association Tekhné propose à plus de deux cent artistes de Nancy et des environs d’ouvrir leurs portes au grand public, afin d’échanger autour de leurs techniques et de leurs pratiques. Rencontre avec Matthieu Exposito, plasticien à Toul.

Installé dans le sous-sol de son pavillon, Matthieu Exposito quitte les élèves de son cours de dessin pour présenter son travail. Le ton est doux, posé, et contraste avec ses productions.

Le plasticien de 39 ans arrive sans détour au cœur de son projet artistique : trois ans à fréquenter les bars de Pantin, un quartier de Paris, crayons en main, "j’y allais pour dessiner les gens que je côtoyais". Entre 2004 et 2006, il passe de l’un à l’autre, "une douzaine de bars, dans un rayon de 500 mètres », à une période de sa vie où il estimait « avoir échoué, comme ceux que je voyais boire".

Autour d'un verre

L’artiste s’est nourri des visages, des ambiances, des conversations. Ni plainte, ni regret. Cette période difficile alimente encore son travail, quinze ans après. Sa situation personnelle vacillait, mais il avait un projet. Sa série de dessins, "autour d’un verre" est sobrement imprimée en sérigraphie. Des visages et des corps tordus par l’alcool, "dans ces lieux qui concentrent les échecs de notre société".

Matthieu Exposito évoque volontiers l’actualité sociale, comme une filiation naturelle de son périple parisien : "je montrais souvent ce que je dessinais à ceux qui étaient autour de moi, mais la plupart du temps je passais inaperçu et mon travail également". L’expérience de Pantin ancre le plasticien dans un rapport aux marginaux qu’il n’a pas quitté : "il m’a fallu digérer cette période, on ne veut plus voir ce qui ne va pas aujourd’hui, mais je me devais de montrer ce que moi j’avais vu".

Tendresse

Aucun misérabilisme, aucun jugement. L’artiste ne cache pas sa proximité passée avec ceux qu’il voyait se noyer au comptoir, ni la tendresse qu’il avait "pour cette population complètement hétérogène socialement, avec des chefs d’entreprise qui croisaient des prostituées, mais aussi des ouvriers ou des sans-abris, tous réunis dans un bar russe, chinois, ou algérien…"

Dans la même veine, "divergences pacifistes" creuse le propos, dans une série de tableaux petits formats, qui seront notamment exposés à la Douëra (Malzéville) en 2023. Les idéologies vacillent, le drapeau de l’amour tente de se frayer un chemin : "ce qui se passe en ce moment ne peut pas me laisser indifférent, le pass sanitaire, nos libertés, l’état de notre démocratie… j’essaye d’avancer avec mes images" conclue le plasticien qui expose également les oeuvres d'autres artistes, en vertu du principe des ouvertures d’ateliers.

Cette année Matthieu a proposé au collectif BWG de vendre son merchandising le temps d’un week-end. Ces teufeurs locaux ont pour projet de nettoyer systématiquement les lieux de leurs fêtes électroniques. Coni expose ses étonnantes xylogravures, des tranches d’arbre encrées et imprimées directement. Les Mains Sales d’Angoulême montrent leurs sérigraphies pour la première fois en Lorraine.

Seul plasticien professionnel toulois, Matthieu Exposito se réjouit de voir les habitants de sa ville venir découvrir son travail. Excentré par rapport au public nancéien, celui-ci constitue tout de même la majorité de sa fréquentation du week-end : "en 2019 j’ai accueilli 170 personnes dans mon atelier". Il sera présent au 39è salon d’Automne International de Lunéville du 2 au 25 octobre 2021, et également aux Flâneries d’Art contemporain à Aix en Provence en juin 2022.

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