Régionales 2021 dans le Grand Est : Jean Rottner élu, quels sont les 5 chantiers urgents qui attendent le président

Avec 40% des voix, Jean Rottner (LR) est largement réélu à la tête de la région Grand Est. Au-delà du programme de campagne, quels sont les grands chantiers qui attendent le président dans une région où l'abstention a encore une fois enregistré des records ?

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Quel est le point commun entre Jean-Sébastien Bach, ACDC, Christine and the Queens, Indochine ou encore Grand Corps Malade ? Et bien ces cinq artistes et groupes font partie des incontournables de la playlist de Jean Rottner. Le président LR de la région avoue même écouter en boucle l'electro pop de Christine and the Queens pour donner du rythme à ses discours. La playlist est éclectique, surprenante voire même surréaliste. A l'image finalement du Grand Est. Un ensemble territorial tout aussi éclectique et varié et qui, lui aussi, parait parfois assez kafkaïen. Lors de sa création, qu'y avait t-il de commun entre l'Alsace, la Champagne-Ardenne et la Lorraine hormis la volonté d'un exécutif d'accélérer soudainement leur fusion pour en faire une “super région” au plan européen ? Qu'y a t-il de commun aujourd'hui ? Pas grand chose... Hormis l'appellation Grand Est.

Si dans une playlist, ces morceaux peuvent s'enchaîner sans trop d'accrocs, sur le terrain, c'est une toute autre histoire. Après cinq années d'existence, le Grand Est souffre encore d'un accouchement délicat. Un mariage forcé à trois où ses six millions d'habitants sont encore perdus. La région a beau avoir changé de nom démocratiquement, en évacuant l'Acalie, la Nouvelle Austrasie ou Rhin-Champagne, elle est toujours en quête d'identité.

Le contexte n'est guère encourageant. Même si l'abstention n'est pas propre au Grand Est, un record y a tout de même été enregistré lors du premier tour puis du second tour des régionales. Le Grand Est, champion de l'abstention, ce n'est pas un hasard. Le bateau est à flot mais prend l'eau. Et un peu plus depuis la création de la Communauté européenne d’Alsace (CEA). Haut-Rhin et Bas-Rhin ont fusionné depuis le 1er janvier pour créer un seul département, avec des compétences élargies par rapport à leurs homologues. C'est un peu devenu la région dans la région.

Dans son discours lors de la création de l’assemblée de la nouvelle Communauté européenne d’Alsace (CEA) à Colmar, Jean Castex, le Premier ministre, s'est même permis de torpiller la région Grand Est en rappelant ses doutes face à la création des “immenses régions”. Pour mettre le feu et ajouter un clou sur le cercueil, pas mieux. Pour Jean Rottner, malgré cette victoire, ce second mandat appelle des chantiers d'urgence.

Inventer une identité Grand Est

Cette identité du Grand Est, il va bien falloir se pencher dessus sérieusement, sans nier certains particularismes locaux, essentiellement alsaciens. C'est un chantier majeur. Et rien n'empêche de s'appuyer sur les différences pour construire. Pour reprendre un jargon sportif, Jean Rottner est un peu à la tête d'une équipe coupée en deux (voire en trois) et qui n'arrive pas à jouer collectif. A lui de s'appuyer sur des relais qui devront d'abord travailler sur un projet global avant de la jouer perso. De nouvelles têtes arrivent à la région et il va falloir apprendre à les gérer.

Malgré les héritages d'un passé (culture industrielle, conflits mondiaux, construction européenne...), il n'y a pas d'histoire commune. Inutile de la chercher ou de l'inventer, mieux vaut la construire. Inventer une identité, cela dépasse la simple communication et passe sans doute par des projets culturels ambitieux et novateurs en s'appuyant sur l'existant (festivals itinérants, résidences d'artistes...). L'éducation peut aussi être un accélérateur d'échanges et de collaboration au sein même de la région Grand Est à travers la création, par exemple, de nouveaux diplômes trans-universitaires. La région pourrait aussi encourager ces collaborations à travers la mise en place de programme de recherche qui concerneraient tous les acteurs du Grand Est. Dans certains cas, c'est dans les tuyaux. Mais il va falloir passer la seconde.

