Dans les Vosges, l’influence des forces de gauche recule encore lors du premier tour des élections départementales 2021. Dans ce territoire ancré à droite, la gauche, peu implantée, n’est qualifiée au second tour que dans 6 cantons sur 17, et ne pourrait en gagner que deux.
Dans les Vosges, un territoire ancré à droite depuis la Révolution, difficile de faire entendre d’autres voix. La gauche en a fait les frais dimanche 20 juin 2021 à l’issue du premier tour des élections départementales. Bilan : les candidats de la majorité sortante, emmenée par le président Les Républicains François Vannson, sont en tête dans la quasi-totalité des cantons : 16 sur 17.
Un raz-de-marée qu’il sera difficile d’arrêter lors du second tour prévu dimanche 27 juin, tant les scores des binômes de droite sont élevés :
- A Mirecourt, 59,22% pour Nathalit Babouhot et Guy Sauvage
- A Remiremont, 62,98% pour Valérie Jankowski et le président sortant François Vannson
- Au Thillot, 75,57% pour Catherine Louis et Dominique Peduzzi
Deux cantons pour la gauche
Seuls deux cantons vont jouer les irréductibles de gauche. A Bruyères, les conseillers départementaux sortants (DVG) Bernadette Poirat et Christian Tarantola sont arrivés en tête du premier tour, avec 43,2% des voix. A Gérardmer, les sortants Gilbert Poirot et Jacqueline Valentin terminent 2ème, à 174 voix derrière le binôme divers droite, mais ils peuvent espérer un report des 930 voix des candidats PCF éliminés dès le premier tour.
Dans les quatre autres cantons où la gauche est qualifiée pour le second tour (La Bresse, Epinal-1, Epinal-2, Vittel), le retard sur les binômes de droite est relativement important, et ne laisse pas entrevoir de bascule.
La gauche recueille 20% des suffrages au niveau départemental. Un score honorable, mais loin des 55% de la droite et du centre, et toujours derrière les 22% de l’extrême droite.
Peu d'élus nationaux
La gauche reste historiquement peu implantée dans le département des Vosges. "Très peu d’élus locaux de gauche, au conseil départemental ou dans les communes, ont eu une envergure nationale", précise Etienne Criqui, professeur de sciences politiques à l’Université de Lorraine.
Il y a bien eu Christian Pierret, maire socialiste de Saint-Dié-des-Vosges de 1989 à 1997 puis de 2002 à 2014, et secrétaire d’Etat à l’Industrie du gouvernement Jospin. Mais à droite, on trouve notamment deux mastodontes de la politique locale et nationale :
- Philippe Séguin, maire d’Epinal de 1983 à 1997, président de l’Assemblée nationale, Premier président de la Cour des comptes
- Christian Poncelet, maire de Remiremont de 1983 à 2001, président du Sénat, président du Département des Vosges pendant 40 ans.
Jack Lang ou Ségolène Royal, personnalités socialistes de premier plan, originaires des Vosges, n’ont pas été engagés dans les politiques locales. Et à l’inverse, les élus locaux de gauche n’ont pas de notoriété nationale, à l’instar du maire socialiste de Gérardmer, Stessy Speissmann. "Ce n’est pas spécifique aux Vosges, d’autres départements du Grand Est comme la Meuse ou la Haute-Marne sont très ancrés à droite", explique Etienne Criqui.
Manque d'opposition
Lors de ce dernier mandat (2015-2021), les élus marqués à gauche au conseil départemental des Vosges n’ont pas incarné une opposition féroce face à la majorité. Ils ont même voté les six budgets annuels du Département. "On ne peut pas dire que ces candidats soient de gauche, résume la secrétaire départementale du PCF, Sandra Blaise. Même s’ils ont refusé la main tendue par François Vannson, ils sont soutenus par la majorité de droite."
Même François Vannson, lors de la soirée électorale dimanche 20 juin, a apporté une rectification, sourire en coin : "Ce n’est pas une opposition, c’est une minorité départementale qui vote les budgets." Le président sortant a même appelé à voter, face au RN, pour le binôme de gauche de Bernadette Poirat et Christian Tarantola à Bruyères, eux qui ont "bien rempli leurs fonctions au sein du Département".
Les principales compétences du Département (social, collèges, routes) ne sont pas les compétences les plus politisées, et l’empreinte d’une majorité de droite ou de gauche reste superficielle.
De moins en moins d'élus au Département
La nouvelle assemblée pourrait ne compter que 4 élus avec une étiquette de gauche. Ils ont été une dizaine entre 2008 et 2015, un chiffre réduit à 6 entre 2015 et 2021. Le contexte national a joué un rôle important. Avec la victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle en 2017, "les deux partis traditionnels, les Républicains et le Parti Socialiste, ont pris un sacré coup sur le crâne, en étant éliminés dès le premier tour", rappelle Etienne Criqui.
Dans les territoires où le PS était implanté, il résiste, encore dernièrement avec les bons scores des présidents de régions socialistes sortants. Mais dans les départements où il était déjà peu implanté, il sort encore plus faible. Et malgré certaines alliances ponctuelles, avec les écologistes ou le Parti communiste, le gauche part souvent divisée dans les élections.