REPLAY - "Vincent Munier, l'éternel émerveillé", un documentaire intimiste sur le célèbre photographe animalier vosgien

C'est un portrait très intimiste que nous vous proposons. Celui du photographe animalier et naturaliste vosgien Vincent Munier, pourtant peu féru de caméras braquées sur lui. Voici 3 bonnes raisons de voir ce documentaire de Benoît Aymon et Pierre-Antoine Hiroz.

Il ne se définit pas seulement comme un photographe de la nature sauvage, mais aussi comme naturaliste. Vincent Munier, né dans les Vosges, parcourt les territoires du monde à la recherche des animaux les plus furtifs qui soient : panthères, ours, lynx, tétras et bien sûr le loup blanc, ou plus récemment la panthère des neiges avec Sylvain Tesson . Mais il ne se contente pas de les prendre en photo.

Voici trois bonnes raisons de regarder son portrait, très intimiste, ici en replay.

1 - Pour apprivoiser la patience

Ça commence un peu comme dans une histoire pour enfants, un joli conte : "Il était une fois, au coeur d'un village des Vosges un petit garçon prénommé Vincent. Vincent aimait parcourir ses montagnes et sa forêt et pour son douzième anniversaire, son père lui offrit un appareil photo..."

Pourtant, en réalité, l'histoire ne commence pas là. Elle est déjà en lui lorsqu'il se balade, tout petit, avec son père dans la forêt, à la recherche des traces des animaux qui y vivent comme le grand tétras par exemple. Là, ils apprennent à écouter, à s'imprégner de la forêt, à repérer les empreintes.

Vincent apprend auprès de son père Michel à écouter la forêt. Michel lui transmet son savoir de grand observateur sur les signes laissés par la faune : ici, une touffe de poils accrochée à des branchages, là une crotte de tétras dont la couleur et la texture lui indiquent même l'heure à laquelle elle a été déposée. Tout ce langage de la forêt qui ne s'apprend pas dans les livres, mais bien au gré de longues heures d'écoute et d'observation. 

Et de balades en affûts, Vincent apprend à regarder. Il raconte avec pudeur son premier grand souvenir : "En novembre 1988, à 12 ans, dans la forêt de Chamagne, mon père m'avait laissé sous un filet de camouflage tout seul pendant plusieurs heures." Un souvenir teinté à la fois de fierté de la confiance faite par ce père qui choisit de le laisser seul, mais aussi de l'angoisse provoquée par la solitude et les dangers éventuels ou supposés de la forêt qui l'entoure.

Au bout de quelque temps, l'enfant entend derrière lui des bruits de feuilles craquant sous le poids d'un animal qu'il ne peut voir. Frissonnant, retenant sa respiration, il réussit tant bien que mal, à se retourner et découvre à quelques mètres à peine un petit chevreuil qui l'observe. Sa main tremblante enclenche l'obturateur de son appareil, et la photo sera un peu floue. Un instant déterminant.

Ça a été une sorte de révélation, cette rencontre avec ce chevreuil, le basculement de ma vie.
- Vincent Munier, alors photographe en devenir

Mais il l'affirme, la photo n'est pas déterminante dans sa quête de nature. 

Un appareil photo, c'est pas nécessaire tout le temps. Se balader avec des jumelles, c'est suffisant.
- Vincent Munier, observateur insatiable

Il poursuit : "Parfois, la photographie peut te gâcher l'émotion. l'appareil est comme une barrière entre toi et l'émotion."


2 - Pour refuser tout conformisme

Ce que le jeune Vincent comprend très vite, c'est que son oeil n'est que l'intermédiaire. Mais qu'il est unique aussi. "Je ne crois pas être un artiste, je suis un témoin de ce qui se passe. L'art est dans la nature. Je suis là ; j'ai un regard. je pose le regard un peu différemment, mais l'art est partout." Vincent Munier, ou l'art se s'effacer devant ce qui est. 

