Les îles du Rhin sont situées entre le canal d’Alsace et le vieux-Rhin. Ces longues bandes de terre artificielles abritent aujourd'hui une faune et une flore typique des zones humides. L'eau apparaît au fond des anciens bras du fleuve. La vie aquatique y est particulièrement riche.
Sur les bords du Rhin, la végétation est très dense. On voit de grands arbres mais aussi des ronces, des buissons et des lianes. C’est une jungle, un paradis pour les animaux. L'eau apparaît à de nombreux endroits au milieu de la forêt, ce sont des rivières qui cheminent en sous-sol, d'anciens bras du Rhin. Ils sont déconnectés du fleuve depuis la construction du canal d’Alsace.
Serge Dumont est biologiste, chercheur et réalisateur de documentaires. Il nous guide pour mieux comprendre cet écosystème. "On retrouve les conditions d’un climat équatorial. Il y a de l’eau en pleine forêt, l’atmosphère est humide, les peupliers, les frênes et les saules connaissent une croissance exceptionnelle, c’est la végétation typique de la forêt alluviale du Rhin."
Dans les résurgences du Rhin, le chercheur n’est pas surpris de trouver des poissons. Des chevesnes, des épinoches mais aussi des vairons particulièrement exigeants sur la qualité et la température de l’eau. Un grand nombre d’invertébrés se déplace sur le fond. Entre les galets, des gammare, petits crustacés, sont en pleine période de reproduction.
L’eau est filtrée par les racines des arbres et les cailloux, la température est fraîche et constante même en période de canicule", explique Serge Dumont. Le Rhin est à moins de 100 mètres, c’est lui qui alimente la nappe phréatique, ici il y a de l’eau toute l’année même si le niveau varie beaucoup."
À la reconquête d'un écosystème disparu
Il y a 200 ans, ce biotope était bien plus étendu. Le Rhin a souffert des travaux d’endiguement entre 1815 et 1970. Au 19e siècle, le cours d’eau est modifié, sa trajectoire est rectifiée pour protéger les villages des crues, les bras du fleuve sont coupés. A partir de 1920, la construction du canal d’Alsace utilise une importante partie de l’eau du fleuve pour privilégier la navigation et la production hydroélectrique. C’est tout un écosystème qui a disparu.
Serge Dumont nous rappelle la surface du cours d’eau avant l’intervention humaine. "Le Rhin s’étendait sur une largeur de 7 km, il y avait jusqu’à 18 bras latéraux. Cette végétation que l’on voit aujourd’hui coincée sur une bande de 150 mètres de large sur l’île du Rhin s’étendait sur une bonne partie de la plaine d’Alsace."
Depuis 2019, le plan Rhin Vivant finance des actions de renaturation des rives, il s’agit de reconnecter d’anciens bras du fleuve. On peut voir le résultat d’un projet similaire sur l’île du Rhin de Kembs dans la réserve naturelle de la petite Camargue alsacienne où une ancienne zone humide a été remise en eau.
Toute la rive alsacienne devrait bénéficier de ce type d’aménagement dans les prochaines années. Pour le biologiste, c’est une bonne nouvelle : "C'est la meilleure solution pour retrouver de la biodiversité, c’est aussi le moyen d’apporter plus d’eau à la nappe phréatique. C’est en privilégiant les zones humides que l’on peut stocker l’eau en période de crue."