Lorsqu'il était élu à la mairie de Mulhouse, Jean Rottner s'est notamment occupé de l'urbanisme et de la proximité. Son dada, c'était la reconquête de la ville et de l'espace urbain... Ce travail, c'est aussi ce qui l'attend finalement aujourd'hui. Il faut peut-être considérer le Grand Est comme une friche où tout reste à faire.

Développer les échanges

Pour créer cette identité, il est indispensable de favoriser les échanges. Si Jean Rottner a toujours fait une priorité de la relance de certaines lignes de chemin de fer, en intégrant par ailleurs l’ouverture à la concurrence ferroviaire, il est nécessaire de franchir un cap. Tant qu'un habitant de Reims mettra plusieurs heures pour se rendre à Mulhouse en train, il n'y aura pas le sentiment d'appartenance au même territoire.

Ces investissements ne sont pas du ressort de la région et dépendent fortement de l'Etat. Mais la région peut-elle se permettre de ne pas accélérer les grands projets d’infrastructures de transports et de mobilités ? Ils sont connus comme développer toute la chaîne de mobilité et valoriser l’existant, gommer les “effets frontière” ou encore affirmer le rôle de la Région dans la gouvernance des transports.

Jean Rottner évoque souvent sa volonté de “relier le Grand Est au monde” mais il va aussi falloir relier davantage les régions entre elles en tissant un maillage fort et efficace. Il faut peut être désormais réfléchir à l'échelle d'un “pays” et non plus d'une “région”, aussi grande soit elle, en ce qui concerne l'aménagement du territoire, notamment en zone rurale.

Accélérer une nouvelle phase de décentralisation

C'est une nouvelle étape indispensable. Durant cette campagne, il a souvent été question du périmètre des compétences de la Région. Elles doivent aller bien au-delà des transports, des lycées et de la formation. La région doit augmenter sa capacité d'action, faute de quoi, elle ne sera qu'administrative et non politique.

Au-delà de la crise démocratique et du désintérêt pour des élections de la part des citoyens, il serait peut-être bon de renouveler le champ de l'action publique. Jean Rottner ne cesse de répéter qu'un président a du poids auprès de l'exécutif. A lui, comme ses collègues de forcer l'élargissement de ces compétences. Parmi les présidents de la Région élus, il y a sans doute un leadership à prendre en se positionnant sur des domaines comme la santé. Xavier Bertrand​, Laurent Wauquiez et Valérie Pécresse sont désormais partis sur les présidentielles. A Jean Rottner de creuser son propre sillon.

Réaffirmer l'européanité du Grand Est

Dans cette région frontalière par excellence, le président du Grand Est doit batailler pour obtenir un statut dérogatoire afin de pouvoir discuter sans filtre avec les voisins européens des différents projets d'investissements et de collaboration. Si d'un point de vue purement constitutionnel, cela paraît difficilement faisable, pourquoi ne pas chaque année réaliser l'équivalent d'un mini-sommet entre tous ces partenaires. Auprès de ses voisins, la région Grand Est est une marque reconnue. C'est un paradoxe mais il est impératif de capitaliser. A Jean Rottner de prendre l'initiative sur la création de ce "G7 régionalisé".

La représentativité

Avec près de 40%, les équipes élues pour ce mandat devront faire preuve d'une grande modestie. Jean Rottner se définit comme un non-professionnel en politique. Il est un peu tombé dedans par hasard. S'il a l'étiquette LR et qu'il a parfois droitiser ses positions dans cette campagne, il est et demeure centriste dans l'âme. Se recentrer, c'est un impératif de gouvernance pour les prochaines années. A lui de dépasser les clans. Jean Rottner se dit ambitieux...

Enfin, exister auprès des jeunes, autrement qu'en leur fournissant un ordinateur pour leurs études, c'est aussi un des chantiers majeurs qui attend Jean Rottner. Ce dimanche 27 juin, ils ont été encore une fois, une grande majorité à bouder les urnes.

Ce dimanche 27 juin au soir, Jean Rottner a déclaré qu'il serait "le président de tous... Nous devons être volontaires et conquérants aux côtés de l’État et des autres collectivités... Je ferai de l'hémicycle régional un lieu de débats constructifs et respectueux de chaque sensibilité."

 

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