Car l'essentiel est dans cette relation à la nature. "Il faut faire une image qui vienne de toi." C'est la raison pour laquelle, il a choisi de quitter toutes les associations de photographes. On lui parlait cadrage, on y refusait le flou ; on lui coupait les ailes. "Heureusement, qu'on s'est sorti de ça. Il faut savoir dire non. C'est pas ce que j'ai là-dedans !", dit-il en se frappant la poitrine. 

T'essayes de mettre en image tes rêves (...) Une belle image, c'est une transmission d'une émotion
- Vincent Munier, observateur rêveur

S'il devait donner un conseil aux jeunes apprentis photographes, ce serait celui-ci : "Qu'ils lisent du Hainard ou du Geroudet avant de lire les fiches techniques du dernier Nikkon." L'apprentissage se vit au long cours. Il est affaire d'attente et de patience. Il est dans l'attente, et plus encore dans l'attente solitaire.

Ça m'est arrivé plusieurs fois de partir un mois pour voir le loup blanc par exemple et ne voir que des traces. C'est pas du tout une frustration.
- Vincent Munier, maître ès patience.

Il ajoute avec un brin de lyrisme : "L'art de l'affût, c'est que rien n'est garanti. C'est la promesse de l'invisible". Apprendre à respecter ce que la nature te donne. Rester humble devant elle. Et plus encore, "faire son apprentissage seul, car c'est plus riche." 


3 - Pour respirer de concert avec les vivants

Sa compagne dit de lui qu'"il se met au diapason des énergies du lieu et il écoute." Il ouvre non seulement ses yeux mais ses oreilles au monde qu'il l'entoure. Elle poursuit : "Vincent, il préfère la compagnie des animaux, des arbres ; tu le vois se transformer quand il part sur le terrain. Ici il trépigne: t'as l'impression de voir un animal en cage."

Sur le terrain, il rayonne, ça le révèle.
- Marie Amiguet, compagne de Vincent

On sent l'admiration dans les yeux de Marie, mais aussi de Michel. "J'ai de l'admiration pour sa capacité à se connecter au vivant, à lire les traces invisibles", dit-elle. Avec son père, le photographe continue de s'émerveiller devant un crotte de tétras : "Une crotte de grand tétras, ça fait chaud au coeur !" s'exclame-t-il lorsqu'ils la découvrent sur un petit terre-plein. 

Inlassable aventurier, il se rend sur les territoires des animaux qu'il désire rencontrer. Asturies, Norvège, Japon jusqu'au Grand Nord, où il affrontera des températures de -40°C. "Je rêve , je l'imagine [la rencontre]. Et quand ça t'arrive en vrai, t'as un putain de choc qui t'anime. C'est ce qui fait que tu continues dans la douleur, le froid, l'humidité. Non c'est des clopinettes tout ça ! T'oublies ce genre de souffrance". ​​​​Ce qu'il recherche avant tout, c'est la vibration. 

Quand j'entends un loup chanter, ça me fait vibrer. t'as le poil ! Pareil avec l'ours.
- Vincent Munier, musicien du silence et des chants

Et le point d'orgue du documentaire - il n'est pas question de le révéler ici - réside dans le récit de sa rencontre avec le loup blanc du Grand Nord canadien. Un moment "waouh" où sa fusion avec la nature nous laisse béat et où l'homme plutôt taiseux devient intarissable. 

Ce que je veux, c'est montrer l'utilité de la beauté de la nature. Il faut qu'il y ait des chocs pour qu'on se réveille de cette fausse route. 
- Vincent Munier, naturaliste


Parole prémonitoire de l'homme à l'écoute de son environnement. Laissez-vous griser par le documentaire Vincent Munier, l'éternel émerveillé, un film de Benoît Aymon et Pierre-Antoine Huroz , produit par la Radio Télévision Suisse.
 

Pour aller plus loin

Il n'était pas possible d'évoquer ce documentaire sur Vincent Munier, sans le remettre dans le contexte actuel. Le 15 mai 2020, il a publié un texte sur sa page Facebook prônant l'ouverture à la beauté. À lire de toute urgence.

 

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